Malgré la fertilité des sols au Burundi, il est regrettable de constater qu'un enfant sur deux, de moins de cinq ans souffre de malnutrition chronique (retard de croissance). Cependant, j'ai remarqué que la communauté s'attaque directement à ce problème et est déterminée à éradiquer le retard de croissance en utilisant une approche multisectorielle !
La malnutrition pendant les 1 000 premiers jours de la vie des enfants peut entraîner des conséquences graves et persistantes. Elle peut ralentir la croissance d'un enfant, affaiblir le système immunitaire, altérer le développement cognitif et même augmenter le risque de mortalité. La malnutrition prive les enfants (et les pays !) d'atteindre leur plein potentiel. Cependant, la bonne nouvelle est que diverses interventions et programmes sont en place pour traiter ces problèmes de nutrition et de santé.
Lors de ma récente visite dans la province de Bubanza, à l'ouest du Burundi, j'ai rencontré deux groupes de femmes extraordinaires, connues sous les noms d'Agents de Santé Communautaire et de Mamans Lumières. Elles sont activement engagées dans diverses initiatives pour lutter contre la malnutrition, de la prévention à la réhabilitation.
Ces femmes dévouées sont élues au niveau communautaire grâce à leur relation exceptionnelle avec la population locale et leurs comportements nutritionnels malgré des situations socio-économiques modestes, ce qui en fait de véritables modèles. Elles dirigent des programmes d'éducation nutritionnelle pour enseigner à d'autres mères et soignants l'importance d'une alimentation équilibrée pour leurs enfants, ainsi que la promotion des jardins communautaires, où elles cultivent des légumes riches en nutriments.
De la grossesse à la réhabilitation
Les Agents de Santé Communautaire ont expliqué que le processus de lutte contre la malnutrition commence lorsque la femme est enceinte. Dans chaque commune de Bubanza, elles soutiennent et guident les femmes afin qu'elles puissent recevoir le bon traitement pendant leur grossesse et suivre un régime alimentaire sain et équilibré.
Après la naissance, le nouveau-né est examiné, mesuré et pesé pour déterminer s'il est en bonne santé. Des contrôles réguliers du poids et de la taille sont effectués pour les enfants et une mesure supplémentaire de la Circonférence du Bras Supérieur (MUAC) permet de déterminer rapidement si l'enfant est malnutri (la zone rouge sur le ruban indique une malnutrition sévère, la zone jaune une malnutrition modérée et la zone verte une nutrition adéquate). Les enfants dans la zone jaune sur le ruban de mesure sont envoyés au centre d'apprentissage et de réhabilitation nutritionnelle, géré par les Mamans Lumières. Les enfants sévèrement malnutris (MUAC couleur rouge) sont directement référés aux établissements de santé.
Agent de santé Communautaire mesurant le poids d’un enfant. Photo : Banque mondiale
Le centre d'apprentissage et de réhabilitation nutritionnelle que j'ai visité était modeste mais plein de vie et de joie. Le centre accueille environ 12 enfants à la fois, et chaque enfant y reste pendant 12 jours. Pendant leur séjour, les enfants reçoivent un soutien nutritionnel intensif et sont censés quitter le centre en bon état nutritionnel, ayant pris au moins 200 grammes de poids. C'est le critère de récupération fixé par le Programme National Intégré d'Alimentation et de Nutrition.
Pendant la session au centre, les Mamans Lumières enseignaient aux mères comment préparer des repas équilibrés incluant des protéines, des lipides et des glucides. Tous ces nutriments sont produits localement et peuvent être trouvés sur le marché de Bubanza. Après cette session, des aliments enrichis en micronutriments ont été apportés pour les enfants.
Les Mamans Lumières sont formées pour identifier la malnutrition chez les enfants et les orienter vers les centres de santé lorsque cela est nécessaire. Elles participent également à la sensibilisation de la communauté pour aider à assurer le suivi.
Collaboration entre la Communauté et le Gouvernement
Le succès de cette stratégie repose à la fois sur le soutien du Gouvernement et sur l'implication de la communauté. Grâce Projet Nkuriza, financé par l'IDA, qui se concentre sur l'investissement dans la petite enfance et la fertilité au Burundi, les capacités des Agents de Santé Communautaire et des Mamans Lumières sont renforcées. Le projet sensibilise à la nutrition et fournit à ces mères modèles des graines pour planter des légumes riches en nutriments.
Dans toutes les provinces où le projet est actif, plus de 4 127 Agents de Santé Communautaire et 3 000 Mamans Lumières ont été formés. Leur mission est simple mais profonde : donner à chaque enfant la possibilité de grandir en bonne santé et fort.
Les résultats de l'enquête SMART (Standardized Monitoring and Assessment of Relief and Transitions) de 2024 indiquent que le taux de retard de croissance a diminué de 4,9 % dans les provinces du projet, contre 0,8 % dans le reste du pays. Ce succès est en grande partie dû aux Mamans Lumières qui collaborent avec les Agents de Santé Communautaire et les leaders pour lutter contre le retard de croissance. Nous pouvons voir que leur travail pour entretenir des jardins potagers, promouvoir la nutrition et l'hygiène, et soutenir la planification familiale a un impact. Elles fournissent d’autres appuis comme un espace sûr pour la stimulation précoce et l'éducation des parents, qui sont tout aussi déterminantes et cruciales pour le développement socio-émotionnel des enfants malnutris.
Le succès à Bubanza est également dû à une approche multisectorielle. En plus du centre d'apprentissage et de réhabilitation nutritionnelle, les Mamans Lumières ont commencé à cultiver et à vendre des légumes, leur permettant de nourrir leur famille et de disposer de revenus pour subvenir à d’autres besoins.
Bâtir sur les réussites
Mamans Lumière lavant les mains des enfants avant un repas fortifié. Photo : Banque mondiale
S'attaquer à la malnutrition nécessite un effort collectif. Les Agents de Santé Communautaire et les Mamans Lumières luttent contre la malnutrition chez les enfants, les femmes enceintes et les mères allaitantes en utilisant des ressources locales. Leur travail démontre que les initiatives communautaires, soutenues par le gouvernement et les partenaires, peuvent conduire à des améliorations significatives. Alors que le gouvernement envisage une stratégie pour améliorer les incitations pour les agents de santé communautaire et adopte une approche multisectorielle pour combattre la malnutrition, je suis convaincu que des progrès supplémentaires peuvent être réalisés au Burundi, garantissant ainsi que les enfants puissent atteindre leur plein potentiel.
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