Le développement économique d’un pays ne se mesure pas uniquement à la taille d’une nouvelle route, ou au nombre d’usines, de centrales électriques et de ports construits. C’est aussi la somme d'histoires individuelles. Cette série de blogs publiée par le Groupe de la Banque mondiale, en partenariat avec Fraternité Matin et la bloggeuse Edith Brou, raconte l’histoire de ces héros ordinaires qui contribuent chaque jour au développement de leur communauté et dont la vie a changé grâce à un projet de l’institution.
Lorsque About Sofie est entrée au centre de santé de Bagba, dans le sud de la Côte d'Ivoire, pour se faire soigner, elle s'est sentie tout de suite rassurée: « Dès que tu franchis le seuil de ce centre, le sourire des aides-soignantes te rassure. Ailleurs, tu as la peur au ventre et tu hésites avant d’adresser la parole au personnel médical, prompt à humilier les malades et les abandonner à leur sort. »
Pour de nombreux patients ivoiriens, le système national de santé n’est pas encore à la hauteur de leurs attentes. En mars 2014, le décès d’une jeune patiente arrivée blessée dans un hôpital d’Abidjan avait ému et choqué le pays entier en révélant les nombreuses défaillances dans la prise en charge médicale. Depuis lors, une mutation est en train de se produire pour remettre le bien-être des patients au centre du dispositif hospitalier du pays.
Depuis le 1er août 2016, une nouvelle approche, soutenue par le Projet de renforcement du système de santé et de réponse aux urgences épidémiques (PRSSE) financé par la Banque mondiale, évalue en permanence la performance des établissements de santé. Désormais, le financement de ces établissements dépend principalement de la qualité de la prise en charge des patients. Un établissement traitant mieux ses patients devrait donc recevoir davantage de financement. Si à première vue ce changement peut paraître anodin, il tranche radicalement avec l'approche poursuivit jusqu’ici qui finançait les établissements de santé uniquement en fonction de leurs besoins. Au total, 73 établissements sanitaires de premier contact dans les districts sanitaires pilotes de Cocody-Bingerville, Anyama, Bouaflé et Sinfra ont signé des contrats de performance avec le projet PRSSE.
Daigni Kadidjatou, gestionnaire du centre de santé urbain d’Anono en banlieue abidjanaise, constate un changement des habitudes et des comportements induits par cette nouvelle dynamique centrée sur la satisfaction des patients. Ces derniers ont désormais la possibilité de juger la qualité de leur prise en charge sur toute la chaîne des services fournis, depuis l’accueil jusqu’aux soins et au suivi, avec l’aide de comités de gestion formés aux outils et méthodes d’évaluation de la performance. Système d’écoute en interne, enquête de satisfaction dès la sortie, chaque service est noté. Ici, gare aux faux pas ! Dans ce centre, la ponctualité est de mise, dès 7h30 chaque entrée et sortie est consciencieusement reportée dans un registre.
Ce changement de comportement du personnel hospitalier a tout de suite donné une plus grande confiance aux patients qui ont commencé à affluer vers les centres expérimentant cette nouvelle approche. Par exemple, au centre de santé rural d’Attiékoi, à Anyama, les consultations curatives ont ainsi grimpé de 11% en 2017. Mieux, on observe que les changements de comportement interviennent dans les deux sens. Les patients ayant davantage confiance, le personnel soignant est plus enclin à fournir plus d'informations afin de mieux les sensibiliser au danger de certaines maladies. Dans les zones les plus reculées, les services médicaux n’hésitent plus à faire du marketing social pour attirer les patients dans les centres de santé. En effectuant des consultations directement dans les villages, le personnel soignant est parvenu à briser la glace et à redonner confiance aux patients.
Cette belle aventure ne fait que commencer, puisque 405 nouveaux centres de santé vont expérimenter cette approche basée sur les résultats cette année. Si ces premiers résultats positifs se confirment, le gouvernement prévoit d’étendre rapidement le programme à l’échelle nationale.
À votre avis :
- Dans quelle mesure pensez vous que la mauvaise performance du système sanitaire en Côte d'Ivoire est la conséquence d'une mauvaise gestion et de comportements déficients, plutôt que du manque de personnel soignant de qualité ?
- Quelle est le rôle du secteur privé dans le financement et la gestion des établissements hospitaliers dans le pays ?
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