Aucune fille ne doit être laissée pour compte – L’éducation en Afrique

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Pour la Journée internationale de la femme, souvenons-nous des difficultés auxquelles sont confrontées les filles en matière d’éducation

Que serait la vie avec seulement cinq années d’école ? Pour de nombreuses filles dans le monde, c’est le maximum d’éducation à laquelle les plus chanceuses peuvent s’attendre. Dans toute l’Afrique, 28 millions de filles âgées de 6 à 15 ans ne sont pas scolarisées et nombre d'entre elles ne mettront jamais un pied en classe.

Le 8 mars est la Journée internationale de la femme, et c'est l'occasion de célébrer les énormes progrès réalisés pour garantir l’accès à l’éducation de base aux filles des pays les plus pauvres. Mais c’est aussi pour nous le rappel saisissant que des millions de filles sont laissées pour compte.

Nous vivons dans un monde où de violents extrémistes sont déterminés à détruire la vie des écolières, de leur famille et de leur communauté. Au-delà de l’horreur, nous voyons la pauvreté du quotidien forcer des filles à sacrifier leur droit à l’éducation et leur espoir d’une vie meilleure.

Nous savons que l’éducation des filles a un effet multiplicateur. Les femmes plus éduquées sont généralement en meilleure santé, ont un revenu plus conséquent et moins d’enfants. Elles sont en mesure d’offrir de meilleurs soins et une éducation à leurs enfants, et sortir ainsi leur foyer de la pauvreté.

Pourtant, nous savons aussi que le mariage des enfants et les risques liés aux grossesses précoces continuent de constituer un obstacle majeur pour de nombreuses filles. En Afrique, chaque année de mariage des enfants réduit la probabilité d'achèvement du cycle secondaire de quatre à cinq pourcent. Ainsi, dans un pays d’Afrique typique, une fille mariée à l'âge de 15 ou 16 ans n’a pratiquement aucune chance d’achever le cycle secondaire. Dans certains cas, la peur du viol et du harcèlement empêche également les filles d'aller à l'école.

Lever ces obstacles exige un effort commun

Nos organisations respectives se sont engagées à scolariser tous les enfants pour un véritable apprentissage, et de nombreux progrès ont été réalisés au cours de ces 15 dernières années, en particulier en matière de scolarisation. On peut citer en exemple la politique d’enseignement secondaire universel gratuit de l'Ouganda (une première en Afrique subsaharienne) et le système de subventions forfaitaires au Ghana. Au niveau mondial cependant, tandis que la proportion d’enfants non-scolarisés au niveau du cycle primaire a chuté de 15 % à 9 % depuis 2000, peu de progrès ont été faits depuis 2007.

Aucune organisation ne pourra, seule, lever les obstacles complexes auxquels sont confrontées les filles, surtout en Afrique. Dans notre effort collectif, nous soutenons le travail de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) pour produire les données nécessaires qui permettront de changer la vie des filles sur tout le continent. Ensemble, nous menons une véritable révolution des données pour nous assurer que les pays collectent et utilisent des données plus pertinentes.

L’ISU a mis au point un nouvel outil de données appelé Laissées pour compte, l'éducation des filles en Afrique, qui illustre les avancées réalisées à ce jour, ainsi que les énormes défis qui restent à relever tandis que la communauté internationale œuvre à définir les prochains objectifs mondiaux en matière d’éducation. Quelle est la proportion de filles scolarisées par rapport aux garçons ? Quels pays et régions ont fait les plus grands progrès pour réduire les inégalités entre les sexes dans l’enseignement primaire et le premier cycle du secondaire ? Et quels types de conditions affectent l’apprentissage en classe des filles africaines dans tout le continent ? Voici quelques-unes des questions qui sont traitées dans cet outil interactif, automatiquement mis à jour avec les données disponibles les plus récentes.

