
Quelles seraient les conséquences de ces scénarios pour la région ?
Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord forment déjà la région du monde la moins bien dotée en ressources hydriques. La disponibilité des sources d’eau renouvelables n’atteint en général pas les 1 000 m3 par habitant et par an (sauf dans quelques rares pays) et plafonne à 16 m3 par habitant aux Émirats arabes unis (EAU). À titre de comparaison, elle s’établit à environ 3 500 m3 par habitant au Mexique, à 4 500 m3 dans les pays de l’Asie de l’Est et du Pacifique et à 9 000 m3 aux États-Unis. Cependant, la région a déjà accompli de nombreuses avancées pour s’adapter à la rareté des ressources en eau dont elle souffre ; le programme d’agriculture climato-intelligente mis en place au Yémen ou l’adoption des techniques de gestion et de résilience face à la menace de la sécheresse à Djibouti sont autant d’exemples de cette réussite. Cela signifie que ces pays ont les capacités pour s’adapter à un nouvel environnement, seulement à terme, les enjeux sont bien plus importants.
Les précipitations devraient s’amenuiser au fil du temps dans le Maghreb et le Machrek. Cette baisse de la pluviométrie, conjuguée à une plus forte évaporation, ne fera qu’exacerber l’aridité de la région. En partant des conditions actuelles, c’est-à-dire d’une situation de rareté de l’eau et des terres cultivables, une augmentation des températures de 2 °C ou 4 °C aurait pour conséquence d’accentuer encore davantage les pressions exercées sur les ressources hydriques et sur l’agriculture. Avec des précipitations moins abondantes et une hausse du mercure, la période de croissance de certaines cultures devrait se raccourcir. Les rendements agricoles devraient se comprimer de 30 % dans un monde à +2 °C et de 60 % dans un monde à +4 °C. Pour une région déjà tributaire des importations alimentaires, une telle évolution pourrait avoir de lourdes conséquences sur le prix des denrées.
Les zones montagneuses du Maroc, de l’Algérie, du Liban, de la Syrie, de l’Iraq, de l’Iran et de la Turquie apportent une grande contribution à l’approvisionnement en eau de la région, car elles stockent une partie des précipitations sous forme de neige. Compte tenu de la réduction prévue des chutes de neige et des réserves d’eau de neige, la ressource hydrique disponible va aussi s’amoindrir.
Le pire n’est pas inéluctable
Ensemble, nous pouvons agir pour freiner le changement climatique en fixant un prix élevé pour le carbone, en réduisant les subventions aux combustibles fossiles si nocifs, en augmentant les investissements dans l’efficacité énergétique et dans les énergies renouvelables, en encourageant une agriculture climato-intelligente et en bâtissant des villes sobres en carbone et à l’épreuve du climat. La région MENA a d’ores et déjà accompli un travail extraordinaire au fil des années pour faire face au manque d’eau chronique ; il n’existe donc aucune raison de douter de sa capacité à s’adapter aussi au nouvel environnement et, surtout, à jouer un rôle moteur dans la réduction des émissions de carbone.
Nous devons agir maintenant, avant que les étés ne s’allongent et ne deviennent encore plus chauds.