Publié sur Voix Arabes

Le vent qui souffle sur nos têtes peut-il résoudre nos besoins énergétiques ?

World Bank - Arne Hoel: Le vent qui souffle sur nos têtes peut-il résoudre nos besoins énergétiques ?Lorsque j’étais étudiante, je traversais souvent en voiture la ferme éolienne d’Altamont Pass. Pour moi, ces machines étaient l’équivalent californien des moulins à vent que l’on voit aux Pays-Bas : plus pittoresques qu’utiles. J’ignorais alors qu’il s’agissait de la première — et de la plus grande — ferme éolienne des États-Unis et que je finirai un jour par comprendre la valeur et le potentiel de ces engins.

Depuis peu, je travaille sur la construction et l’exploitation de fermes éoliennes au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Il faut plusieurs années avant de trouver le site idéal et rien n’est laissé au hasard : des tours mesurent le vent, sa direction et sa force tout au long de l’année, jour et nuit et en différents points du terrain pour pouvoir apprécier au plus près le potentiel de production d’électricité et les éventuelles variations.

Il faut aussi disposer d’un vaste espace (25 à 50 km de long, au bas mot) soumis à des vents dominants de bonne qualité, capables de produire suffisamment d’énergie pour compenser le coût des nouvelles installations et lignes de transport. Le sol lui-même (la terre et ses propriétés géologiques) doit être suffisamment solide pour accueillir les fondations en béton d’une turbine, qui peuvent avoir des dimensions impressionnantes (jusqu’à 16 mètres de diamètre, 27 mètres de profondeur et 122 mètres de haut). Qui plus est, le relief doit être adapté à la création des routes nécessaires pour acheminer le matériel de construction et les éoliennes proprement dites.

Une fois les turbines montées et opérationnelles, les pales vont changer constamment de direction en fonction de la densité de l’air, de sa vitesse d’écoulement et des conditions météorologiques. Pour simplifier, disons qu’une éolienne est l’exact opposé d’un ventilateur électrique : celui-ci est alimenté par un cordon électrique ; une fois branché, le courant remonte jusqu’aux pales, qui se mettent à tourner et produisent une brise. Avec une éolienne, c’est la « brise » qui fait tourner les pales, lesquelles actionnent la turbine qui va produire de l’électricité pour alimenter les lignes de transport. Tout cela sans émission de CO2. Il s’agit bien d’une « énergie propre ».

Alors, me direz-vous, il n’y a pas d’inconvénients ? Eh bien, outre les bienfaits évidents pour l’environnement, les propriétaires des terrains semblent aussi y gagner : ils ont la possibilité de compléter leur activité professionnelle principale par l’exploitation d’une ferme éolienne. Même si cela les oblige à monopoliser une vaste étendue de terre au départ (l’investissement initial), les empreintes laissées par les turbines sont plutôt minimes. De sorte que les propriétaires peuvent louer cette « empreinte », continuer à élever leur bétail au pied des éoliennes et/ou avoir une exploitation agricole, sachant que l’exploitation de la ferme éolienne leur assurera chaque année un revenu stable. Mais la situation n’est quand même pas totalement idéale : du fait du coût de l’installation des turbines, le bail est souvent conclu sur le long terme, ce qui limite la possibilité de revente, tout le monde ne voulant pas de cette « manne éolienne ». Mais surtout, il y a le problème du bruit émis par les turbines et celui des routes migratoires des oiseaux, que les fermes éoliennes risquent de perturber ; en particulier, l’impact de l’énergie éolienne sur la survie des oiseaux, complexe à démêler, suscite de nombreuses controverses et mérite de s’y atteler dans le détail.

D’où cette réflexion, en guise de conclusion : quiconque veut se faire une idée des inconvénients de cette technique doit tenir compte des conséquences encore plus importantes que produisent d’autres sources d’énergie — le pétrole et le charbon par exemple — sur le vivant en général : oiseaux, animaux, créatures aquatiques, plantes, air, eau et, bien sûr, êtres humains. Les effets délétères de la combustion de matières fossiles sur la qualité de l’air et de leur extraction sur les forêts et, partant, sur les habitats des oiseaux, ne sont que deux exemples parmi de multiples autres.

Au vu de ce constat, il semble difficile de se priver d’une énergie éolienne aux nombreux avantages. Ce qui me ramène à William Kamkwamba, ce jeune garçon du Malawi qui a réussi, malgré la pauvreté et la famine, à fabriquer une éolienne avec des matériaux de récupération et à alimenter, grâce au vent, la maison familiale en électricité. Cette solution simple et à l’impact réduit pourrait faire des émules. En investissant dans l’énergie éolienne, nous nous engageons à suivre son exemple.


Auteurs

Tracy Hart

Spécialiste senior de l’environnement

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