Publié sur Voix Arabes

Du Printemps à la Renaissance : le repositionnement des villes arabes

ImageLa région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), qui connaît la croissance démographique la plus rapide au monde, est aujourd’hui urbanisée à environ 60 % et devrait voir sa population urbaine multipliée par deux ou trois au cours des 30 prochaines années. Les villes de la région MENA doivent relever de nombreux défis : prolifération des bidonvilles et des quartiers informels, étalement urbain galopant, urbanisation grandissante de la pauvreté, insuffisance des services, dysfonctionnements des marchés foncier et du logement, carences de la politique de la ville et de l’urbanisme et grande vulnérabilité face au changement climatique et aux catastrophes naturelles. Il n’est donc pas surprenant que, l’année dernière, le Printemps arabe et les revendications populaires exigeant « dignité, respect et liberté » aient pris naissance dans les centres urbains de la région, essentiellement sous l’impulsion de la jeunesse, qui doit de surcroît affronter un taux de chômage élevé (deux fois la moyenne mondiale).

Les services et les activités manufacturières représentent jusqu’à 90 % du PIB des centres urbains de la région : en bref, les villes sont le principal moteur de la croissance régionale. Et de ce fait, elles doivent être bien administrées, autonomes et régies selon des principes de gestion durable afin de pouvoir tirer pleinement parti du potentiel local et régional. Il faut revenir sur les approches actuelles, au cas par cas, de l’urbanisme et de la ville, ainsi que de la gestion des rares ressources naturelles de la région, et opter pour des approches du développement local qui soient véritablement transformationnelles.

Les approches transformationnelles feront avancer les principes de la voix et de la responsabilité citoyennes dans la région grâce au renforcement des institutions locales— à l’instar de ce qui s’est produit dans d’autres pays qui ont connu des transitions économiques et politiques, tels que la Turquie, l’Indonésie ou les Philippines —, l’élargissement de l’accès aux services locaux et l’accumulation de capital social. Lorsque l’on privilégie le niveau local, on contribue à remédier à des problèmesde portée immédiate, tout en semant les germes d’un État plus démocratique, inclusif et durable. Du Yémen à la Tunisie, l’élaboration d’un programme d’action local pourrait à terme entraîner des conséquences non négligeables, et favoriser la croissance économique, la création d’emplois et la stabilité.

Les approches transformationnelles vont permettre aux villes et aux métropoles de se développer de manière responsableet de se doter des systèmes de gouvernance les mieux à même de tenir les promesses économiques, sociales et environnementales de l’urbanisation, tout en instaurant des institutions inclusives et responsables à la base.

Si l’on opte pour des approches transformationnelles, les villes seront plus durables, plus vivables, plusproductives et surtout, plus inclusives. Toute la population aura accès aux services locaux et les plus pauvres seront mieux intégrés au tissu social et économique.

Enfin, les approches transformationnelles permettront de combler les disparités régionales et de développer les régions déshéritées, ce qui constitue une préoccupation de premier plan pour les décideurs de la région MENA, comme on l’a observé en Tunisie, au Maroc ou en Égypte.

Du Printemps à la Renaissance, le repositionnement des villes arabes permettra aux pays de mettre en valeur un potentiel incroyable et inexploité, pour le plus grand bénéfice de tous.


Auteurs

Franck Bousquet

Directeur principal, fragilité, conflits et violence (FCV)

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