Pour les 22 millions d’élèves égyptiens, l’heure d’une nouvelle rentrée a sonné. En septembre 2018, le gouvernement a engagé des réformes afin de moderniser les apprentissages, améliorer la maturité scolaire et repenser le système de délivrance de diplômes en fin de secondaire, qui définit l’ensemble de la trajectoire éducative. En cette deuxième rentrée (2019/2020) depuis le lancement du programme, les élèves de deuxième année vont continuer de découvrir un système revu de fond en comble, depuis le cursus aux modalités d’évaluation en passant par la formation des enseignants. Pour les plus âgés, qui entrent dans le secondaire, la nouveauté réside dans les supports d’apprentissage numériques alternatifs censés les préparer aux nouveaux examens, axés sur la réflexion et les compétences analytiques.
Sans douter du caractère prometteur et bénéfique de ces réformes pour les élèves, ce changement de priorité en faveur de l’apprentissage, par opposition à la simple « scolarisation », ne se fera pas sans douleur et exigera des élèves, des enseignants, des parents et de la communauté tout entière d’indispensables ajustements.
Or, en Égypte, la nouvelle rentrée scolaire s’accompagne d’un rappel : la place du pays dans l’indice de capital humain (a), actuellement à 0,49, signifie qu’un enfant né aujourd’hui atteindra un niveau de productivité à l’âge adulte de 49 % par rapport au niveau escompté s’il avait effectué une scolarité complète en bonne santé. Un enfant qui entre dans le système scolaire égyptien à 4 ans aura été scolarisé, à 18 ans, pendant 11,1 années. Mais si l’on intègre le critère de qualité de l’éducation — le niveau moyen d’apprentissage d’un élève égyptien chaque année par rapport à celui d’un élève bénéficiant d’un système éducatif plus performant — le niveau atteint équivaut à 6,3 années de scolarisation seulement. Ce qui montre la médiocrité de l’offre éducative. Pour renforcer son capital humain, un pays doit impérativement privilégier les compétences essentielles pour pouvoir vivre et travailler au quotidien. L’aptitude à comprendre ce qu’on lit est au cœur de la mission éducative, partout dans le monde, et est censée être acquise à l’âge de dix ans. Selon des statistiques récentes, environ la moitié des élèves des pays à revenu faible et intermédiaire (dont l’Égypte) sont incapables à cet âge de lire un texte adapté et sont donc victimes d’une pauvreté de l’apprentissage.
Les piètres performances des élèves pesaient déjà sur le pays bien avant l’élaboration de l’indice de capital humain. Les résultats obtenus par l’Égypte en 2015 lors de l’enquête TIMSS (Tendances dans les études internationales de mathématiques et de sciences) montrent que 47 % seulement des élèves de huitième année obtenaient le niveau minimum de référence en mathématiques, contre une moyenne internationale de 84 %. Dans l’enquête PIRLS de 2016 sur les progrès en matière de lecture, le score moyen des élèves égyptiens de quatrième année ressortait à 330, en dessous du minimum de référence.
Le gouvernement égyptien s’est certes engagé à prendre à bras-le-corps la réforme du système d’éducation, mais les défis à relever sont colossaux. Seule une collaboration avec toutes les parties prenantes permettra aux mesures appliquées de porter leurs fruits. Ces efforts collectifs et un travail acharné seront déterminants pour s’extraire du piège de la pauvreté de l’apprentissage et donner à chaque Égyptien les moyens d’exprimer son potentiel, de mener une vie décente et de contribuer au développement de son pays.
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