Le lycée des Eucalyptus se trouve à Nice, près de l’aéroport. Il est bordé à l’ouest et au nord par des quartiers ouvriers et à l’est par une zone où les classes moyennes sont plus nombreuses. Les effectifs du lycée sont hétérogènes et les groupes ne se mélangent généralement pas. Alors, quand une relation de travail s’instaure entre Marwan, un réfugié syrien de 12 ans qui vient d’arriver en France et parle très peu le français, et Charlotte, 17 ans et capitaine de l’équipe de tennis des filles, c’est quelque chose d’assez incroyable.
Les deux jeunes gens se retrouvent toutes les semaines pendant une heure (parfois deux), dans le cadre d’un projet de tutorat lancé l’an dernier aux Eucalyptus. Le principe est simple : Charlotte passe du temps avec Marwan pour l’aider avec son français.
D’autres lycéens de 17 ans se sont également portés volontaires pour faire du soutien scolaire à des collégiens. Dix binômes ont été formés au début du projet. Plus les mois avançaient, plus les lycéens étaient nombreux à vouloir les rejoindre. En janvier, plus d’une centaine d’entre eux prenaient part à cette aventure. Cet intérêt a surpris. L’un des participants a par exemple écrit à l’organisateur : « Je n’ai toujours pas reçu d’e-mail m’indiquant quand je pourrai rencontrer mon binôme. Je voulais donc vérifier si vous disposiez de la bonne adresse e-mail. » Au terme de l’année scolaire, certains lycéens avaient consacré plus de 30 heures de tutorat entre les seuls mois de décembre et mai.
Depuis la rentrée de septembre, l’initiative s’est étendue à d’autres établissements scolaires niçois et des environs. « Personne ne s’attendait à ce que ce projet rencontre un tel succès, moi le premier. Aucun d’entre nous n’aurait pu anticiper son potentiel », explique Jacques Desclaux, le professeur de mathématiques qui avait suggéré cette idée comme projet d’établissement. « Ce que nous constatons, pourtant, c’est que cela va bien au-delà d’un simple tutorat. Il ne s’agit pas seulement d’entraide scolaire, il y a clairement d’autres gains en jeu. »
Depuis l’attentat contre Charlie Hebdo en janvier 2015 et la vague d’attaques terroristes qui a suivi, les communautés éducatives, en France et ailleurs dans le monde, se demandent comment elles peuvent agir pour promouvoir un climat propice à la tolérance et la compréhension. Cependant, trouver la stratégie adéquate en milieu scolaire n’a rien d’évident. Il s’agit de savoir ce que l’on peut entreprendre et de chercher ce qui pourrait fonctionner.
« Après ce qui vient de se passer, les étudiants ont clairement voulu faire quelque chose », souligne M. Desclaux.
On sait que le tutorat entre élèves est très enrichissant. Plusieurs études ont démontré (a) que les acquis scolaires s’en trouvaient améliorés. De toute évidence et sans surprise, ces progrès s’expliquent par une plus grande attention du tuteur, la fréquence d’interaction pendant l’heure de tutorat et une plus grande assiduité à la tâche demandée (en comparaison avec un enseignement collectif). Et c’est effectivement ce que l’on observe au lycée des Eucalyptus. Le projet aide les plus jeunes à faire leurs devoirs, apprendre leurs leçons et acquérir une plus grande confiance en soi. Cette initiative contribue même, de ce fait, à prévenir les décrochages et abandons scolaires.
Les éducateurs sont ravis. Ce programme simple, plébiscité par les élèves et la communauté, semble fonctionner. Et il ne coûte rien.
