La cérémonie de remise des diplômes est un événement très attendu dans la vie étudiante. Cependant, pour Amir Fakih, fraîchement diplômé de l’université libanaise Notre-Dame-de-Louaizé, ces festivités ont un goût amer. Pour illustrer à quels postes les jeunes Libanais peuvent prétendre une fois leur diplôme en poche, il a décidé de se faire photographier en toge et coiffe, vaquant à des tâches subalternes.
Dans les derniers mois de sa formation, Amir flânait dans les rues de Hamra, un quartier éduqué, laïque et cossu de la capitale libanaise, lorsque lui vint cette idée. Revêtu de sa toge, il a imaginé les perspectives d’emploi qui lui seraient offertes et s’est mis en scène, comme caissier dans une petite épicerie, serveur de café, vendeur de fleurs ambulant… ou mendiant.
Il ne faut voir là aucune marque d’irrespect envers ces professions et ces situations. Amir entend juste montrer qu’elles ne demandent pas d’études poussées. Son objectif était d’attirer l’attention sur la situation des jeunes diplômés au Liban : « On se heurte à un mur, celui de la réalité, et si l’on trouve un emploi, c’est payé le minimum. » Amir a reçu de nombreux soutiens parmi ceux qui s’identifient à son cas. Sa série de photos a rapidement essaimé dans les réseaux sociaux et attiré l’attention des médias locaux. Cependant, et sans surprise aucune si l’on en croit Amir, les autorités de son pays n’ont pas réagi à son geste.
Il espérait susciter le débat en donnant un coup de projecteur sur le chômage des jeunes Libanais, qui, selon l’Organisation internationale du travail (OIT) (a), s’élevait à 34 % en 2010 chez les 15-24 ans. Si des statistiques plus récentes montrent un léger reflux, la proportion de chômeurs reste bien au-delà de la moyenne mondiale de 13 %. D’après le rapport de l’OIT, Towards Decent Work in Lebanon: Issues and Challenges in Light of the Syrian Refugee Crisis (a), l’absence de demande de main-d’œuvre éduquée et qualifiée au Liban, à laquelle s’ajoutent des conditions de travail déplorables, détourne les jeunes du marché du travail local.
Pour Amir, cette situation tient en partie à la méconnaissance des besoins du marché du travail lorsque l’on entre à l’université, ou de ce que l’on peut espérer à la sortie en fonction de la filière choisie. Amir a ressenti l’obligation de suivre des études d’ingénieur, qui, à l’instar d’autres professions telles que la médecine par exemple, sont censées garantir à terme une bonne situation. Au bout d’un an, il changeait de cursus pour étudier les médias, son sujet de prédilection, explique-t-il. Il aurait souhaité disposer de plus d’informations et d’enquêtes sur le marché du travail intérieur afin que les jeunes Libanais désireux de s’inscrire à l’université puissent s’orienter plus facilement.
Récemment diplômée de l’Université américaine du Liban, Bana Bissat déclare avoir eu la chance de trouver un emploi sans difficulté. Toutefois, son métier n’a rien à voir avec ses compétences : licenciée en linguistique, elle travaille aujourd’hui dans les médias sociaux et numériques. Il ne lui a fallu qu’un mois pour trouver ce poste, aidée, peut-être, par l’obtention de son diplôme en automne, une saison où les étudiants sont moins nombreux sur le marché du travail. D’après elle, l’une des difficultés est que les jeunes diplômés sont en décalage avec les attentes du marché du travail. Les étudiants sont pourtant recherchés pour leurs compétences, mais ils ignorent tout bonnement lesquelles sont prisées et comment les mettre en valeur.
Selon Amir, ne pas connaître les bonnes personnes et ne pas bénéficier de relations est également un frein à l’embauche. Cet entregent ( wasta, en arabe) est essentiel au Liban, il détermine votre parcours professionnel mais aussi vos études. Si Amir s’est inscrit dans une université privée, c’est parce qu’il ne disposait pas de contacts utiles pour être admis dans l’université publique de son choix. Entre deux étudiants bardés des mêmes qualifications ou références, c’est la wasta qui décide. Ainsi, en dépit de la gratuité des universités publiques, rien ne garantit que vous y serez accepté. À l’inverse, les études dans le privé sont chères : les quatre ans de formation d’Amir ont coûté 32 000 dollars et, comme souvent au Liban, ce sont les parents qui paient. La cherté des études, avance Amir, contraint les diplômés à se résigner à un emploi peu rémunérateur pour survivre, à choisir un secteur sans rapport avec leur qualification, ou à tenter l’aventure à l’étranger.
Aujourd’hui, de nombreux amis d’Amir, issus de la même promotion, ont des emplois relativement mal rétribués, comme serveur de café, ou postulent à l’étranger. D’après un sondage Gallup de 2010, 37 % des jeunes Libanais sont disposés à émigrer. Amir reconnaît, non sans amertume, avoir envoyé 15 CV à Dubaï. « Je suis prêt à partir », dit-il. Il dit n’avoir aucun ressentiment vis-à-vis de ses connaissances parties travailler dans le Golfe. Il en est venu aujourd’hui à se dire que l’on ne vit qu’une fois. « Moi aussi, je dois penser à mon avenir. »
Un sentiment que partagent nombre de ses amis diplômés. L’un d’eux, qui a étudié le génie mécanique pendant cinq ans, se retrouve aujourd’hui dans l’incapacité de trouver un emploi. Cette situation l’accable d’autant plus qu’il a dû payer ses études. « Nous sommes tous candidats au départ », conclut Amir.
