World Bank / Daniella Van Leggelo-Padilla
Lorsque nous sommes enfin arrivés, en fin de journée, à Pointe-Sarène, à environ 100 kilomètres au sud de Dakar, Mamadou Faye nous attendait patiemment à côté de son champ. Nous étions en retard, à cause d’une circulation difficile, et je craignais de voir des signes de contrariété sur son visage, à moitié masqué par son chapeau pointu. Mais c’est un homme tout sourire que j’ai découvert lorsque nous nous sommes serré la main...
Dans la lumière du couchant, Mamadou m’a fait faire le tour de son champ, très fier de me montrer ses plantes de sorgho — une variété locale de céréales — visiblement en pleine santé, qui se balançaient doucement dans la brise du soir. Il m’a alors expliqué comment ces semences certifiées lui avaient permis de sauvegarder son gagne-pain. Avant, Mamadou cultivait du maïs. Mais faute de précipitations suffisamment régulières et de semences de qualité, il n’obtenait que des rendements et un revenu dérisoires. Le jour où il a signé un contrat avec une coopérative gérée par le Réseau des organisations paysannes et pastorales du Sénégal (RESOPP), il a récupéré des semences d’une nouvelle variété de sorgho, élaborée par le Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (WAAPP) et censée à la fois être résistante aux sécheresses et offrir des cycles plus courts.
Pour Mamadou, la promesse a été tenue : « Je suis tous les jours dans mon champ, de 7 heures à 18 heures, pour protéger ma récolte des singes et des oiseaux, parce que ça en vaut la peine. Le sorgho est très intéressant pour moi. Si j’avais plus de terres, j’en planterais certainement davantage », explique-t-il.
World Bank / Daniella Van Leggelo-Padilla
Au titre du contrat de production de semences, Mamadou Faye est tenu de revendre les graines de sorgho à la coopérative au prix de 300 FCFA le kilogramme, le double du tarif du marché. Pour Diegane Faye, conseiller agricole local du programme WAAPP, les agriculteurs qui utilisent ces variétés certifiées obtiennent un rendement de 1,5 à 2 tonnes par hectare, contre 0,5 tonne pour les variétés locales non certifiées. Quand on sait que la région a reçu deux fois moins de précipitations que d’habitude pendant la campagne 2014 (250 mm au lieu des 500 mm habituels), un tel rendement est remarquable — et peut, en outre, sauver des vies.
L’agriculture devenant une activité de plus en plus risquée au Sénégal comme dans bon nombre d’autres pays d’Afrique subsaharienne, il faut de toute urgence protéger les exploitants contre la menace grandissante que constituent les aléas météorologiques, les ravageurs, les maladies, la sécheresse, les inondations, le gel, les ouragans et quantité d’autres événements contraires. Car ces risques environnementaux, qui pénalisent durement les ménages agricoles, rejaillissent également sur l’économie tout entière, comme l’illustre le graphique ci-dessous. Au Sénégal par exemple, une saison des pluies irrégulière, insuffisante ou tardive comme celles enregistrées en 2002, 2006, 2007 et 2011 induit un net tassement de la croissance agricole et économique.
C’est pour cela que le programme WAAPP de la Banque mondiale conçoit et met en place des pratiques agricoles climato-intelligentes afin d’accompagner l’essor du secteur et, de contribuer ainsi à réduire la pauvreté et à stimuler la croissance économique, surtout dans les pays dont la richesse dépend de l’agriculture et où cette corrélation est très étroite.
Rien qu’au Sénégal, le programme WAAPP et ses partenaires, le Centre d’étude régional pour l’amélioration de l’adaptation à la sécheresse (CERAAS) et l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA), ont mis au point sept nouvelles variétés (quatre pour le sorgho et trois pour le millet) à haut rendement, à maturation précoce et résistantes à la sécheresse. Mises en circulation en 2012, elles sont désormais largement utilisées par les agriculteurs — dont Mamadou Faye — avec des résultats positifs. Une variété de sorgho à maturation précoce et à forte teneur en sucre devrait être disponible courant 2015.
Grâce à ces variétés améliorées, les agriculteurs obtiennent des rendements élevés même pendant les années marquées par un déficit pluviométrique, comme en 2011 et 2014. Ce qui les aide à mieux résister aux aléas du climat et à se prémunir contre les effets contraires d’une mauvaise campagne.
Chaque visite que j’effectue sur le terrain confirme l’importance et l’impact du travail mené dans le cadre du programme WAAPP. Notre prochain défi ? Accélérer le rythme de diffusion et d’adoption de ces variétés améliorées. J’espère sincèrement que le programme permettra à des milliers d’agriculteurs comme Mamadou Faye de recevoir des semences certifiées et de renforcer ainsi la production agricole de manière à installer durablement une croissance en faveur des pauvres dans mon pays natal.
Pour en savoir plus sur le Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest : http://www.banquemondiale.org/projects/P094084/west-africa-agricultural-productivity-program-waapp?lang=fr
Prenez part au débat