Un pays peut-il transformer sa dette en opportunité ? Avec la bonne approche, c’est possible
Si elle est gérée efficacement, la dette peut devenir un puissant outil de développement. En Côte d'Ivoire, l'exemple récent de conversion de dette au profit de programmes de développement offre de précieux enseignements à d’autres pays envisageant des stratégies similaires.
Comment fonctionne cet échange de dette ?
Une garantie fondée sur les politiques fournie par la Banque mondiale a permis à la Côte d’Ivoire d’obtenir un nouveau prêt commercial à un taux d’intérêt nettement inférieur. Le produit de la vente a été utilisé pour racheter jusqu’à 400 millions d’euros d’anciens prêts coûteux arrivant à échéance dans les années à venir. Cet échange d’une dette existante contre une nouvelle dette, couramment appelé « swap », a permis de libérer 330 millions d’euros sur les cinq prochaines années, soit une économie de 60 millions d’euros en valeur actuelle.
Le gouvernement ivoirien s’est engagé à consacrer la majeure partie de ces économies à la construction de 30 collèges, qui accueilleront environ 30 000 élèves, dont la moitié sont des filles. Les progrès seront suivis dans le cadre d’une opération en cours de Programme pour les résultats (PforR) de la Banque mondiale.
De la théorie à l’impact
Cette opération représentait la première application concrète du cadre de conversion de dette au profit de programmes de développement de la Banque mondiale et du FMI, lancé l’année dernière. Le cadre propose une approche plus transparente, plus efficace et dirigée par les pays en matière de conversion de dettes. Cette nouvelle approche peut contribuer à améliorer le profil coût/risque du portefeuille de dettes tout en soutenant des projets de développement à fort impact.
Quatre facteurs clés ont fait la différence :
1. Engagement en faveur de la stabilité macroéconomique : la Côte d’Ivoire a accompli d’importants progrès en matière de discipline budgétaire. Alors que le déficit avait atteint 6,8 % du PIB en 2022, le gouvernement s’est engagé à le ramener à 3 % d’ici 2025, objectif fixé par l’Union économique et monétaire ouest-africaine, avec l’appui d’un programme du FMI. Les progrès ont été constants :
- Le déficit budgétaire est estimé à 4 % du PIB en 2024, entraîné par une meilleure collecte des recettes et une baisse des dépenses.
- L’amélioration de la politique fiscale et des mesures administratives a stimulé la collecte des recettes, qui ont enregistré une progression de 1,6 point de pourcentage pour atteindre 16,3 % du PIB.
2. Risque d’endettement modéré et bonne gestion de la dette : la Côte d’Ivoire n’était pas confrontée à des problèmes de solvabilité mais à des pressions sur les liquidités à moyen terme. Le gouvernement a conclu un important rachat de dette début 2024, en utilisant 1,9 milliard de dollars provenant d’une nouvelle vente d’euro-obligations pour rembourser partiellement d’anciennes dettes d’euro-obligations et 16 prêts commerciaux. Cette conversion de dette soutenue par une garantie fondée sur les politiques a contribué à renforcer la viabilité de la dette en réduisant les paiements de la dette en 2025 jusqu’à 1 % des revenus, libérant ainsi un espace budgétaire crucial.
3. Engagement fort en faveur du développement : le gouvernement a décidé d’investir les économies réalisées dans l’éducation, une priorité essentielle pour le pays. Avec un indice de capital humain de 0,38, le pays figure parmi les moins bien classés au niveau mondial. De plus, une augmentation annuelle de 2,4 % du nombre d’étudiants exerce une pression croissante sur le système éducatif.
Le gouvernement a tiré parti des économies réalisées au titre du service de la dette en relevant l’objectif d’un PforR en cours de la Banque mondiale, visant à construire au moins 45 écoles d’ici 2030.
4. Dialogue solide et relation de confiance : Le vaste portefeuille de la Banque mondiale en Côte d’Ivoire, qui s’élève à plus de 6 milliards de dollars tous secteurs confondus, a facilité un dialogue ouvert et l’utilisation du pouvoir de mobilisation et des instruments financiers de l’institution.
Quelle est la prochaine étape ?
Alors que d’autres pays explorent la conversion de dette au profit de programmes de développement, le succès dépendra des conditions favorables et de l’apprentissage continu. L’expérience de la Côte d’Ivoire montre que lorsqu’ils sont bien gérés, ces échanges de dette peuvent libérer des fonds et financer de véritables progrès en matière de développement.
Pour en savoir plus sur la façon dont cet échange de dette contribue à financer l’éducation : banquemondiale.org/fund-education
Prenez part au débat