Depuis ces dernières années, la région Afrique a été victime d’une série d’inondation répétitive, résultant de fortes pluviométries, qui non-seulement sont de plus en plus fréquentes mais dont l’ampleur s’intensifie. Pour ne citer que le cas du Togo, qui depuis 2007, ne cesse de subir les effets de fortes pluies tous les ans; à Madagascar, les fortes tempêtes tropicales Ivan et Jowke ont affecté une bonne partie de l’ile en 2008. En 2009, la Namibie, la République Centrafricaine, le Burkina Faso, le Mali, le Sénégal, et la Mauritanie ont consécutivement été touchées. Et pendant cette année 2010, le Ghana, le Togo et le Benin sont aussi affectés. A l’heure actuelle, le Benin souffre encore des effets de fortes pluies, jamais survenues depuis 50 ans.
Même si les inondations sont courantes dans la région Afrique, depuis ces dernières années, l’ampleur, la fréquence et les dégâts occasionnés par ces inondations sont de plus en plus marquants pour les pays africains car elles entrainent des effets de plus en plus dévastateurs. Non seulement les infrastructures publiques et privées (routes, ponts, écoles, hôpitaux, marchés, de vastes champs de cultures …) sont endommagés dans plusieurs villages, quartiers et mêmes arrondissements, mais les biens et actifs des ménages sont également détruits. Ces facteurs entrainent rapidement une dégradation des conditions de vie des populations dans les zones affectées.
Face à tous ces dégâts, un bon nombre de défis attendent ces pays dans un très court délai, entre autres, comment mitiger les impacts de l’inondation, mais avant tout, comment évaluer les dommages et les pertes, et par la suite identifier les besoins et les prioriser, compte tenu de la rareté des ressources disponibles aussi bien au sein du gouvernement que des bailleurs des fonds.
L’expérience tirée de l’évaluation de l’impact économique et social, du moins dans 5 pays africains (Madagascar, Namibie, République Centrafricaine, Burkina-Faso et Sénégal), nous amène à considérer deux faits marquants, et quelquefois bouleversants. D’une part, lorsque l’inondation touche une plus grande partie du pays, l’impact macro économique est plus conséquent, (en Namibie, 6 régions étaient affectés, le PIB de l’année en cours a baissé de 0.6% par rapport à la prévision initiale ; sur les 11 régions sur 13 affectées au Burkina Faso, la baisse du PIB de l’année 2009 était de 0.8% avec 119,356 victimes, 46 morts et 3 blessés ; et à Madagascar, le taux de croissance économique de 2008 était réduit de 0.3%), car des secteurs clés de l’économie comme l’agriculture, le tourisme, le commerce et quelques industries formelles étaient touchés.
D’autre part, lorsque l’inondation est concentrée dans les zones urbaines, l’ampleur des dommages et des pertes par rapport aux prévisions des agrégats macroéconomiques du pays pour l’année en cours semblent être minimes, aussi bien sur le PIB, sur les finances publiques, que sur la balance des paiements. Le choc macroéconomique causé par les inondations urbaines est de faible ampleur (fort heureusement, mais laissant quelquefois entendre son relative manque d’importance), comparé à l’impact de la hausse des prix du pétrole ou l’impact de la crise alimentaire et financière1.
Cependant, après l’inondation, la population affectée vit dans de conditions précaires, et certains ménages vivant dans ces zones affectées ont perdu presque tous leurs biens en très peu de temps. A titre d’illustration, à Bangui - République Centrafricaine, la baisse du PIB réel de 2009 suite aux impacts de l’inondation n’a été que de 0.01%, mais 14,500 personnes ont été sans-abri et démunis. Au Sénégal, le PIB de l’année en cours a été réduit de 0.07%, alors que 360,000 personnes ont été touchées à Dakar et ses zones périphériques.
De même, même si les recettes dans les municipalités des agglomérations de Dakar ont diminué significativement de 2.2 milliards de FCFA, les inondations de 2009 n’ont pas changé la situation fiscale du gouvernement central, et le déficit commercial s’est creusé seulement de 0.4 milliards de FCFA.
Tableau 1- Résumé des principaux dommages et des partes causées par l’inondation et leurs impacts sur le PIB
Nous pouvons nous demander ce que signifierait une perte de -0.01% ou de 0.07% par rapport au PIB de l’année en cours, car finalement, l’économie du pays n’a pas trop souffert, mais l’économie locale en souffre profondément. C’est parce que la majorité de la population affectée vit d’activités informelles (petits commerces, petits métiers du quartier, boulangers, cordonniers, …), et se trouve localisée dans les zones les plus pauvres de la ville (dans les départements de Pikine et Guedaway - Dakar, Sénégal par exemple). Cette partie de la population est si pauvre que sa contribution à l’économie nationale est très marginale. Déjà vulnérables en temps normal, leur degré de vulnérabilité augmente avec l’impact de l’inondation. Ils sont démunis de tout leur biens, leurs maisons sont détruites, leur récoltes, bref, une bonne partie de leurs avoirs.
Actuellement au Benin, l’inondation actuelle a affecté 680,000 personnes. Même si nous reconstruisions leur vie, nous ne reconstruirions pas leur pauvreté.
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1Au Sénégal, l’impact combiné de la hausse du prix du pétrole a été évalué à une baisse de 3.6% du PIB de l’année en cours en 2009.
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