Les universités sont des jardins où fleurit le savoir. C’est ce qu’affirme Hatem Elaydi, chez qui les nombreuses années d’enseignement n’ont pas terni la fascination pour le développement et la transformation dont il est, quotidiennement, le témoin et l’un des acteurs. La gratification est perpétuelle : « Vous voyez vos étudiants remporter des prix, obtenir leur diplôme de fin d’étude ou trouver un emploi intéressant, explique-t-il, et où que vous alliez, vous rencontrez toujours des étudiants actuels ou anciens, leurs parents ou leurs proches, qui vous remercient pour votre aide. »
Alors qu’au départ, il n’était pas sûr d’être fait pour l’enseignement, Hatem Elaydi va finalement y consacrer sa vie. Au cours de la dernière décennie, il s’est encore plus largement investi en assumant une fonction stratégique dans l’évaluation des performances générales de son établissement. Pourquoi ? Parce que le rôle de l’Université islamique de Gaza va au delà que le simple fait de décerner des diplômes à des étudiants. Temples du savoir et de l’innovation, les universités sont des moteurs vitaux de la croissance économique. Elles sont aussi une composante essentielle du tissu social. L’Université islamique de Gaza est une institution constitutive de l’État palestinien naissant, ce qui, aux yeux de Hatem Elaydi, lui confère des responsabilités très spécifiques. Son fonctionnement doit tenir compte des attentes que placent les citoyens dans les institutions publiques : répondre aux besoins de la population et proposer les services voulus de manière efficace et efficiente.
À la tête du service chargé de l’assurance-qualité de l’administration à l’Université islamique de Gaza, Hatem Elaydi a été intrigué par une proposition du Programme de la Banque mondiale sur l’enseignement supérieur dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). La Banque mondiale soutient en effet activement un programme visant à moderniser les universités de la région MENA. Après que les pays de la région ont exprimé leur besoin de disposer de méthodes d’évaluation des stratégies de réforme nécessaires, une équipe de la Banque mondiale au Centre de Marseille pour l’intégration en Méditerranée a élaboré un système d’évaluation de la gouvernance des universités. Cette initiative a trouvé une résonnance toute particulière chez Hatem Elaydi : « La bonne gouvernance de l’université est au cœur de chacun des aspects de la vie universitaire, observe-t-il. Elle concerne absolument tout et tout le monde, depuis le conseil d’administration jusqu’aux étudiants et au personnel en passant par la population locale. »
Cette « grille de positionnement » de la gouvernance des universités n’est pas tant un outil visant à donner une note qu’un miroir reflétant une image exacte de l’établissement. Les universités sont des organisations complexes qui doivent sans cesse s’adapter à un environnement en évolution pour offrir aux populations qu’elles desservent les compétences et savoirs adéquats. Le processus d’évaluation approfondie que propose la nouvelle grille aide les établissements à définir leurs caractéristiques principales, ce qui constitue une étape importante pour juger de la pertinence de leurs structures et pratiques actuelles, et pour déterminer quels éléments doivent être mis à niveau. Chaque établissement est unique, mais tous ont besoin d’avoir une mission bien comprise et clairement définie, ainsi que de disposer des politiques, des ressources et du personnel adéquats pour la mener à bien. La mise en place et le maintien d’une telle cohérence est un véritable défi pour la gouvernance. Du fait qu’elle dresse un tableau détaillé de l’établissement et de la manière dont ses différentes composantes interagissent, cette grille d’évaluation constitue un outil puissant. Elle permet une analyse de l’établissement dans son ensemble et la création de points de référence individualisés, à l’aune desquels on pourra évaluer les performances et sur lesquels fonder les politiques à venir.
Hatem Elaydi salue l’occasion qui lui est offerte d’être parmi les premiers à prendre part à cet exercice. L’Université islamique de Gaza s’efforce d’adopter des normes de gestion modernes, mais les progrès sont lents.
« Nous avançons tout doucement vers la clarification de notre mission et la mise en place d’une meilleure planification stratégique, et il nous faut vraiment nous concentrer sur l’évaluation des progrès accomplis ici », explique-t-il.
Des avancées significatives ont été réalisées vers l’instauration d’une forme de gouvernance plus inclusive. Des conseils consultatifs ont été établis au niveau de plusieurs unités d’enseignement de l’université, auxquels siègent des personnalités locales, des étudiants et des membres du corps enseignant. Des propositions visant à renforcer encore la participation des étudiants et à élargir les opportunités de participation du personnel de l’université sont à l’étude. De son côté, la réforme du conseil d’administration de l’université progresse moins vite. La reddition de comptes est encore insuffisante, et les pouvoirs de cette instance n’ont pas été clairement délimités. Dans le sillage du Printemps arabe, lors duquel les citoyens ont exigé de leur gouvernement qu’il soit plus à l’écoute et rende davantage de comptes, la relation entre le conseil d’administration, d’un côté, et les étudiants, le personnel et le corps enseignant de l’université, de l’autre, fait l’objet d’une attention toute particulière. C’est un sujet complexe et délicat, mais le processus d’évaluation leur a permis de poser des jalons, fondés sur des normes internationales, que l’établissement s’est engagé à respecter. Il a permis de dégager un consensus indispensable sur ce qu’il est nécessaire d’atteindre et constitue en même temps un moyen objectif de mesurer les avancées vers ces objectifs.
En encourageant les universités à se regarder dans le miroir et à comparer leurs pratiques aux normes internationales et à leurs propres objectifs, la grille de positionnement de la gouvernance des universités pourrait catalyser de nouvelles réformes régionales. Elle permet de mettre en regard l’ensemble des établissements et de définir des valeurs de référence pour des sujets cruciaux, de la gestion des établissements à l’autonomie universitaire. Et surtout, elle permet de définir la voie qui permettra d’accéder à une meilleure gouvernance. Après avoir contribué, une décennie durant, à élaborer des stratégies pour le système d’enseignement supérieur palestinien, Hatem Elaydi est convaincu que la bonne gouvernance est un ingrédient essentiel si l’on veut aboutir à une université bien gérée à même de doter les étudiants des compétences dont ils ont besoin pour pouvoir prétendre aux emplois de demain, et de constituer le terreau fertile du savoir et de l’innovation, qui tireront la croissance.
« Je pense que c’est un outil formidable, souligne Hatem Elaydi. Il sera d’une utilité considérable pour tous les établissements participants et devrait influencer les autorités et ministères de l’enseignement supérieur dans toute la région. »
Pour en savoir plus : Des universités prêtes à s’auto-évaluer
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