Publié sur Nasikiliza

Quand sport et développement vont de pair

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Jeunes jouant au football en Namibie. Photo: © John Hogg/World Bank


Les gens me demandent souvent comment je suis devenu la personne que je suis. La plupart du temps, ma réponse les surprend. Je dois en partie ma carrière à mon amour du sport. Le sport faisait partie de mon quotidien lorsque j’étais enfant au Sénégal. Beaucoup ne jurent que par le football. Je pratiquais différents sports mais l’athlétisme et le karaté étaient mes deux passions. Les arts martiaux m’ont appris l’importance de la persévérance ; courir m’a donné la faculté de me concentrer. Mes entraîneurs étaient des éducateurs hors pair. En athlétisme, notre entraîneur Mansour Dia, trois fois finalistes aux Jeux olympiques, nous obligeait à avoir de bonnes notes pour faire partie de son équipe.  Mes coéquipiers ont tous réussi leur vie professionnelle : certains ont fait fortune sur Wall Street, d’autres ont fait carrière dans la politique, l’ingénierie ou la médecine. Quant à notre prof de karaté, sensei Fernand Nunes, il nous a inculqué le principe suivant : gagnez avec respect, perdez avec dignité.

Alors que nous célébrons aujourd’hui la Journée internationale du sport au service du développement et de la paix, déclarer que le sport joue un rôle fondamental dans le développement économique et social est insuffisant. Il faut développer l’éducation physique à l’école.

Dans des pays comme le Sénégal, les activités sportives à l’école et à l’université ont pendant longtemps joué un rôle important au sein de la communauté. Ce n’est plus le cas aujourd’hui à cause du manque de ressources humaines et financières. À cause aussi de l’absence d’un cadre légal règlementant les activités sportives à l’école et à l’université. Dans les pays en développement, notamment en Afrique, les décideurs ont tendance à ne s’intéresser qu’à « l’élite » sportive (c’est à dire au sport de haut niveau comme le football ou le basketball professionnel) et à délaisser le financement d’une éducation physique de base. Alors que la majorité des pays africains reconnaissent que l’éducation physique et sportive devrait faire partie intégrante du système éducatif, ils n’investissent pratiquement pas dans ce domaine. Il faut que cela change.

L’impact du sport en matière de développement international n’est plus à prouver. Ses vertus intrinsèques —l’esprit d’équipe, le caractère fair-play, la construction de l’estime de soi, l’égalité des chances— sont autant d’atouts pour promouvoir la paix. Il existe une multitude de campagnes publicitaires mettant en scène le pouvoir unificateur du sport. En 2012, la Banque mondiale a organisé la Coupe de la Paix des Grands Lacs, en espérant que le football puisse aider les anciens jeunes combattants à retisser des liens avec leurs communautés et leurs pays voisins dans cette région dévastée par les conflits. En Afrique du Sud, l’UNICEF a constaté une baisse spectaculaire de la violence dans les communautés où les écoles ont participé au programme « école pour le développement ». Dans certaines écoles, le nombre d’incidents enregistrés a baissé de 80 %.

Dans le domaine de la santé, les organisations internationales sollicitent souvent les athlètes de haut niveau pour leurs campagnes publiques de sensibilisation. En novembre 2014, la Banque mondiale s’est associée avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Fédération Internationale de Football (FIFA) pour organiser une campagne de sensibilisation dans la lutte contre le virus Ebola en Afrique de l’Ouest. Cette campagne a réuni les meilleurs joueurs de foot au monde (dont Didier Drogba et Cristiano Ronaldo) pour promouvoir des mesures préventives au sein des communautés touchées par l’épidémie. Le football a permis également de faire prendre conscience des ravages du VIH/SIDA lorsque la FIFA a instauré un programme de prévention et de dépistage par le biais de son initiative football for Hope. Des pays tels que l’Allemagne ont utilisé le football pour améliorer le processus d’intégration sociale des enfants d’immigrés. 

En Septembre 2015, le président du Groupe de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, a signé un accord de 50 millions de dollars avec la fondation du champion de tennis Novak Djokovic pour soutenir l’inclusion sociale et les programmes de développement en faveur de la petite enfance en Serbie et combattre plus efficacement les inégalités dont souffrent les jeunes enfants issus de milieux pauvres et défavorisés. Les premières années de la vie sont cruciales ; c’est pendant cette période que s’effectue la plupart du développement cognitif et social. Le jeu et le sport peuvent avoir des effets importants sur le développement des compétences motrices et la future réussite scolaire.

Nous devons parier sur le sport pour promouvoir le développement humain. En donnant un nouveau souffle à l’enseignement du sport dans les écoles—surtout dans les zones les plus défavorisées où les enfants n’ont pas accès aux infrastructures sportives ou aux programmes d’éducation physique— nous investissons pour la vie.  En plus de dispenser un enseignement sportif, les professeurs peuvent contribuer à améliorer la santé publique ;  en apprenant par exemple les bons gestes en matière d’hygiène tels que se laver les mains et les bonnes habitudes alimentaires.

Comment y parvenir? Il faut nouer des partenariats avec des institutions comme la ligue nationale de basketball aux États-Unis (NBA) qui promeut l’inclusion sociale en Afrique via le basketball et d’autres fédérations sportives qui contribuent à embellir la vie de millions de jeunes dans le monde entier. Il faut obtenir l’engagement des organisations de développement, des gouvernements et du secteur privé. Il s’agit d’intégrer le sport dans des projets de développement de la santé, de l’éducation et dans le domaine de la protection sociale. Ensemble, nous pouvons y arriver.  


Auteurs

Makhtar Diop

Directeur général et vice-président exécutif d’IFC

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