Publié sur Voix Arabes

Liban : 389 tonnes de produits chimiques toxiques éliminées lors d'une opération sans précédent

Quatre personnes portent un équipement de la tête aux pieds afin de traiter en toute sécurité les installations à forte teneur en PCB. Quatre personnes portent un équipement de la tête aux pieds afin de traiter en toute sécurité les installations à forte teneur en PCB.
 

Les polluants organiques persistants (POP) sont des substances toxiques composées de divers éléments organiques (c'est-à-dire, à base de carbone). Ils ont des effets nocifs sur l'environnement, mais aussi sur la santé publique, car ils affectent les systèmes immunitaire, respiratoire et reproductif. Parmi les POP figurent des produits chimiques industriels tels que les polychlorobiphényles (PCB), qui servent de fluides d'échange de chaleur dans les transformateurs et condenseurs électriques ou d’additifs dans les peintures, le papier autocopiant et les plastiques, et le dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT), utilisé comme insecticide.

Au Liban, on trouve des PCB principalement dans le secteur de l'énergie électrique. Jusqu'au milieu des années 1990, ils étaient très présents dans les transformateurs et dans les condenseurs des centrales, des postes électriques et des transformateurs de distribution. Conscient de l'importance d'une action en la matière, l'État libanais a signé en 2002 la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, qui a pour objet d'éliminer progressivement la production et l'utilisation de ces substances chimiques.

    PCB Management.

     

    En 2015, le Liban a sollicité le soutien du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) (a), par l'intermédiaire de la Banque mondiale, pour financer un projet visant à éliminer d'une manière non préjudiciable pour l'environnement les transformateurs contaminés aux PCB. D'un montant de 2,5 millions de dollars et étalé sur six ans (de mai 2015 à mars 2021), ce projet a été mis en œuvre en étroite collaboration avec le ministère de l'Environnement libanais, l’entreprise Électricité du Liban et d'autres partenaires locaux.   

    Le ministère de l'Environnement en a assuré la coordination et l'exécution via une unité de gestion de projet chargée de superviser la passation des marchés ainsi que tous les aspects financiers, sociaux et environnementaux en jeu. Cette unité était aussi responsable du suivi et de l'évaluation des activités réalisées dans le cadre du projet.

    Étant donné les risques que présentent les installations à forte teneur en PCB, il a été procédé à un inventaire national des équipements de production d'électricité, puis à l'élimination des appareils, huiles, sols et autres déchets contaminés. Le projet s’est en outre attaché à renforcer les capacités des diverses parties prenantes. 

    Malgré des difficultés de mise en œuvre, le projet est parvenu à assurer l'inspection de 23 044 installations[1] et à identifier les POP cancérigènes. Des échantillons extraits du sol ont été soumis au niveau national à de premières analyses, dont les résultats ont été confirmés par un laboratoire accrédité au niveau international via la technique de la chromatographie en phase gazeuse. Il a aussi été développé une application pour téléphone mobile destinée à la collecte de données et à la prise de photographies des transformateurs inspectés.

    Les transformateurs inspectés ont été catégorisés selon la labellisation suivante :

    • Label vert (transformateurs exempts de PCB) : 10 631 transformateurs ;
    • Label orange (transformateurs contaminés aux PCB) : 1 380 transformateurs ;
    • Label blanc (transformateurs n'ayant pas fait l'objet d'un échantillonnage car ne remplissant pas les critères minimum[2], et par conséquent considérés à faible risque de teneur en PCB) : 9 383 transformateurs.

    PCB label system - green, orange, and white for different pollutants.

    L'inventaire a abouti à l'établissement d'une base de données exhaustive des installations contrôlées, qui regroupe toutes les informations et photographies enregistrées ainsi que les résultats d'analyses. Il a en outre favorisé le développement d'un plan national de classement par priorité des actions à mener à court, moyen et long terme sur une période de dix ans, de manière à respecter les obligations prévues par la Convention de Stockholm.

    Le projet financé par le FEM montre que de modestes initiatives peuvent avoir d'importants effets, en particulier sur le plan environnemental et social. Il a permis d'éliminer un total de 389 tonnes de déchets dangereux en deux séries d’interventions (2016 et 2020). Ces campagnes ont consisté en opérations d'enlèvement, vidange, conditionnement, manutention, transport et traitement, en toute sécurité pour l'environnement, de 282 déchets chargés en PCB extraits de transformateurs hors service et de 606 déchets issus de condenseurs. Ces déchets ont été expédiés en France en vue de leur destruction par une structure accréditée. La cargaison était en tous points conforme à la Convention de Bâle, traité international sur la protection de l'environnement qui régit les mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination.

    Alors que le renforcement des capacités nationales, tant dans le secteur privé que public, revêtait une importance capitale, le projet est parvenu à former plus de 500 techniciens, agents administratifs, membres des corps enseignant ou universitaire, chercheurs et environnementalistes. Il a également donné lieu à l’élaboration d’un projet de décret garantissant la gestion efficace des PCB, dont les dispositions s'alignent sur les priorités définies par la Convention de Stockholm. Enfin, le projet a aussi ouvert la voie à la poursuite des efforts et de l’engagement des autorités libanaises en vue de traiter, plus largement, les problèmes de POP et de déchets dans le pays.

    Si ces mesures sont de considérable portée, il reste du travail à accomplir pour éliminer les PCB (notamment ceux encore contenus dans 1 435 tonnes de transformateurs contaminés), tenir les bases de données à jour et assurer un traitement effectif de tous autres types de déchets dangereux existant dans le secteur énergétique.

     

    LIENS UTILES

    La Banque Mondiale du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord


    [1][1] 22 983 transformateurs, 28 condenseurs et 33 fûts ou conteneurs.  

    [2] Les transformateurs à analyser ont été sélectionnés en fonction de leur date de construction, de leur constructeur ou de leur historique de maintenance, entre autres critères. 


    Auteurs

    Qing Wang

    Spécialiste principal de l'Environnement, Banque mondiale

    Lama Mghames

    Consultante senior en Environnement

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