Nous savons, par exemple, que la pauvreté est le plus grand obstacle à l’éducation d’une fille. Mais si elle vit en zone rurale, appartient à une minorité ethnique ou se trouve au piège dans une zone de conflit, les difficultés s'en trouvent cumulées. Dans des pays comme le Burkina Faso, le Nigéria et le Sénégal, si une fille n’est pas scolarisée en primaire avant l'âge de 10 ans, elle a peu de chance d’aller un jour à l'école.

Les conditions d’apprentissage doivent être améliorées

Pour les enfants qui sont scolarisés, les mauvaises conditions des salles de classe ont un impact sur l'apprentissage. En moyenne, dans la région, trois élèves doivent se partager un manuel de mathématiques. Seules 23 % des écoles ont accès à l’électricité, et un peu moins de la moitié ont accès à l’eau potable. Dans la moitié des pays africains disposant de données sur le sujet, il y a plus de 50 élèves par enseignant.

En termes d’infrastructure, les écoles sans toilettes ou avec des toilettes mixtes, constituent un risque sanitaire et sécuritaire pour les filles et un obstacle culturel important qui empêche ces dernières de fréquenter ces écoles. Pourtant, d’après les données de l’ISU, une école primaire sur trois en Afrique ne possède pas de toilettes, encore moins des toilettes réservées aux filles.

Fait peut-être plus frappant encore, les données montrent que le manque criant d'enseignants pourrait empirer tandis que de nombreux pays africains luttent pour satisfaire les besoins grandissants en matière d’éducation d'une population d'âge scolaire en pleine croissance. Aujourd'hui, la région doit créer 2,3 millions de nouveaux postes dans l’enseignement et pourvoir 3,9 millions de postes vacants afin d'atteindre un ratio de 40 élèves par enseignant dans chaque classe.

Mais recruter de nouveaux enseignants ne suffit pas. L’Afrique a besoin d’un plus grand nombre d’enseignants qualifiés soutenus et formés pour améliorer leur enseignement. Davantage d’enseignantes sont également nécessaires, car elles incarnent des modèles positifs pour les filles.

Efforçons-nous d'assurer aux filles l'avenir qu'elles méritent

Il n’est pas difficile de prédire ce que l'avenir réserve aux filles qui n'iront jamais à l'école. Elles rejoindront les rangs des 77 millions de jeunes femmes incapables de lire ni d’écrire une seule phrase, encore moins de déchiffrer une ordonnance médicale ou d’aider leurs enfants à faire leurs devoirs. Les jeunes femmes représentent les deux-tiers de la population analphabète. Environ 29 millions vivent dans l’Afrique subsaharienne et sont condamnées à vivre dans la pauvreté. Il est donc crucial de garantir aux filles une éducation de base.

La bonne nouvelle est que ces filles n’ont pas été oubliées. Dans son programme de développement mondial post-2015, la communauté internationale est en train de mettre une dernière touche aux nouveaux objectifs et cibles pour parvenir à l'égalité des sexes, particulièrement en matière d’éducation. Des objectifs sont également envisagés pour lutter contre l’obstacle clé à l'éducation des filles que représente le mariage des enfants.

Des ressources accrues et des programmes ciblés permettront de s'attaquer aux facteurs socioéconomiques spécifiques qui privent les filles de leur droit à l'éducation, mais il faudra davantage que des promesses pour que chaque fille puisse aller à l'école et apprendre. Ensemble, l’UNESCO, la Banque mondiale et le Partenariat mondial pour l’éducation se concentrent sur le développement de l’égalité entre les sexes et l'émancipation des filles et des femmes grâce à une éducation de qualité.

Les données sont la base de toute décision importante en matière de politiques, et les outils tels que celui que nous lançons permettent de visualiser où se situent les plus difficultés les plus importantes et les problèmes qui nécessitent notre attention.


Auteurs

Claudia Costin

Fondatrice, “Innovation and Excellence in Education Policies" (un groupe de réflexion)

Silvia Montoya

Director, UNESCO Institute for Statistics

Karen Mundy

Chief Technical Officer, Global Partnership for Education

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