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Renforcer la résilience climatique grâce à des données plus intelligentes : le rôle des registres sociaux dynamiques

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Renforcer la résilience climatique grâce à des données plus intelligentes : le rôle des registres sociaux dynamiques Une rue inondée dans un quartier fragile de Cotonou, Bénin. Crédit : Olivier Togbe / Banque mondiale.

L’année 2024 a été marquée dans de nombreuses régions du globe par des inondations catastrophiques causées par le changement climatique. Rien qu’en Afrique de l’Ouest et en Afrique du Centre, près de 7 millions de personnes ont été affectées par l’élévation du niveau des eaux, à la suite de pluies torrentielles. Les inondations exacerbent l’insécurité alimentaire, qui devrait toucher 55 millions de personnes cette année. Comme c’est souvent le cas, les plus pauvres sont les plus vulnérables. Face à la fréquence croissante des inondations et des sécheresses, plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique du Centre mettent en place des systèmes de protection sociale climato-intelligents. L’objectif est de renforcer la résilience des populations pauvres et de permettre une réponse rapide en temps de crise.

L’importance de données précises sur les populations vulnérables

Disposer de données fiables sur les ménages vulnérables ou déjà affectés par des chocs climatiques est essentiel à une réponse efficace. Lorsque ces données sont indisponibles ou insuffisantes, certains programmes comme le programme Novissi, déployé au Togo pendant la pandémie, ont recours à d’autres sources, telles que les métadonnées de téléphones portables, l’imagerie satellite ou les enquêtes post-catastrophe. Ces méthodes offrent des avantages à court terme, mais présentent également des limites :

  • Exclusion des plus vulnérables : ceux qui n’ont pas accès à un téléphone mobile risquent d’être laissés pour compte.
  • Déplacements : en temps de crise, les populations peuvent se déplacer, ce qui impacte la fiabilité des données.
  • Difficultés de ciblage précis : les budgets limités exigent une sélection adéquate des bénéficiaires.
  • Risque de retards : Les enquêtes post-catastrophe sont longues et coûteuses, ce qui ralentit l’acheminement de l’aide.

Des données exactes aident les décideurs à mieux comprendre la vulnérabilité climatique et à améliorer la conception des programmes d’aide. La précision des données aide notamment à :

  • Anticiper les besoins : les caractéristiques des logements peuvent indiquer leur vulnérabilité aux catastrophes.
  • Identifier les groupes à risque : les agriculteurs qui dépendent de l’agriculture pluviale sont plus vulnérables aux sécheresses.

Registres sociaux dynamiques : une solution clé

Les registres sociaux dynamiques représentent une innovation cruciale pour une réponse rapide et efficace. Ces bases de données contiennent des informations précises sur les ménages, notamment leur localisation et leurs caractéristiques socioéconomiques.

Cependant, la plupart des registres sociaux couvrent les ménages classés comme pauvres. Pour que ces registres soient efficaces en cas de chocs climatiques, ils doivent inclure l’ensemble des ménages vulnérables à ces types d’événements, qu’ils soient pauvres ou non. En effet, certains ménages peuvent basculer dans la pauvreté s’ils sont touchés par une catastrophe, d’où la nécessité d’élargir la définition de la vulnérabilité et d’investir dans le renforcement de ces registres.

Plusieurs pays de la région commencent à intégrer la vulnérabilité climatique dans leurs registres sociaux :

  • Le Bénin dispose d’un cadre juridique qui reconnaît officiellement la vulnérabilité climatique comme critère d’inclusion dans le registre. Cela permettra d’enregistrer tous les résidents des zones inondables et d’améliorer la coordination entre les acteurs humanitaires et gouvernementaux.
  • Le Sénégal double actuellement la couverture de son registre social pour le porter à 1 million de ménages.
  • La Mauritanie et la Gambie ont entrepris de mettre en place des registres universels couvrant l’ensemble de la population afin d’identifier et d’aider rapidement les ménages touchés.
  • Le Togo a entrepris de mettre en place un registre social qui vise également une couverture universelle.

Un investissement rentable

La mise en place de registres sociaux dynamiques nécessite des investissements importants dans la technologie et la collecte de données à grande échelle. Cependant, une fois établis, leur gestion devient plus rentable grâce à l’enregistrement dynamique et aux mises à jour continues. Ces systèmes améliorent l’efficacité des dépenses sociales en améliorant la coordination des efforts de riposte. En outre, les données recueillies peuvent être précieuses pour d’autres secteurs tels que la santé, l’éducation, la gestion des risques de catastrophe et l’énergie.

En renforçant les registres, les gouvernements peuvent mieux anticiper les catastrophes liées au climat et y répondre, offrant ainsi une protection plus efficace à leurs populations.


Luis Iñaki Alberro

Spécialiste principal en protection sociale à la Banque mondiale

Christian Bodewig

Chef de division au pôle Protection sociale et emploi pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre,

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