Publié sur Voix Arabes

Liban : Réduire les risques d’incendie grâce à une gestion plus rigoureuse des forêts

Firefighters work to put out flames in a forest in Lebanon. (Photo: Khaled Taleb) Firefighters work to put out flames in a forest in Lebanon. (Photo: Khaled Taleb)

L’été 2023 a été marqué par un début précoce de la saison des feux de forêt au Liban. De violents incendies ont ravagé plusieurs régions du pays, et les gouvernorats de l’Akkar et du Nord ont été le théâtre de feux quasi quotidiens.

Les organisations gouvernementales et communautaires ont réagi rapidement, unissant leurs forces pour lutter contre les flammes et parvenant souvent à limiter les dégâts et à éviter qu’il y ait des victimes, malgré les difficultés rencontrées. « Nous agissons avec des moyens limités, recueillis auprès d’amis qui partagent notre amour pour cette terre », explique Khaled Taleb, de l’Akkar Trail Association, un groupe communautaire de lutte contre les incendies. « Nous avons protégé des milliers d’hectares à l’aide de deux véhicules équipés de matériel local. Avec davantage de soutien, nous pourrions éviter d’autres tragédies et d’autres pertes. »

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Carte des risques d’incendie de forêt au Liban au 12 août 2023. Une grande partie de la région présente un risque élevé d’incendies de forêt. (Source : Conseil national de la recherche scientifique de la République libanaise)

La législation libanaise comprend des recommandations sur la gestion des forêts privées, mais les propriétaires fonciers ne sont pas tenus par la loi d’entretenir les zones forestières, notamment en les débarrassant des matières végétales mortes inflammables. (Photos : Khaled Taleb)

Khaled Taleb explique qu’il est nécessaire de disposer d’équipements et de ressources humaines pour lutter contre les incendies lorsqu’ils se déclarent. Cependant, ces mesures ne constituent qu’une réponse immédiate aux flammes. En réalité, les feux de forêt sont un problème à long terme au Liban, où chaque année, 1 500 hectares de zones forestières partent en fumée.

Afin de gérer durablement ses paysages forestiers, le Liban doit prendre des mesures rapides et énergiques visant à atténuer les risques d’incendie, qui sont amplifiés par le changement climatique. En effet, des températures plus élevées assèchent la végétation et créent des conditions propices au déclenchement et à la propagation des feux de forêt. Le 4 juillet a été la journée la plus chaude en moyenne sur la planète depuis que les relevés de température existent, et le réchauffement planétaire ne peut à l’évidence plus être considéré comme une préoccupation future. Le Liban doit agir maintenant.

Les 139 000 hectares de forêts (a) que compte le pays fournissent des services écosystémiques directs et indirects aux populations locales et, de fait, à l’ensemble de la nation. Il est difficile de chiffrer ces services, mais selon une étude menée par la Banque mondiale dans le cadre d’un projet d’assistance technique financé par PROGREEN (a), un fonds fiduciaire multidonateurs administré par la Banque, chaque feu de forêt ferait perdre au Liban 296 dollars de valeur économique par hectare (a).   

En réduisant le risque permanent d’incendies, la gestion durable des forêts permet de préserver leur valeur économique considérable. Dans le même temps, elle crée des opportunités économiques pour les communautés les plus vulnérables. Dans un pays comme le Liban, où les arbres couvrent 13 % du territoire (a), les forêts peuvent représenter un risque pour la sécurité ou au contraire une source potentielle de moyens de subsistance durables.

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Les pompiers sont souvent des volontaires issus des communautés locales, qui risquent leur vie pour protéger leurs maisons et leurs moyens de subsistance.

Ces conclusions, entre autres, sont publiées dans un document intitulé Lebanon Forest Note: Reducing Wildfire Risk through Sustainable Forest Management. Cette note présente cinq recommandations concrètes et réalisables permettant de créer des opportunités économiques inclusives tout en réduisant le risque d’incendies de forêt :

  • Améliorer la gouvernance et les capacités locales pour une gestion durable des forêts. Il s’agit notamment de clarifier les rôles et les responsabilités des différents ministères en ce qui concerne la gestion et la coordination des stratégies de gestion des risques d’incendie, de permettre aux communautés de tirer parti de leurs résultats en matière de lutte contre les incendies à plus grande échelle et d’inciter les propriétaires fonciers privés à gérer de manière plus durable les forêts situées sur leurs terres.
  • Améliorer l’accès aux données et aux informations sur les incendies de forêt, éventuellement en élaborant un système commun de gestion intégrée des informations et en menant un programme de sensibilisation.
  • Valoriser les produits du bois (par exemple, en transformant le bois en meubles) et les produits non ligneux (tels que les pignons de pin, le miel et la caroube), ce qui suppose une analyse de faisabilité plus approfondie et, si les premières indications sont positives, le renforcement du cadre juridique et réglementaire pour une récolte et une production durables.
  • Soutenir un tourisme durable basé sur la nature, une industrie non extractive qui peut être mise à profit pour sensibiliser les touristes aux risques d’incendie et promouvoir un comportement responsable. L’amélioration des infrastructures pour l’écotourisme permettrait également aux organisations de lutte contre les incendies d’accéder à des zones reculées.
  • Restaurer les écosystèmes forestiers afin de réduire la fragmentation et les risques d’incendie qu’elle entraîne. Les forêts dégradées et les habitats à la lisière des forêts fragmentées renferment généralement des charges de combustible plus importantes, ce qui augmente la probabilité qu’un feu se déclare dans ces zones.

Certaines de ces recommandations ont déjà été intégrées dans les efforts d’aide au développement, et des signes montrent que ce travail sera poursuivi. Récemment, le Fonds pour l’environnement mondial (GEF) a approuvé un financement de 3,8 millions de dollars pour un projet à venir (a) qui s’appuiera sur une approche communautaire en vue de soutenir le Liban dans la gestion des risques d’incendie de forêt dans les zones vulnérables.

À propos de la note sur les forêts du Liban : Les «  Country Forest Notes » constituent la pièce maîtresse du Plan d’action pour les forêts 2016-2020 du Groupe de la Banque mondiale et de son Plan d’action pour le climat 2020-2025. La note sur les forêts du Liban évalue l’état des forêts libanaises, les pressions exercées sur les paysages forestiers et les axes d’action potentiels. Ce travail a été financé par PROGREEN, un fonds fiduciaire multidonateurs administré par la Banque mondiale.


Auteurs

Andrea Kutter

Spécialiste principale en gestion des ressources naturelles

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