Apprentie pâtissière et jeune mère de quatre enfants, Rékia a pu prendre son destin en main grâce à l’espace communautaire d’accueil des enfants (ECAE). Cette initiative novatrice, mise en place pour redéfinir l'avenir de jeunes mères en situation vulnérable, propose un service de garde d’enfants de qualité durant leur formation.
Fortement encouragée en janvier 2024 par son maître pâtissier, Rékia émet le souhait de passer son Certificat de qualification professionnelle (CQP) en pâtisserie, une opportunité en or pour une reconnaissance formelle dans le domaine. Ce certificat repose sur une formation en alternance, et neuf sessions de douze jours de cours théoriques et pratiques. Mais entre la nécessité de s’occuper de sa petite Florence et la distance de deux heures du centre de formation le plus proche - le Lycée technique de Pobè - le rêve semble impossible.
C’est alors que Rékia entend quelques jours plus tard à la radio, qu’un espace communautaire d’accueil des enfants sera mis en place sur le lieu de la formation afin que les jeunes mères apprenties puissent y participer activement l’esprit tranquille. Encouragée par son époux, elle s’inscrit au test d’admission organisé par la Direction de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle (DETFP) et le réussit avec brio. Elle rejoint sa classe à Pobè avec Florence.
Rékia n’est guère rassurée de confier sa petite fille à une inconnue, surtout en entendant ses pleurs. Mais elle fait rapidement le constat que les mères communautaires sont professionnelles, dynamiques et attentionnées et qu’elles reçoivent régulièrement l’appui de la directrice du Guichet unique de protection sociale (GUPS) de Pobè. Au bout de quelques jours, Florence est heureuse de retrouver d’autres enfants avec lesquels elle peut jouer. Aujourd’hui, c’est le quatrième séjour de Rékia et Florence au Lycée technique ; elles y ont leurs repères et Florence se jette dans les bras de ses mères communautaires à chaque retrouvaille.
Chez son maître pâtissier, Rékia continue à porter sa fille sur le dos pour éviter que celle-ci ne se blesse avec les ustensiles et le four. Florence grandit et la distrait dans son travail. Rékia la confie parfois à la boutique voisine de son atelier mais elle sait que ce n’est pas idéal. Elle espère qu’un système de garde d’enfants pourra être développé dans son quartier maintenant qu’elle en a apprécié les bienfaits pour elle et sa fille.
Le Projet d’Inclusion des Jeunes (ProDIJ) dans lequel le Gouvernement du Bénin s’est engagé depuis mars 2021 avec l’appui de la Banque mondiale, vise à accroître l’inclusion économique de jeunes âgés de 15 et 30 ans, de faible niveau d’instruction et en situation de sous-emploi ou d’inactivité. Le projet soutient l’Agence nationale pour l’emploi (AnpE) et son système Azoli qui propose des stages en entreprises et des formations techniques de quelques jours. Le projet soutient également 1) la Direction de l’enseignement technique et de la formation professionnelle (DETFP) ; 2) le Fonds de développement de la formation professionnelle continue et de l’apprentissage (FODEFCA) dans le renforcement des formations techniques de courtes durées (1 à 3 mois) ; 3) des formations professionnelles organisées dans les Centres de formation professionnelle et d’apprentissage d’une durée de 2 à 3 ans, débouchant sur le certificat de qualification professionnelle, ainsi que 4) les lycées techniques.
Pour encourager la participation des jeunes femmes à ces diverses formations et leur insertion sociale et professionnelle, il s’est avéré nécessaire d’offrir un service de garde approprié aux enfants, dans un cadre sécure permettant leur épanouissement ainsi que celui de leur maman. Les acteurs du ProDIJ se sont donc associés au ministère des Affaires Sociales et de la microfinance, en charge d’assurer l’installation des structures de la petite enfance et la formation de leur personnel, avec la participation de leurs antennes sur le terrain, les Guichets uniques de protection sociale (GUPS). Le Gouvernement a développé un curriculum de formation, formé les GUPS et plus de 750 mères communautaires, et a équipé les ECAE en jouets et matériel pour assurer un environnement propre, sûr et stimulant. Au bout de deux années, 64 ECAE ont pu ouvrir et accueillir plus de 1 300 enfants. De nouvelles ouvertures sont planifiées dans le cadre du projet et des entreprises souhaitent répliquer ce type de service pour leurs employés.
Les ECAE répondent à un besoin exprimé par les mamans et leur communauté. L’offre de services de garde d’enfants est encore très limitée au Bénin, particulièrement en dehors du milieu urbain, alors que la demande croit avec la volonté grandissante des jeunes filles de renforcer leurs capacités et participer à l’économie de leur ménage. L’expérience positive des ECAE représente une opportunité pour le Gouvernement du Bénin de poursuivre ses réflexions relatives à l’amélioration de l’offre. Ceci passe par la définition et la mise en place du cadre légal de divers modèles de garde pour la petite enfance, aux stratégies de financement et au développement d’un curriculum de formation national.
L’histoire de Rékia et Florence illustre à quel point ces structures peuvent transformer des vies, en offrant non seulement des opportunités économiques aux jeunes femmes, mais aussi un environnement sûr et stimulant pour leurs enfants. Ces Espaces communautaires d’accueil des enfants sont bien plus qu’un projet social : ils sont un levier puissant pour l’égalité des chances et le développement inclusif.
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