Aujourd’hui, l’importance des structures telles que les incubateurs, pépinières, accélérateurs et les hubs technologiques – en plein boom en Afrique depuis 5 ans – dans l’accompagnement des premiers pas des entrepreneurs africains n’est plus questionnée. Mais il s’avère que ces structures d’accompagnement sont pour la plupart encore très jeunes, isolées, avec des niveaux de professionnalisation très hétérogènes d'un bout à l'autre de l'Afrique, et un manque de moyens ou d’outils adaptés.
« Malgré tous leurs efforts, ces structures ne permettront pas aux entrepreneurs bénéficiaires de surmonter les principales difficultés de leur écosystème et de croître, si elles n’améliorent pas leur efficacité, efficience et ne se développent pas davantage. Leur impact sur la croissance, l'innovation de rupture et la création d'emplois restera alors limité » explique Christian Jekinnou, coordinateur du Programme Afrique Innovation, ajoutant « C’est justement en réponse à ce constat qu’Afric’innov a été mis en place ».
Ce Programme, mentionné dans notre article « Comment les réseaux peuvent stimuler les incubateurs africains », vise ainsi à professionnaliser les structures d’accompagnement africaines. Dans le cadre de sa stratégie d'appui à l'entrepreneuriat porteur de croissance, la Banque mondiale a décidé de rejoindre en octobre le comité de pilotage du Programme en tant que membre observateur. Cette position lui permettra d’étudier la mise en place de mécanismes pilotes pour soutenir le développement de ces structures d’accompagnement en Afrique, parmi lesquels des formations, des prêts à taux zéro, ou encore la certification des structures d’accompagnement les plus matures.
Certains de ces mécanismes pilotes ont été officiellement lancés lors de la cinquième édition des « Rencontres de l’Innovation International & Sud », qui se sont tenues en octobre 2017 à Paris. Outre les tables rondes, ateliers et animations organisés pour discuter des enjeux majeurs de l’entrepreneuriat en Afrique, ces Rencontres ont offert un programme de formation à une vingtaine de structures d’accompagnement à l’entrepreneuriat innovant actives en Afrique de l’Ouest (66%), Centrale (24%) et Australe (10%).
Pendant trois jours, le personnel de ces incubateurs et autres structures a ainsi reçu des formations, animées par des experts internationaux, à travers des études de cas réels et des outils directement applicables. Les thématiques couvertes comprenaient entre autres le renforcement des offres de services, la consolidation des modèles économique, ou encore l’identification des besoins/attentes des institutions internationales. Ce dernier atelier de formation, animé par une équipe de la Banque mondiale, a permis aux participants de comprendre le rôle des organisations internationales en faveur de l’entrepreneuriat porteur de croissance en Afrique. « J’ai beaucoup apprécié l’esprit de l’atelier, qui incite nos structures à mettre en œuvre les politiques de soutien identifiées par les institutions internationales et les gouvernements africains afin de devenir les moteurs du développement de l’entrepreneuriat sur le continent » déclare Radia Garrigues, directrice de l’incubateur JA Gabon.
Comme dans les pays développés, l’émergence des structures d’accompagnement donne aux décideurs publics africains l’occasion de « décentraliser » leurs politiques de soutien à l'entrepreneuriat. Le recours à ces structures évite de devoir créer de nouvelles agences publiques et permet plutôt de construire sur les bonnes pratiques existantes pour limiter les coûts. De plus, leur accompagnement s’adapte aux réalités des écosystèmes locaux et à l'évolution des besoins des entrepreneurs, fournissant un appui continu sur le long-terme, contrairement aux cabinets internationaux qui ne peuvent offrir qu’un soutien limité dans le temps.
La Banque mondiale commence à adopter cette approche dans différents pays africains pour déployer certains mécanismes d’appui à l’entrepreneuriat. Notamment l’organisation de concours de plans d’affaires, telles que le Marathon de l’Entrepreneur en Mauritanie, organisé par l’incubateur Hadina RIMTIC. Ou encore, le déploiement de formations à l’entrepreneuriat, telles que les ateliers conçus et organisés par les incubateurs CREATEAM et Impact Hub, dans le cadre du Projet de développement des compétences et emploi des jeunes au Mali. Ou la préparation des entrepreneurs à l’investissement, qui demande des services tels que ceux fournis par le programme panafricain XL Africa en collaboration avec des incubateurs locaux comme le CTIC, l’iHub et le mLab. Ou enfin les programmes d’open innovation, tels que le hackathon organisé par DoniLab, CREATEAM, Jokkolabs, Teteliso et Impact Hub pour concevoir une application de mobilité urbaine pour une grande entreprise privée au Mali.
In fine, le succès de cette approche comme celui des structures d’accompagnement africaines reposera entièrement sur le succès des entreprises porteuses de croissance et entrepreneurs sociaux qu’elles soutiennent au jour le jour.
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