Publié sur Opinions

La coopération au cœur des efforts de rénovation des centrales hydroélectriques en Turquie

Hasan U?urlu Hydropower Plant in Turkey


Nichée au creux de la vallée verdoyante du Yeşilırmak, le barrage d’Hasan Uğurlu est un bastion de l'efficacité énergétique en Turquie. Au milieu d’un vaste paysage de verdure parsemé de rares bâtiments isolés, des panneaux à moitié masqués par la vigne vierge indiquent l'entrée de la centrale hydraulique. Le jour où je la visite, l’usine accueille l'un des projets les plus importants menés par la Banque mondiale dans le pays.

Nous sommes début août et une dizaine d'experts effectuent des tests d'efficacité énergétique. Hasan Uğurlu est l'une des 18 centrales hydroélectriques faisant l’objet d’évaluations mécaniques et électriques dans le cadre du projet d'efficacité énergétique dans la production d'électricité (a). Financé par l'Union européenne et géré par la Banque mondiale, ce projet est le deuxième de ce type mené avec EÜAŞ, la plus grande compagnie d'électricité du pays.

L'hydroélectricité joue et jouera un rôle déterminant dans la réussite des efforts de la Turquie en faveur d'une transition écologique , et c'est la principale raison d'être du projet. En effet, même de modestes économies d'énergie peuvent se traduire par d'énormes réductions de coûts pour le pays, c'est pourquoi prolonger la durée de vie des centrales telles que celle d'Hasan Uğurlu est un enjeu capital pour assurer un avenir énergétique durable en Turquie. Certaines centrales ne nécessiteront guère plus que des interventions de maintenance générale. Pour d'autres en revanche, il faudra réaliser des mises à niveau et des rénovations de grande envergure, voire procéder au remplacement des turbines. Dans tous les cas, notre travail consiste avant toute chose à déterminer l'état actuel des centrales, et notre projet représente la première étape de ce grand chantier.

La construction de la centrale d’Hasan Uğurlu a débuté en 1971 et elle a été entièrement financée par le Japon. L'évaluation d'une usine comme celle-ci, dont la documentation rédigée dans une autre langue date d'un demi-siècle, implique de pratiquer une sorte de « rétro-ingénierie », c'est-à-dire une déconstruction mentale de l'équipement pour comprendre sa conception et expliquer son fonctionnement.

Hasan Uğurlu Hydropower Plant, Turkey

 

Il faut pour cela travailler dans un environnement bruyant et étouffant. La centrale est encerclée par les montagnes qui dominent le fleuve et s'enfonce à 45 mètres sous le sol, sur plusieurs étages. Quand les turbines sont lancées, la température s'élève dans les salles souterraines et le bruit de l'alternateur, des machines et de l'eau qui les traverse devient assourdissant. Mais l'équipe du projet ne se laisse pas décourager. Tandis que nous sommes une vingtaine de personnes réunies autour de différents écrans affichant les données des turbines en temps réel, une surprise nous attend : un groupe d'étudiants du Centre de recherche sur l'énergie hydraulique de l'université TOBB se joint à nous, comme un clin d’œil au futur énergétique de la Turquie.

Les fondations d'un avenir plus vert

L'université TOBB héberge le plus grand centre mondial de conception et d'essai de turbines, d'une capacité de 2 MW, et témoigne du rôle majeur que l'hydroélectricité peut jouer dans l'avenir du pays. Une vingtaine d'étudiants ont déjà étayé leur thèse par des expériences sur le terrain et des analyses de données, et le groupe qui nous rejoint ce jour-là a participé activement à nos activités de rétro-ingénierie.

Notre projet offre aux chercheurs une occasion inégalée d'observer de près l'application de leurs travaux théoriques. Le Centre s'est donné pour objectif de faire en sorte que 100 % des composants de chaque centrale hydroélectrique de Turquie soient produits dans le pays, ce qui rend les données collectées ici particulièrement précieuses. Plus globalement, cependant, c’est dans la coopération que réside la plus grande réussite de ces travaux. La conduite du projet a été marquée par une coordination permanente entre le secteur privé, les pouvoirs publics et le monde universitaire. Cette coopération entre trois des principaux acteurs du secteur hydroélectrique va se poursuivre alors que le projet va à présent s'attacher à compiler les données, finaliser les rapports de faisabilité et former le personnel d'EÜAŞ et des centrales.

« Il n'est pas prévu que la Turquie réalise des investissements massifs dans la construction de nouvelles centrales », explique Kutay Çelebioğlu, le coordinateur du département de conception et d'essai des turbines du Centre. « Partir de zéro est toujours plus facile, mais il y a déjà beaucoup de capacité installée disponible en Turquie. »

Exploiter cette capacité dans le futur est un objectif clé pour Kutay et ses partenaires. Dans les décennies à venir, cela supposera de réhabiliter des installations existantes tout en menant à bien une myriade d'autres tâches. Le projet d'efficacité énergétique dans la production d'électricité contribue à jeter les bases de ce travail en favorisant l'un des éléments les plus critiques pour le succès des années à venir : la coopération.


Auteurs

Saadet Muge Ulku

Spécialiste de la communication

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