Publié sur Voix Arabes

Chômage : l’effet Méditerranée

ImageLe Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA) souffrent d’un niveau de chômage élevé, on le sait. Ce que l’on sait moins, c’est que tous les pays du pourtour méditerranéen sont dans cette situation. D’après les dernières données des Indicateurs du développement dans le monde, les pays riverains de la Méditerranée affichent un taux de chômage moyen de 12,5 %...


Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA) souffrent d’un niveau de chômage élevé, on le sait. Ce que l’on sait moins, c’est que tous les pays du pourtour méditerranéen sont dans cette situation. D’après les dernières données des Indicateurs du développement dans le monde, les pays riverains de la Méditerranée affichent un taux de chômage moyen de 12,5 %, avec un niveau de 13,5 % pour les pays méditerranéens d’Europe (11 % pour l’Espagne, la France, l’Italie et la Grèce) et de 10,5 % pour ceux de la région MENA. Le chômage des jeunes est tout aussi important, puisqu’il s’établit en moyenne à 26 % dans les pays méditerranéens (28 % pour la zone européenne et 24 % pour la zone MENA).

Au sein des pays d’Europe, les écarts sont considérables entre les bons élèves — Slovénie (5,9 %) et Malte (6,9 %) — et les lanternes rouges — Monténégro (30 %), Bosnie (24 %) et Serbie (17 %). Dans le groupe MENA, la fourchette est légèrement plus resserrée, de 8 % en Syrie à 14 % en Tunisie.

En dehors de leur mer intérieure, ces pays partagent le fait d’avoir une monnaie souvent liée à l’euro. Si un taux de change fixe ou semi-fixe permet d’assurer la stabilité des prix, il entraîne aussi un risque de surévaluation involontaire, délétère pour la compétitivité, la croissance et, in fine, les emplois.

Les pays dont les monnaies sont sous-évaluées ont tendance à avoir une croissance alerte et à créer des emplois, au contraire des pays aux monnaies sous-évaluées, où la croissance et les perspectives d’emploi sont moroses.Intuitivement, la sous-évaluation renforce donc la compétitivité et la production de biens marchands. De plus, elle accroît l’intérêt pour les marchés étrangers, ce qui incite les entreprises locales à se lancer à l’exportation, à concevoir de nouvelles lignes de produits et à trouver de nouveaux débouchés. Ces « esprits animaux » et les innovations qui vont avec sont essentiels pour la croissance et multiplient les emplois de meilleure qualité.

La plupart des appels à une sortie de la Grèce de la zone euro renvoient à ces considérations. Le rééquilibrage d’une économie sur la base d’un taux de change fixe est en effet une opération douloureuse, qui peut provoquer une longue période de chômage et de croissance faible dans le même temps où s’opère le lent processus d’ajustement des salaires et des prix nécessité par ce rééquilibrage. Austan Goolsbee, Paul Krugman et Sebastian Mallaby, parmi d’autres, ont récemment estimé que l’option de sortie serait sans doute la meilleure solution pour Athènes, afin d’éviter une décennie d’ajustements extrêmement douloureux. Même si les autres pays méditerranéens ne se trouvent pas dans la même impasse que la Grèce, les effets de la surévaluation de la monnaie y suscitent les mêmes inquiétudes.

Alors que les pays de la Méditerranée sont dans la nasse, l’Allemagne affiche en revanche un enviable taux de chômage de 6,8 % - le plus faible depuis 1991. Contrairement aux pays méditerranéens, l’Allemagne a su tirer parti, à travers la zone euro, d’une monnaie relativement faible par rapport à son économie. Ses exportations ont bondi, franchissant la barre des 10 % en 2010 et en 2011. Cette croissance tirée par les exportations a créé de nouveaux emplois. Depuis juin 2009 et à l’exception d’un seul accident, le chômage a reculé tous les mois.

Pour les pays de la région MENA, le défi le plus redoutable est de parvenir à créer des emplois. À cet égard, le rôle crucial du secteur privé en tant que moteur de la croissance est bien établi. Mais encore faut-il que le taux de change n’agisse pas comme un frein : pour stimuler l’investissement, la croissance et l’emploi dans le secteur des exportations, les pays doivent en effet pouvoir faire en sorte que les prix de leurs produits restent compétitifs sur les marchés mondiaux.


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