Certes, le projet a rencontré certaines difficultés. Deux collégiens ont capitulé après deux semaines, déçus par l’expérience. « Ils s’attendaient à quelque chose d’extraordinaire, je suppose… Ou à une tutrice plus jolie », plaisante M. Desclaux. Certains enseignants ont manifesté leur désapprobation en arguant que des élèves inexpérimentés n’étaient pas les mieux qualifiés pour donner des cours à leurs pairs. Or, précisément, les lycéens volontaires sont d’abord formés à utiliser les manuels scolaires dans les règles de l’art et à motiver leur binôme. Et on prend le temps d’expliquer aux collégiens les responsabilités qui leur incombent. « Quoi qu’il en soit, ça marche », note le professeur de maths. « Tous les collégiens se sont améliorés. Cela ne veut pas nécessairement dire qu’ils excellent, mais leurs résultats se situent constamment au-dessus de la moyenne. »
Et ce ne sont pas là les seules retombées positives du projet, qui favorise aussi l’acquisition d’autres types de compétences. Les études font référence aux compétences du 21 ème Siècle qui comprennent les compétences civiques (a), à savoir la responsabilité individuelle et sociale, la conscience culturelle, et la responsabilité civique à l’échelle locale et mondiale. Comment la relation de tutorat favorise le développement de ces compétences ? Ce lien n’a pas été encore été clairement établi.
« Nous avons le sentiment que le programme de tutorat met à profit et stimule de nombreuses compétences », explique M. Desclaux. « Les collégiens voient dans leur tuteur un exemple à suivre. Les lycéens, eux, apprennent à être responsables et patients. Le projet renforce les liens intergénérationnels et interculturels entre les élèves. D’une certaine manière, la cohésion sociale et communautaire s’en retrouve accrue. »
Devant l’élargissement de cette initiative à d’autres établissements, son promoteur souhaite mieux cerner les qualités du projet. C’est la raison pour laquelle il a contacté un chercheur de l’université de New York dans le but de trouver des moyens de l’évaluer.
La Banque mondiale a adopté une stratégie pour les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA) qui vise à élargir l’inclusion économique et sociale pour œuvrer à la paix et à la stabilité dans la région. Un tel projet pourrait-il être transposé aux écoles de la région MENA ? L’idée semble prometteuse, notamment dans le contexte de l’ initiative « Éducation au service de la compétitivité » (a), un partenariat qui regroupe la Banque mondiale et la Banque islamique de développement et dont le but est de développer les compétences du XXIe siècle au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
Les deux jeunes gens se retrouvent toutes les semaines pendant une heure (parfois deux), dans le cadre d’un projet de tutorat lancé l’an dernier aux Eucalyptus. Le principe est simple : Charlotte passe du temps avec Marwan pour l’aider avec son français.
D’autres lycéens de 17 ans se sont également portés volontaires pour faire du soutien scolaire à des collégiens. Dix binômes ont été formés au début du projet. Plus les mois avançaient, plus les lycéens étaient nombreux à vouloir les rejoindre. En janvier, plus d’une centaine d’entre eux prenaient part à cette aventure. Cet intérêt a surpris. L’un des participants a par exemple écrit à l’organisateur : « Je n’ai toujours pas reçu d’e-mail m’indiquant quand je pourrai rencontrer mon binôme. Je voulais donc vérifier si vous disposiez de la bonne adresse e-mail. » Au terme de l’année scolaire, certains lycéens avaient consacré plus de 30 heures de tutorat entre les seuls mois de décembre et mai.
Depuis la rentrée de septembre, l’initiative s’est étendue à d’autres établissements scolaires niçois et des environs. « Personne ne s’attendait à ce que ce projet rencontre un tel succès, moi le premier. Aucun d’entre nous n’aurait pu anticiper son potentiel », explique Jacques Desclaux, le professeur de mathématiques qui avait suggéré cette idée comme projet d’établissement. « Ce que nous constatons, pourtant, c’est que cela va bien au-delà d’un simple tutorat. Il ne s’agit pas seulement d’entraide scolaire, il y a clairement d’autres gains en jeu. »
Depuis l’attentat contre Charlie Hebdo en janvier 2015 et la vague d’attaques terroristes qui a suivi, les communautés éducatives, en France et ailleurs dans le monde, se demandent comment elles peuvent agir pour promouvoir un climat propice à la tolérance et la compréhension. Cependant, trouver la stratégie adéquate en milieu scolaire n’a rien d’évident. Il s’agit de savoir ce que l’on peut entreprendre et de chercher ce qui pourrait fonctionner.
