Depuis longtemps, le développement est en panne au Yémen, faisant de ce pays l’un des plus pauvres du monde et, depuis plusieurs années, de la région. Jamais le nombre de personnes souffrant de la faim n’a été aussi élevé.
Les difficultés que rencontrent les Yéménites sont innombrables, depuis l’absence de services de base à l’insalubrité des dispositifs d’assainissement en passant par un taux d’analphabétisme élevé, une prise en charge médicale insuffisante et un approvisionnement en eau potable déficient. Tous les rapports statistiques nationaux et internationaux confirment un taux de chômage record.
Aucune couche de la société yéménite n’est épargnée. La situation du pays aura rarement été aussi grave. Les souffrances des populations ont été multipliées par deux. Près de 80 % des Yéménites (27,5 millions de personnes) ont désespérément besoin d’un emploi rémunérateur pour assurer leur survie, beaucoup ayant perdu leur poste dans le secteur privé en raison de la situation qui sévit dans le pays. La plupart des entreprises et des services productifs sont à l’arrêt. Cela fait plusieurs mois que les fonctionnaires ne sont plus payés. À cela s’ajoute l’absence quasi généralisée de services de base sûrs. Fuyant le conflit, 3,2 millions de Yéménites ont cherché refuge dans une autre région du pays et plus d’un million sont partis à l’étranger.
Les organisations humanitaires internationales confirment l’extrême gravité de la situation pour les populations. Selon les organismes de secours de l’ONU, plus de 50 % des Yéménites souffrent de la faim et ont besoin d’une aide alimentaire d’urgence. La malnutrition toucherait 1,5 million d’enfants. Le Programme alimentaire mondial (PAM) estime que la moitié environ des enfants du pays souffrent de retards de croissance, conséquence évidente d’une malnutrition chronique. Plusieurs zones du pays commencent à abriter des foyers épidémiques ou pandémiques. Près de 14 millions de Yéménites, dont 8,3 millions d’enfants, ne bénéficient d’aucune prise en charge médicale. Plus de 1,8 million d’écoliers ont abandonné l’école depuis le début du conflit, le nombre d’enfants non scolarisés atteignant les 3 millions.
Jamais la situation du Yémen sur le plan de l’économie et du développement n’aura été aussi catastrophique : le secteur des services est pratiquement paralysé voire, dans le cas des centrales électriques, totalement à l’arrêt. Pourvoir aux besoins de base est devenu une préoccupation majeure, les individus, les familles et la société tout entière payant au prix fort ce chaos quotidien. Plus grave encore, la fragmentation manifeste du tissu social yéménite : les comportements négatifs et l’inconduite se généralisent, mettant en péril l’avenir du pays et des prochaines générations.
Depuis le déclenchement du Printemps arabe, en 2011, le Yémen traverse des heures très difficiles. La situation politique, économique et sécuritaire est totalement instable. Crises et catastrophes s’ajoutent les unes aux autres, n’épargnant aucun secteur ni aucun groupe de la société.
Malgré tout, malgré un conflit qui s’éternise et déstabilise la société, malgré un blocus qui complique extraordinairement le quotidien, malgré les risques d’épidémie et de pandémie dans certaines régions, malgré les pénuries de denrées alimentaires et de médicaments, malgré la dégradation des services et l’aggravation de la pauvreté, qui s’étend de plus en plus, le Yémen se bat. Pour survivre. Avec détermination et fierté. Les Yéménites souffrent mais ils gardent le sourire.
Tous, quelle que soit leur appartenance sociale, font le pari d’un retour à la vie normale, une fois le conflit et la guerre dévastatrice terminés. Ces souffrances, qui les obligent à opérer des choix difficiles, prendront-elles fin un jour ? Le Yémen peut-il s’en remettre ?
En plus de 40 ans d’aide au pays, le soutien de la Banque mondiale auprès des populations yéménites a été une fois encore déterminant pour financer des secteurs vitaux ou importants. La Banque mondiale vient d’approuver un don de 450 millions de dollars pour deux projets d’urgence, en apportant 250 millions de dollars supplémentaires en faveur du projet d’intervention d’urgence en réponse à la crise, lancé l’an dernier avec une dotation initiale de 50 millions de dollars.
Sandra Bloemenkamp, responsable des opérations de la Banque mondiale pour le Yémen, a confirmé que l’institution allait aider les Yéménites à œuvrer pour un avenir prospère et pacifié. « Avec un large éventail de partenaires internationaux et régionaux, nous sommes en train de préparer la reprise et la reconstruction. Les besoins seront colossaux. En plus des pertes humaines et des déplacements de population tragiques, il va falloir remettre sur pied des infrastructures et une économie à terre », a déclaré Sandra Bloemenkamp.
Le Yémen et les Yéménites parviendront-ils rapidement à rebondir et à reprendre une vie normale ? Ou cela reste-t-il une ambition chimérique ?
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