Pendant un instant, prenez le temps de visualiser une goutte d’eau tombant dans un ruisseau. Emportée par le flot, elle rejoint la nappe phréatique et sera absorbée par les racines d’un arbre, qui alimente un écosystème plus vaste. De là, avec l’évaporation, notre goutte retombe en pluie sur un champ de pommes de terre fraîchement retourné. À la deuxième itération du cycle, elle s’écoule du robinet d’une famille, raccordée à l’eau courante pour la première fois de sa vie, ce qui permet à une jeune fille de se doucher avant d’aller à l’école au lieu d’aller chercher de l’eau au puits le plus proche, à une bonne heure de marche. Dans un troisième temps, la fameuse goutte est dépolluée dans les tuyaux d’une station d’épuration, avant de ressortir d’un barrage hydroélectrique, procurant ainsi de l’énergie à une usine textile qui emploie 200 personnes dans le pays voisin. L’eau irrigue tous les aspects du développement et, à ce titre, stimule la croissance économique, contribue à la santé des écosystèmes et joue un rôle clé et fondamental pour la vie elle-même.
Mais les changements climatiques se manifestent surtout par l’eau. Neuf catastrophes naturelles sur dix sont liées à l’eau, et ces risques se répercutent sur les systèmes alimentaires, énergétiques, urbains et environnementaux. Pour atteindre les objectifs fixés en matière de lutte contre le changement climatique et de développement, et reconstruire en mieux, il est indispensable de placer l’eau au cœur de toute stratégie d’adaptation.
La Banque mondiale est la principale source multilatérale de financements pour le secteur de l’eau dans les pays en développement. Elle travaille en étroite concertation avec des partenaires pour renforcer la sécurité hydrique dans le monde pour tous, en s’attachant à des enjeux connexes comme l’approvisionnement en eau (a), l’assainissement, la gestion des ressources hydriques (a) et l’utilisation de l’eau dans l’agriculture (a).
L’accès à des installations d’eau et d’assainissement gérées de manière sûre a une incidence directe sur la santé et le bien-être d’une communauté, avec des répercussions sur les performances éducatives et la productivité en matière d’emploi et, par conséquent, sur la réduction de la pauvreté. Par ailleurs, une gestion adaptée des ressources en eau peut avoir des effets positifs importants sur la production agricole, la santé environnementale et la production d’énergie. Compte tenu de ces liens réciproques, une approche plurisectorielle des solutions à apporter, notamment dans la perspective de la pandémie de COVID-19 et du changement climatique, paraît toujours plus pertinente.
Les relations indissociables entre l’eau, l’énergie et l’alimentation montrent à quel point il peut être fructueux de sortir des approches centrées sur un secteur unique pour surmonter plus efficacement chacun de ces défis particuliers. C’est particulièrement évident dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA). Selon un rapport (a) sur ces questions, plus de 60 % des habitants des pays de la région MENA sont exposés à un stress hydrique et 85 % des prélèvements d’eau sont consacrés à l’agriculture. Dans certains pays, les pénuries croissantes d’eau pourraient entraîner des pertes de production agricole supérieures à 60 %. Comme le montre un autre rapport récent (a), la raréfaction de l’eau dans les pays du Machreq pourrait réduire la demande de main-d’œuvre jusqu’à 12 % et induire de profonds changements dans l’utilisation des terres avec, notamment, la disparition de services hydrologiques bénéfiques. Au Maroc, le projet de modernisation de l’irrigation à grande échelle met en évidence l’efficacité de solutions intersectorielles pour remédier à ces problèmes. En incitant à l’adoption de systèmes de goutte-à-goutte dans plusieurs gouvernorats du pays, le projet a permis d’économiser de l’eau et de l’énergie tout en renforçant la productivité agricole.
Avec la survenue de la pandémie de COVID-19, le lien entre la santé et l’accès à l’eau et à l’assainissement est devenu encore plus étroit. Dans les pays en situation de fragilité, de conflit et de violence, des approches intégrées couvrant la question de l’eau paraissent encore plus pertinentes pour jeter les bases de la reprise. Au Yémen, le projet d’urgence à l’appui de services sanitaires et nutritionnels (EHNP) et la phase I du projet d’urgence pour des services urbains intégrés (IUSEP-I) (a) prouvent clairement comment une approche coordonnée et multisectorielle pour la fourniture de services urbains et ruraux peut donner de meilleurs résultats que des interventions déconnectées les unes des autres. En octobre 2020, le projet EHNP avait permis à 4,82 millions de personnes d’accéder à des services améliorés d’alimentation en eau et d’assainissement tandis que 5,72 millions d’habitants avaient reçu des kits d’hygiène courants dans les zones touchées par le choléra. Face à la pandémie, la composante d’intervention d’urgence conditionnelle (CERC) a été actionnée en octobre 2020 pour approvisionner en carburant 33 infrastructures d’eau et d’assainissement dans 14 gouvernorats et assurer la distribution de fournitures et de produits non alimentaires en lien avec l’accès à l’eau potable, l’hygiène et l’assainissement (WASH), le transport d’eau par camions citernes et la construction de latrines dans les camps de déplacés, les communautés d’accueil et les régions touchées par des pénuries d’eau. En juin 2021, grâce au projet IUSEP-1, 1,2 million de personnes avaient accès à de l’eau potable et à l’assainissement, plus d’un million de tonnes de déchets accumulés avaient été évacués et les services urbains essentiels avaient été rétablis pour 3,05 millions de bénéficiaires. En améliorant l’accès à l’eau, à l’assainissement et le lavage des mains, ces deux projets ont amélioré l’état de préparation des Yéménites face à la transmission du choléra et du coronavirus.
L’eau irrigue les secteurs économiques au même titre que les territoires. Sur une planète où 60 % des flux d’eau douce sont transfrontaliers, la coopération est l’une des clés du renforcement de la stabilité et de la résilience au changement climatique. À cet égard, l’Initiative régionale pour l’eau au Machreq pose lentement mais sûrement les jalons d’une coopération accrue autour des enjeux hydriques de la région, en renforçant la coopération technique (a), en constituant des partenariats et en élaborant des recommandations basées sur des données probantes (a). Cette dynamique ouvrira des perspectives de gestion coopérative des ressources hydriques partagées dans le but d’optimiser le commerce, l’intégration régionale et la croissance économique.
En œuvrant pour la protection des ressources en eau, la fourniture de services et le renforcement de la résilience, la Banque mondiale aide ses clients à créer un monde où, grâce à des solutions intégrées et innovantes qui placent l’eau au centre des préoccupations, la sécurité hydrique sera garantie à tous. Pour reconstruire en mieux et relever les défis du changement climatique, nous devons monter en puissance et mettre l’eau au centre des enjeux.
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