Je me suis rendue récemment sur l’un des sites communautaires où la Banque mondiale déploie son programme de filets sociaux afin d’observer les progrès réalisés depuis ma première visite en novembre 2012. Pour la première séance de groupe, je me suis retrouvée aux côtés d’une quinzaine de femmes enceintes – c’était la première grossesse pour nombre d’entre elles – afin d’écouter l’animatrice leur parler de l’importance du repos, d’une alimentation saine et de l’allaitement maternel.
Lors de la seconde séance de groupe, destinée aux mères d’enfants de 0 à 24 mois, j’ai été accueillie par les visages souriants et malicieux d’enfants qui jouaient pendant que leurs mères écoutaient une animatrice parler de sujets allant de l’hygiène et de l’alimentation aux bienfaits des moustiquaires et de la stimulation des enfants par le jeu. En résumé, tous les comportements sains qui rendent les mères et les enfants en bonne santé.
Ce programme a d’abord été mis en œuvre dans certains districts de Djibouti comme un projet pilote financé par un don du Fonds japonais pour le développement social (JSDF) en 2010 et administré par la Banque mondiale. Il a instauré un système visant à éviter que des couches vulnérables de la population ne sombrent encore davantage dans le cycle de la pauvreté. Fort de résultats positifs et de la preuve que les comportements avaient rapidement changé, l’échelle du projet pilote a été augmentée par un autre projet couvrant un plus grand nombre de bénéficiaires, financé cette fois-ci par l’Association internationale de développement (IDA) de la Banque mondiale dans les districts de Balballa, d’Obock et de Dikhil. Ceci est un excellent exemple du rôle important que joue le JSDF dans l’engagement de la Banque à Djibouti.
Ce programme visait à remédier aux conséquences de la grave sécheresse qui avait affecté la région en 2007/2008 et de la crise financière mondiale. La Banque a mobilisé d’importants moyens de financement par le biais du mécanisme de l’IDA dédié à la riposte aux crises (CRW) afin d’accompagner les efforts entrepris par les autorités de Djibouti pour stimuler la croissance économique grâce à des investissements dans l’infrastructure, le développement rural et le capital humain. Le renforcement des filets sociaux s’inscrivait dans ce cadre. .
Le programme de filets sociaux de Djibouti se démarque des autres programmes plus traditionnels de par le fait qu’il intègre les interventions axées sur la nutrition dans un programme « argent contre travail ». Il vise à mettre l’effet d’un revenu supplémentaire pour les ménages au service des enfants et de leur nutrition. Ce programme cible donc les foyers pauvres et vulnérables comptant des femmes enceintes et des enfants de moins de deux ans.
L’approche des « 1 000 premiers jours de vie » repose sur les preuves que la malnutrition débute durant la grossesse et que les dégâts précoces qu’elle cause sont irréversibles une fois que l’enfant atteint 24 mois . Les statistiques mondiales montrent également que lorsque ce sont les femmes qui gèrent le revenu, l’ impact sur la nutrition des enfants et la sécurité alimentaire du ménage est plus important que lorsque ce sont les hommes qui le gèrent. L’information sur les changements de comportement durant les séances de groupe mensuelles et les visites à domicile individuelles vise à promouvoir un comportement favorisant une meilleure situation sanitaire.
Ce projet est géré par l’Agence djiboutienne de développement social, sous la tutelle du Secrétariat d’État chargé de la Solidarité nationale, en étroite coordination avec le ministère de la Santé. Il est mis en œuvre au niveau communautaire par des organisations locales. Les interventions ont débuté en septembre 2012 et ont depuis été étendues géographiquement. En juin 2014, au moins 5 400 personnes avaient bénéficié des services de nutrition, et plus de 4 440 personnes avaient pris part aux interventions « argent contre travail ».
Plusieurs études ont été menées pour évaluer les changements de comportement. Nous avons ainsi constaté que plus de 60 % des femmes enceintes/allaitantes qui participent au programme ont une alimentation plus diversifiée ou mangent au moins quatre catégories d’aliments, contre environ 20 % en 2011. De même, la proportion de femmes qui nourrissent leur bébé exclusivement au sein pendant les six premiers mois ressort à 35 %, contre 9 % deux ans plus tôt. Ces résultats ne peuvent certes pas être attribués uniquement à ce programme, et nous réalisons actuellement une évaluation d’impact afin d’estimer la valeur ajoutée qu’apporte l’intégration de la nutrition à un programme « argent contre travail ». Les conclusions seront disponibles en début de l’année prochaine.
Ce programme a produit de solides résultats sur le terrain, contribuant à changer les comportements de manière durable. Je me réjouis de continuer à travailler avec les autorités djiboutiennes et les populations locales dans son renforcement à plus grande échelle. Ce projet porte des promesses énormes pour les plus vulnérables et ceux qui présentent le plus grand risque d’être touchés par la malnutrition à Djibouti. Nous sommes sur la bonne voie !
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