Selon la dernière édition de la note d’information de la Banque mondiale sur les migrations et le développement, les envois de fonds vers les pays en développement ont atteint un niveau record en 2017, en s’établissant à 466 milliards de dollars, soit une hausse 8,5 % par rapport à l’année précédente. Les principaux bénéficiaires en sont l’Inde avec 69 milliards de dollars, suivie par la Chine (64 milliards de dollars), les Philippines (33 milliards de dollars), le Mexique (31 milliards de dollars), le Nigéria (22 milliards de dollars), et l’Égypte (20 milliards de dollars). Les envois de fonds en direction des pays en développement devraient continuer d’augmenter en 2018, de 4,1 %, pour atteindre 485 milliards de dollars.
Nous assistons à une reprise des transferts d’argent plus soutenue que prévu, qui s’explique par les meilleures performances de croissance dans l’Union européenne et la Fédération de Russie, ainsi qu’aux États-Unis. Le rebond des envois de fonds, évalués en dollars des États-Unis, a été favorisé par la hausse des prix du pétrole et l’affermissement de l’euro et du rouble.
Au premier trimestre de 2018, le coût d’un transfert de 200 dollars était de 7,1 % en moyenne à l’échelle mondiale, soit un niveau bien supérieur à la cible de 3 % fixée dans les Objectifs de développement durable (ODD). En outre, ces coûts varient dans une fourchette comprise entre 9,4 % en Afrique subsaharienne et 5,2 % en Asie du Sud.
Les mesures de réduction des risques prises par les banques continuent de limiter les activités des opérateurs de transfert d’argent. La stricte réglementation bancaire en matière de vérification de l’identité des clients qui est appliquée sur les transferts de faible montant contribue à leur cherté. Ces facteurs empêchent l’introduction de technologies plus efficaces et meilleur marché, comme les applications en ligne et sur smartphone et l’utilisation de cryptomonnaies et de chaînes de blocs. Un autre obstacle à la baisse des coûts des envois de fonds réside dans les contrats d’exclusivité entre systèmes postaux nationaux et opérateurs de transfert d’argent, qui ont pour conséquence d’entraver la concurrence.
Le nombre de migrants internationaux dans le monde en 2017 est estimé à 266 millions, dont 24 millions de réfugiés. Si les États-Unis restent dans l’absolu la première destination des migrants, la proportion de travailleurs étrangers par rapport à la population nationale est beaucoup plus élevée aux Émirats arabes unis, au Koweït et au Qatar, où elle avoisine voire dépasse 80 %.
Il faut saluer l’élaboration du Pacte mondial sur les migrations (GCM) (a), qui été négocié par plus de 200 pays afin de promouvoir des migrations sûres, ordonnées et régulières. Actuellement en cours de négociation en vue de son adoption finale en décembre 2018, le GCM prévoit la tenue de trois forums internationaux en 2022, 2026 et 2030. Le Groupe de la Banque mondiale et le programme KNOMAD sont disposés à contribuer à sa mise en œuvre.
Cette initiative fixe 22 objectifs qui couvrent la quasi-totalité des grands enjeux migratoires, y compris les cibles des ODD. Mais elle serait encore plus forte si elle traitait aussi d’autres aspects qui concernent les non-migrants, à savoir la préservation de l’identité nationale dans un contexte de flux migratoires importants, la concurrence pour l’emploi (perçue ou réelle) que connaissent les travailleurs locaux dans les pays d’accueil, et les difficultés auxquelles sont confrontées les familles des migrants restées au pays. En outre, la question du financement des programmes migratoires n’est pas résolue : les conditions assorties à l’aide, au commerce et à l’investissement, que renferme implicitement le projet de pacte, pourraient s’avérer inefficaces.
La note de la Banque mondiale consacre par ailleurs son dossier spécial aux migrations de transit. Elle montre comment ces circuits font courir aux migrants des risques plus élevés que les déplacements directs du pays d’origine vers le pays de destination. Alors que la migration de transit relève des mêmes causes que la migration directe, les migrants sont amenés à transiter par des pays tiers parce que le passage direct vers le pays de destination finale est impossible. Le choix du pays de transit repose sur la plus grande facilité à obtenir de faux papiers ou à recourir à des passeurs.
Ces migrants peuvent parvenir à échapper à la pauvreté ou à la persécution dans leur pays d’origine, mais beaucoup deviennent vulnérables aux trafiquants dans les pays de transit. Ils ne sont généralement pas en mesure d’envoyer de l’argent à leurs proches et sont parfois au contraire tributaires de leur aide financière pour pouvoir payer des passages qui coûtent cher. En outre, les populations pauvres des communautés d’accueil dans les pays de transit peuvent se retrouver en concurrence avec les nouveaux arrivants pour des emplois peu qualifiés.
La note préconise diverses mesures pour lutter contre les facteurs et les conséquences des migrations de transit. Il faut notamment développer les perspectives économiques et réduire les fragilités dans les pays d’origine, mais aussi ouvrir de nouvelles voies de migration légale vers les pays de destination. La criminalisation des migrants de transit risque en revanche de prolonger leur séjour. Quant à la collaboration entre pays d’origine, de transit et de destination, elle doit s’attacher à ne pas déstabiliser des processus traditionnels de mobilité régionale ni suspendre des accords régionaux de libre circulation des personnes.
Il est indispensable de garantir aux migrants de transit au moins la protection de leurs droits humains. Les pays d’origine devraient habiliter leurs ambassades dans les pays de transit à prêter assistance aux migrants. Quant aux organismes multilatéraux, ils peuvent apporter leur aide en fournissant des données, de l’assistance technique et des solutions de financement.
La Migration and Development Brief et les données les plus récentes sur les migrations et les envois de fonds sont disponibles sur www.knomad.org.
Prenez part au débat