Dès 5 heures du matin, bien avant le lever du jour, Tunu ali Matekenya s’active dans son fournil. La vie de cette ancienne travailleuse agricole du petit village de Msangani, en Tanzanie, a changé radicalement depuis qu’elle a suivi une formation professionnelle sur l’utilisation de fourneaux améliorés : « le four a un meilleur rendement énergétique, il est facile à utiliser et consomme moins de charbon, alors la fabrication du pain revient moins cher… et me rapporte plus d’argent », s’exclame Tunu fièrement.
Dans de nombreuses régions en développement, femmes et enfants passent des heures à ramasser du bois et d’autres types de combustible pour cuire les repas sur des feux ouverts ou des cuisinières rudimentaires dans des habitations mal aérées. Outre les risques évidents d’incendie, les dangers pour la santé sont réels, à cause de l’inhalation de fumées toxiques dégagées par une combustion incomplète – un phénomène responsable de pratiquement 500 000 décès prématurés (et évitables) par an en Afrique subsaharienne. Le problème est d’autant plus aigu que 82 % de la population utilise du charbon, du fumier, du bois et d’autres produits de la biomasse pour cuisiner.
Par ailleurs, la demande accrue de bois de feu et de charbon malmène les ressources naturelles locales et contribue à la dégradation des forêts voire, par endroits (comme par exemple à proximité des centres urbains, en plein essor en Afrique), à une véritable déforestation. L’usage traditionnel de la biomasse pour la cuisine et la production de charbon en Afrique subsaharienne ont contribué à hauteur de 1 % aux émissions mondiales de gaz à effet de serre en 2010.
Ces questions étaient au cœur de la rencontre organisée à Dakar (Sénégal) le 16 novembre 2012, dans le cadre du lancement de l’initiative « Solutions énergétiques pour une cuisson propre en Afrique » (ACCES), qui a réuni 120 participants venus de 15 pays africains. L’initiative ACCES entend promouvoir, avec l’aide des entreprises, la généralisation et l’adoption de solutions propres de cuisson en Afrique subsaharienne. Elle procède de l’engagement pris par la Banque mondiale de développer et d’améliorer l’accès des ménages à une énergie propre.
À Dakar, de nombreux participants, sensibles à l’urgence d’une telle mutation, ont plaidé pour l’introduction de solutions énergétiques propres qui remédieraient à un problème récurrent. Bill Farmer, de l’Uganda Carbon Bureau, a ainsi appelé la Banque mondiale à « faire preuve d’audace… et à prendre des risques ».
L’implication du secteur privé est cruciale: innovations technologiques et commerciales, rendements améliorés et impacts optimisés contribuent à satisfaire une demande croissante de solutions énergétiques propres pour la cuisson. De nombreuses entreprises présentes à la réunion de Dakar, conscientes du potentiel commercial de cette activité, commencent à investir dans ce domaine. Certaines, comme la société rwandaise Inyenyeri, s’attaquent au marché prometteur des combustibles de cuisson avec une offre mixte carburants/fourneaux.
Avec le développement de son activité, Tuni peut désormais conseiller aussi les femmes de sa communauté.
« Cette activité a transformé ma vie, raconte-t-elle. J’ai pu construire une maison moderne et envoyer mes enfants dans une bonne école. Je peux aussi aider les enfants de mon frère ».
Pour les acteurs du secteur, l’expérience est passionnante car elle montre comment des modes de cuisson propres peuvent changer la vie des gens. En outre, la communauté internationale s’intéresse à la question à travers l’Alliance mondiale pour des cuisinières propres et l’Initiative « Énergie durable pour tous » des Nations Unies, qui s’attachent à trouver des sources modernes d’énergie de cuisson.
L’initiative ACCES de la Banque mondiale s’inscrit dans ce mouvement général qui cherche à améliorer le quotidien de millions d’Africains, foyer par foyer.
Prenez part au débat