Publié sur Voix Arabes

Tout ce que vous devez savoir sur la réglementation bancaire dans le monde arabe

World Bank | Arne HoelOn ne manque guère de données en matière de réglementation et de contrôle des banques dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA). De fait, depuis un certain nombre d’années, on peut aisément comparer les réglementations en vigueur dans cette région à celles d’autres économies en développement et émergentes, et ce, en grande partie grâce à une initiative de la Banque mondiale.

Conduite pour la première fois en 2001, l’enquête sur la réglementation et le contrôle bancaires (ou BRSS selon sa dénomination en anglais) réunit en effet un ensemble d’informations unique couvrant le monde entier. Il y a eu depuis deux publications actualisées de ces données, en 2003 et en 2007. Enfin, une quatrième série de données (a) (BRSS 2011-12) est disponible depuis le début de l’année 2012, dans le cadre de la première édition du Rapport sur le développement financier dans le monde. C’est sur cette quatrième enquête que repose l’analyse comparative entre la région MENA et d’autres pays émergents et en développement présentée ici. Les résultats ne manqueront pas de vous surprendre, et plutôt agréablement.

Actionnariat des banques. Par comparaison avec d’autres pays émergents et en développement, les pays de la région MENA appliquent, en moyenne, des règles plus strictes sur la propriété. Ainsi, alors que dans les premiers, la proportion moyenne d’actions d’une banque pouvant être détenues par un seul et même propriétaire ressort à 52 %, elle s’établit à 24 % dans les seconds.

Cadre réglementaire. Si 64 % des sondés dans la région MENA indiquent appliquer le dispositif de Bâle II concernant les normes de fonds propres, ce n’est le cas que de 39 % des autres pays émergents et en développement. Toutefois, il n’est pas d’emblée évident que l’adoption de Bâle II bénéficiera aux pays de la région MENA car, comme le souligne le Rapport sur le développement financier dans le monde 2013, un cadre de réglementation applicable et simple, correspondant aux capacités dont dispose l’instance de régulation pour en surveiller l’application, est préférable à un régime complexe qui n’est pas applicable et dépasse les capacités des instances de régulation.

Communication d’informations. Par comparaison avec d’autres pays émergents et en développement, les pays de la région MENA couverts par laBRSS 2011-12 ont adopté des obligations de communication d’information plus exigeantes. Alors que 100 et 92 % des pays de cette région imposent aux banques de rendre publics, respectivement, les actifs hors bilan et le cadre de gestion des risques, ces chiffres s’établissent à 70 et 64 % pour les autres pays émergents et en développement. Ce constat est quelque peu surprenant puisqu’il va à l’encontre de l’idée largement répandue selon laquelle les systèmes financiers de la région MENA seraient plus opaques.

Pouvoirs de contrôle. Les banques centrales des pays de la région MENA disposent, en moyenne, de pouvoirs de contrôle plus limités. Seuls 69 et 79 % des pays de la région MENA ont indiqué avoir le pouvoir de suspendre ou de limoger un administrateur ou un responsable de banque, contre 95 et 93 % pour les autres pays émergents et en développement.

Capitaux. Alors que, selon la BRSS 2011-12, aucun des pays de la région MENA ne prévoit la possibilité d’un décaissement initial ou d’une injection de capitaux ultérieure avec des actifs autres que des liquidités ou des titres publics, 25 % des autres pays émergents et en développement autorisent cette pratique.

Entrée d’entités étrangères et taux de refus des demandes de licences déposées par des banques. Quelque 15 % des juridictions de la région MENA interdisent l’entrée d’entités étrangères par le biais d’acquisitions et 23 % par le biais de filiales, contre seulement 2 % pour les autres pays émergents et en développement. Les banques étrangères ne sont pas les seules entités à se voir interdire l’octroi d’une licence dans la région MENA. Les données montrent que de 2005 à 2010, 29 % des 42 demandes de licences bancaires présentées par des entités locales ont été refusées, tandis que les 9 demandes émanant d’entités étrangères ont rencontré un taux de refus de 22 %.

Conclusion. L’enquête BRSS 2011-12 montre que dans l’arbitrage entre stabilité financière et croissance financière associée à des niveaux de risque plus élevés, le cadre de réglementation bancaire de la région MENA semble avoir opté pour la stabilité. Les valeurs rapportées dans la Base de données sur le développement financier dans le monde (a) semblent corroborer les constats de l’enquête BRSS 2011-12, les établissements financiers dans la région MENA affichant en moyenne les indicateurs de solidité financière (z-score) les plus élevés de toutes les régions. C’est peut-être la principale raison pour laquelle la plupart des institutions bancaires et financières de la région ont réussi à échapper à la récente crise financière mondiale. Cependant, cette stratégie a un coût : elle limite l’accès au crédit pour le secteur privé des pays de la région MENA, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME).

Nous consacrerons d’autres billets au secteur financier et bancaire dans la région MENA, ne les manquez pas !

Réglementation et contrôle bancaires dans la région MENA et dans les autres pays émergents et en développement :

Quelques questions saillantes tirées de la BRSS 2011-12

Réglementation et contrôle bancaires dans la région MENA et dans les autres pays émergents et en développement

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Les pays de la région MENA ayant participé à l’enquête BRSS 2011-12 sont les suivants : Autorité palestinienne, Bahreïn, Égypte, Émirats arabes unis, Iraq, Jordanie, Koweït, Liban, Maroc, Oman, Qatar, Syrie, Tunisie et Yémen. Ces pays sont considérés comme des économies émergentes ou en développement, conformément à la définition établie par le FMI en septembre 2011 dans ses Perspectives de l’économie mondiale.

Source : Calculs de l’auteur d’après la BRSS 2011-12. Voir http://go.worldbank.org/WFIEF81AP0.


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