« Après ce qui vient de se passer, les étudiants ont clairement voulu faire quelque chose », souligne M. Desclaux.
On sait que le tutorat entre élèves est très enrichissant. Plusieurs études ont démontré (a) que les acquis scolaires s’en trouvaient améliorés. De toute évidence et sans surprise, ces progrès s’expliquent par une plus grande attention du tuteur, la fréquence d’interaction pendant l’heure de tutorat et une plus grande assiduité à la tâche demandée (en comparaison avec un enseignement collectif). Et c’est effectivement ce que l’on observe au lycée des Eucalyptus. Le projet aide les plus jeunes à faire leurs devoirs, apprendre leurs leçons et acquérir une plus grande confiance en soi. Cette initiative contribue même, de ce fait, à prévenir les décrochages et abandons scolaires.
Les éducateurs sont ravis. Ce programme simple, plébiscité par les élèves et la communauté, semble fonctionner. Et il ne coûte rien.
Certes, le projet a rencontré certaines difficultés. Deux collégiens ont capitulé après deux semaines, déçus par l’expérience. « Ils s’attendaient à quelque chose d’extraordinaire, je suppose… Ou à une tutrice plus jolie », plaisante M. Desclaux. Certains enseignants ont manifesté leur désapprobation en arguant que des élèves inexpérimentés n’étaient pas les mieux qualifiés pour donner des cours à leurs pairs. Or, précisément, les lycéens volontaires sont d’abord formés à utiliser les manuels scolaires dans les règles de l’art et à motiver leur binôme. Et on prend le temps d’expliquer aux collégiens les responsabilités qui leur incombent. « Quoi qu’il en soit, ça marche », note le professeur de maths. « Tous les collégiens se sont améliorés. Cela ne veut pas nécessairement dire qu’ils excellent, mais leurs résultats se situent constamment au-dessus de la moyenne. »
Et ce ne sont pas là les seules retombées positives du projet, qui favorise aussi l’acquisition d’autres types de compétences. Les études font référence aux compétences du 21 ème Siècle qui comprennent les compétences civiques (a), à savoir la responsabilité individuelle et sociale, la conscience culturelle, et la responsabilité civique à l’échelle locale et mondiale. Comment la relation de tutorat favorise le développement de ces compétences ? Ce lien n’a pas été encore été clairement établi.
« Nous avons le sentiment que le programme de tutorat met à profit et stimule de nombreuses compétences », explique M. Desclaux. « Les collégiens voient dans leur tuteur un exemple à suivre. Les lycéens, eux, apprennent à être responsables et patients. Le projet renforce les liens intergénérationnels et interculturels entre les élèves. D’une certaine manière, la cohésion sociale et communautaire s’en retrouve accrue. »
Devant l’élargissement de cette initiative à d’autres établissements, son promoteur souhaite mieux cerner les qualités du projet. C’est la raison pour laquelle il a contacté un chercheur de l’université de New York dans le but de trouver des moyens de l’évaluer.
La Banque mondiale a adopté une stratégie pour les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA) qui vise à élargir l’inclusion économique et sociale pour œuvrer à la paix et à la stabilité dans la région. Un tel projet pourrait-il être transposé aux écoles de la région MENA ? L’idée semble prometteuse, notamment dans le contexte de l’ initiative « Éducation au service de la compétitivité » (a), un partenariat qui regroupe la Banque mondiale et la Banque islamique de développement et dont le but est de développer les compétences du XXIe siècle au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
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