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La Malaisie lance la première obligation verte islamique

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Les obligations vertes islamiques constituent un grand pas en avant pour le financement de projets
d’infrastructure respectueux de l’environnement, par exemple des centrales solaires en Malaisie.

Photo : Aisyaqilumar/bigsto

Ce sont les pays en développement qui devraient souffrir le plus des effets du changement climatique. La hausse des températures, l’évolution des régimes pluviométriques, l’élévation du niveau des mers et l’augmentation de la fréquence des catastrophes liées à des événements climatiques font peser des menaces sur l’agriculture, l’alimentation et l’approvisionnement en eau. Les récents progrès accomplis dans la lutte contre la pauvreté, la faim et les maladies, ainsi que dans l’amélioration des conditions de vie et des moyens de subsistance, risquent d’être réduits à néant dans ces pays.
 
Les obligations vertes émises par la Banque mondiale aident à sensibiliser les investisseurs et la communauté financière aux mesures que peuvent prendre les pays en développement pour faire face au changement climatique. Forts de notre expérience et de notre position de leader en la matière, nous conseillons les pays qui cherchent à mettre en place un marché pour ces titres.
 
L’année dernière, le Groupe de la Banque mondiale, par le biais de son Centre pour le partage des connaissances et la recherche (a) à Kuala Lumpur, a rejoint un groupe de travail technique constitué avec la Bank Negara Malaysia et la Commission des valeurs mobilières de la Malaisie pour soutenir le Programme de financement vert du pays. Nous apportons notre expérience et notre expertise à ce programme qui est destiné à encourager les investissements dans des projets écologiques ou durables en créant un marché pour la finance verte islamique, dans un premier temps en Malaisie, puis dans l’ensemble des pays formant l’Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN).

Ce programme a permis de lancer la première sukuk verte au monde, le 27 juin 2017 (a). Les sukuk sont des obligations conformes à la loi islamique. La spécificité des sukuk « vertes » est de financer des projets d’infrastructure sans impact à long terme sur l’environnement, tels que la construction d’une installation de production d’énergie à partir de sources renouvelables.
 
Ces titres pourraient non seulement contribuer au développement du marché de la finance islamique mais aussi permettre de combler le fossé qui sépare celle-ci du monde de la finance conventionnelle. À condition, toutefois, de parvenir à attirer les investisseurs traditionnels, ce qui passe par la perspective de rendements corrigés du risque suffisants et d’une bonne stratégie de marketing. Les sukuk qui remplissent ces critères et qui génèrent un financement pour des projets écologiquement viables pourraient particulièrement intéresser les investisseurs à la recherche de ce type de placement, principalement pour deux raisons.
 
Premièrement, ces investisseurs ont l’assurance que leur argent sera utilisé pour un projet précis. Pour être conformes aux principes de la charia, les fonds levés grâce à l’émission de sukuk doivent en effet être investis dans des actifs ou des entreprises identifiables. Par conséquent, si une sukuk est émise dans l’objectif de financer un projet d’infrastructure spécifique, par exemple dans le secteur des énergies renouvelables, il y a peu de risques que l’argent des investisseurs soit utilisé à d’autres fins.
 
Deuxièmement, à ce jour, il existe beaucoup plus de possibilités d’investir dans des projets environnementaux sur les marchés d’actions que sur les marchés obligataires. Cependant, étant donné que la plupart des investisseurs dans des projets écologiquement viables veulent savoir précisément comment leurs fonds seront utilisés, ils ne sont généralement pas intéressés par les obligations standard, à moins que toutes les activités de l’émetteur répondent à leurs critères environnementaux. Ils pourraient donc être attirés par les sukuk, dont les caractéristiques sont comparables à celles des titres classiques à revenu fixe, dans la mesure où le produit de l’émission est spécifiquement alloué au financement d’un projet bénéfique pour l’environnement.
 
Le Centre pour le partage des connaissances et la recherche travaille en partenariat avec des institutions publiques et privées, en Malaisie et dans d’autres pays, afin de développer des marchés et des services financiers modernes et intégrés. C’est cette collaboration qui est à l’origine de la nouvelle initiative en faveur de la finance verte islamique. Cette initiative contribuera à l’élaboration d’un produit financier innovant, qui pourra être utilisé dans le monde entier.


Auteurs

Faris Hadad-Zervos

World Bank Country Director for Maldives, Nepal and Sri Lanka

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