Les jeunes d'aujourd'hui qui arrivent à l’âge adulte vivent dans un monde marqué par de multiples crises qui s'imbriquent, notamment le changement climatique et la montée des inégalités, et par des mutations technologiques et culturelles aux conséquences déterminantes sur leur bien-être collectif et leurs perspectives d’avenir.
On compte aujourd’hui 1,2 milliard de jeunes âgés de 15 à 24 ans, et leur part dans la population mondiale devrait augmenter. Investir dans les adolescentes n'est pas seulement un moyen de transformer la vie de chacune d'entre elles, mais aussi de générer d'importants bénéfices économiques et sociaux qui profitent à tous. Des adolescentes en bonne santé et éduquées peuvent contribuer au bien-être de leur famille, de leur communauté et de la société à la hauteur de leur potentiel, ce qui favorise la croissance économique et des transformations sociales positives. Tout cela contribue à l'élimination de l'extrême pauvreté et au renforcement d'une prospérité partagée sur une planète vivable.
À l’occasion de la Journée internationale de la jeunesse, le 12 août, nous nous sommes penchés sur les dernières informations issues du portail de données sur le genre de la Banque mondiale (a) afin de mieux comprendre les réalités sociales et économiques des adolescentes et des jeunes femmes, et de plaider pour qu'elles soient placées au cœur des efforts de développement mondiaux.
Premier constat : Les mariages d'enfants sont toujours très répandus
Le mariage d'enfants est une forme de violence de genre qui a des effets persistants sur le développement du capital humain et les opportunités économiques, en particulier pour les filles. Les données sur ce sujet sont disponibles pour 108 pays seulement. Elles indiquent que, dans un pays-type (ou plus précisément, le pays médian), une femme sur cinq âgée de 20 à 24 ans était mariée avant ses 18 ans. En outre, dans certains pays, plus de la moitié des femmes sont mariées avant l’âge de 18 ans.
Ces mariages ne font pas que bouleverser l'enfance, ils sont aussi associés à un niveau d'éducation plus faible, à un risque accru de grossesse précoce, à un éloignement de la population active, à une diminution des perspectives de revenus et à une limitation de la capacité de décision et d'action tout au long de la vie.
Deuxième constat : Les taux de fécondité des adolescentes restent élevés dans les pays à revenu faible.
À l’échelle mondiale, la fécondité des adolescentes n’a cessé de baisser au cours des cinquante dernières années, le recul le plus marqué ayant été observé dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.
Cependant, les grossesses adolescentes restent courantes dans les pays à revenu faible, où le rythme de la baisse est beaucoup plus lent. Par ailleurs, elles sont particulièrement fréquentes dans les pays touchés par la fragilité, les conflits et la violence, et dans les pays en butte à des crises croisées.
Le taux de fécondité des adolescentes – ou plus prosaïquement la proportion de filles qui tombent enceintes – est le nombre de naissances pour 1 000 jeunes femmes âgées de 15 à 19 ans. Il s'accompagne souvent d'une augmentation des complications de l’accouchement qui contribuent à la mortalité maternelle, à l’insuffisance pondérale des bébés et à une baisse dramatique du taux de survie des enfants (a). Dans sept pays, la fécondité des adolescentes est plus de trois fois supérieure à la moyenne mondiale de 41,9 naissances pour 1 000. Au Niger, pays qui affiche le taux le plus élevé, 168 filles de cette tranche d’âge sur un millier ont eu un enfant en 2022.
Troisième constat : La proportion de jeunes femmes ni scolarisées, ni en emploi ni en formation est systématiquement plus élevée que celle des hommes.
Selon l’Organisation internationale du Travail, en 2023, plus d’un cinquième des jeunes dans le monde n'étaient ni scolarisés, ni en emploi ni en formation (NEET, selon l'acronyme anglais).
Cependant, presque partout, ces proportions sont plus élevées chez les jeunes femmes que chez leurs homologues masculins, ce qui reflète des contraintes spécifiques au genre. De nombreux facteurs, souvent interdépendants, expliquent pourquoi les jeunes abandonnent l'école et sont absents du marché du travail. Pour les jeunes femmes en particulier, les données indiquent que les mariages et grossesses précoces, ainsi que le poids des tâches ménagères et du travail domestique non rémunéré jouent un rôle décisif.
Un taux de NEET élevé chez les jeunes femmes peut également indiquer la prévalence de normes sociales qui limitent la participation des femmes au marché du travail (a).
Non seulement les taux de NEET sont plus élevés pour les femmes, mais souvent, ils persistent aussi dans le temps. C’est ce qui ressort clairement de la comparaison de ces taux (a) chez les jeunes de 15 à 24 ans avec ceux de la population âgée de 25 à 34 ans. Ils sont plus faibles chez les hommes de cette dernière tranche d’âge que pour les plus jeunes gens (15-24 ans), alors que les taux chez les femmes restent pratiquement identiques dans les deux groupes. En d’autres termes, à mesure que les hommes vieillissent, ils sont plus susceptibles d'entreprendre des études, de travailler ou de s'engager dans d'autres types de formation, à l'inverse des femmes.
Quatrième constat : Le chômage des jeunes est plus marqué chez les femmes que chez les hommes dans toutes les régions.
Un nombre impressionnant de jeunes – 73 millions – étaient sans emploi en 2022, et ce phénomène touche particulièrement les jeunes femmes. Même si les filles acquièrent un niveau d’éducation similaire, voire plus élevé, que les garçons, leurs succès scolaires (a) sont rarement synonymes d’emploi. Une plus large participation des jeunes femmes à l’économie est freinée par une multitude d’obstacles liés à l’offre et à la demande (a), notamment le manque de compétences, de ressources et de réseaux, les contraintes de temps, une mobilité réduite, la discrimination sexuelle à l’embauche et à la promotion, ainsi que les normes de genre restrictives.
Soutenir les adolescentes au profit d’un monde meilleur pour tous
L’égalité des sexes est, bien sûr, un droit humain fondamental. Mais c’est aussi la clé d’un monde plus prospère, plus pacifique et plus vivable.
En maintenant les filles à l’école, on leur donne les outils pour qu’elles deviennent les leaders de la politique et de l’industrie de demain. Et lorsque les femmes peuvent participer pleinement à l’économie ou occuper des postes de direction, les données montrent que les ressources naturelles sont mieux gérées, que la résilience est meilleure et que les économies sont plus compétitives.
Malgré les progrès réalisés ces dernières années, nos données montrent que les filles sont toujours plus vulnérables que les garçons à l’adolescence. Elles subissent des niveaux élevés de mariages et de grossesses précoces. Elles sont plus nombreuses à abandonner l’école et à être moins présentes sur le marché du travail formel.
Si l’on veut mettre fin à la pauvreté, il est indispensable d’éliminer les obstacles qui empêchent les adolescentes d’aller de l’avant.
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