Dans les derniers mois de sa formation, Amir flânait dans les rues de Hamra, un quartier éduqué, laïque et cossu de la capitale libanaise, lorsque lui vint cette idée. Revêtu de sa toge, il a imaginé les perspectives d’emploi qui lui seraient offertes et s’est mis en scène, comme caissier dans une petite épicerie, serveur de café, vendeur de fleurs ambulant… ou mendiant.
Il ne faut voir là aucune marque d’irrespect envers ces professions et ces situations. Amir entend juste montrer qu’elles ne demandent pas d’études poussées. Son objectif était d’attirer l’attention sur la situation des jeunes diplômés au Liban : « On se heurte à un mur, celui de la réalité, et si l’on trouve un emploi, c’est payé le minimum. » Amir a reçu de nombreux soutiens parmi ceux qui s’identifient à son cas. Sa série de photos a rapidement essaimé dans les réseaux sociaux et attiré l’attention des médias locaux. Cependant, et sans surprise aucune si l’on en croit Amir, les autorités de son pays n’ont pas réagi à son geste.
Il espérait susciter le débat en donnant un coup de projecteur sur le chômage des jeunes Libanais, qui, selon l’Organisation internationale du travail (OIT) (a), s’élevait à 34 % en 2010 chez les 15-24 ans. Si des statistiques plus récentes montrent un léger reflux, la proportion de chômeurs reste bien au-delà de la moyenne mondiale de 13 %. D’après le rapport de l’OIT, Towards Decent Work in Lebanon: Issues and Challenges in Light of the Syrian Refugee Crisis (a), l’absence de demande de main-d’œuvre éduquée et qualifiée au Liban, à laquelle s’ajoutent des conditions de travail déplorables, détourne les jeunes du marché du travail local.
Pour Amir, cette situation tient en partie à la méconnaissance des besoins du marché du travail lorsque l’on entre à l’université, ou de ce que l’on peut espérer à la sortie en fonction de la filière choisie. Amir a ressenti l’obligation de suivre des études d’ingénieur, qui, à l’instar d’autres professions telles que la médecine par exemple, sont censées garantir à terme une bonne situation. Au bout d’un an, il changeait de cursus pour étudier les médias, son sujet de prédilection, explique-t-il. Il aurait souhaité disposer de plus d’informations et d’enquêtes sur le marché du travail intérieur afin que les jeunes Libanais désireux de s’inscrire à l’université puissent s’orienter plus facilement.
Récemment diplômée de l’Université américaine du Liban, Bana Bissat déclare avoir eu la chance de trouver un emploi sans difficulté. Toutefois, son métier n’a rien à voir avec ses compétences : licenciée en linguistique, elle travaille aujourd’hui dans les médias sociaux et numériques. Il ne lui a fallu qu’un mois pour trouver ce poste, aidée, peut-être, par l’obtention de son diplôme en automne, une saison où les étudiants sont moins nombreux sur le marché du travail. D’après elle, l’une des difficultés est que les jeunes diplômés sont en décalage avec les attentes du marché du travail. Les étudiants sont pourtant recherchés pour leurs compétences, mais ils ignorent tout bonnement lesquelles sont prisées et comment les mettre en valeur.
Selon Amir, ne pas connaître les bonnes personnes et ne pas bénéficier de relations est également un frein à l’embauche. Cet entregent ( wasta, en arabe) est essentiel au Liban, il détermine votre parcours professionnel mais aussi vos études. Si Amir s’est inscrit dans une université privée, c’est parce qu’il ne disposait pas de contacts utiles pour être admis dans l’université publique de son choix. Entre deux étudiants bardés des mêmes qualifications ou références, c’est la wasta qui décide. Ainsi, en dépit de la gratuité des universités publiques, rien ne garantit que vous y serez accepté. À l’inverse, les études dans le privé sont chères : les quatre ans de formation d’Amir ont coûté 32 000 dollars et, comme souvent au Liban, ce sont les parents qui paient. La cherté des études, avance Amir, contraint les diplômés à se résigner à un emploi peu rémunérateur pour survivre, à choisir un secteur sans rapport avec leur qualification, ou à tenter l’aventure à l’étranger.
Aujourd’hui, de nombreux amis d’Amir, issus de la même promotion, ont des emplois relativement mal rétribués, comme serveur de café, ou postulent à l’étranger. D’après un sondage Gallup de 2010, 37 % des jeunes Libanais sont disposés à émigrer. Amir reconnaît, non sans amertume, avoir envoyé 15 CV à Dubaï. « Je suis prêt à partir », dit-il. Il dit n’avoir aucun ressentiment vis-à-vis de ses connaissances parties travailler dans le Golfe. Il en est venu aujourd’hui à se dire que l’on ne vit qu’une fois. « Moi aussi, je dois penser à mon avenir. »
Un sentiment que partagent nombre de ses amis diplômés. L’un d’eux, qui a étudié le génie mécanique pendant cinq ans, se retrouve aujourd’hui dans l’incapacité de trouver un emploi. Cette situation l’accable d’autant plus qu’il a dû payer ses études. « Nous sommes tous candidats au départ », conclut Amir.
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