L’importance de la crédibilité budgétaire
Une prévision rigoureuse des recettes et des dépenses est indispensable pour assurer une gestion budgétaire efficace et permettre à l'État de planifier de manière adéquate le financement des services publics, des projets d’infrastructure ou des programmes sociaux, et d'éviter les déficits imprévus. Lorsque les prévisions budgétaires sont inexactes, les gouvernements peuvent rencontrer des difficultés à assurer la stabilité des finances publiques et à concrétiser leurs priorités politiques.
Dans ce billet, nous cherchons à savoir dans quelle mesure les gouvernements respectent les budgets approuvés, tant en matière de dépenses que de recettes, et s’ils ont tendance à surestimer ou sous-estimer leurs prévisions budgétaires.
Nous avons analysé 307 ensembles de données budgétaires associant le montant de recettes et de dépenses effectives, tirés de rapports d’évaluation publics couvrant 85 pays et territoires entre 2012 et 2024. Ces évaluations ont été réalisées selon le cadre du programme Dépenses publiques et responsabilité financière (PEFA) (a), qui repose sur sept piliers couvrant les différentes phases du cycle budgétaire. Le premier pilier, qui concerne la fiabilité du budget, découle des autres piliers et porte notamment sur les dépenses effectives totales et sur les recettes effectives.
Le cadre PEFA attribue des notes en fonction des écarts observés dans l'exécution du budget. Notre analyse porte sur les données des dimensions 1.1 (exécution des dépenses) et 3.1 (exécution des recettes). Quatre scénarios distincts s’en dégagent (voir figure 1) :
1. Recettes et dépenses supérieures aux prévisions – 18 % des cas (en haut à droite de la figure 1)
2. Recettes supérieures aux prévisions et dépenses inférieures aux prévisions – 19 % des cas (en bas à droite)
3. Recettes inférieures aux prévisions et dépenses supérieures aux prévisions – 14 %des cas (en haut à gauche)
4. Recettes et dépenses supérieures aux prévisions – 49 % des cas (en bas à gauche).
Le scénario 4 est le plus fréquent : il représente près de la moitié des cas et correspond à des situations où l’État a perçu moins de recettes que prévu et a également dépensé moins que prévu.
Figure 1 : Taux de réalisation des recettes (%) et taux de réalisation des dépenses (%) pour une même année, par pays — distribution des cas de sous- et de sur-exécution des recettes et des dépenses (sur un échantillon de 370 cas). Source des données : Rapports d’évaluation PEFA nationaux sur http://www.pefa.org
Sur le graphique, l’axe horizontal et l’axe vertical montrent respectivement le taux de réalisation des recettes et des dépenses par rapport au budget prévu. Le nuage de points indique une corrélation positive : 38,2 % de la variation des dépenses peut s’expliquer par celle des recettes. L’analyse de régression montre aussi que chaque variation de 1 % des recettes se traduit par une variation moyenne de 0,59 % des dépenses. Cela signifie concrètement que 1 % de recettes supplémentaires entraîne 0,59 % de dépenses supplémentaires en faveur des écoles, des centres de santé ou des infrastructures routières. Autrement dit, si les gouvernements amélioraient la gestion des recettes, ils seraient en mesure de fournir de meilleurs services publics à leurs citoyens.
Deux constats majeurs ressortent de notre analyse.
- Les gouvernements surestiment souvent les recettes — dans 63 % des cas, les recettes réelles sont inférieures aux prévisions. Et dans 68 % des cas, ils n’atteignent pas leurs objectifs de dépenses, ce qui est probablement imputable à un montant de recettes collectées moins élevé que prévu.
- Que peut-on en conclure ? Des recettes insuffisantes par rapport aux prévisions conduiront fréquemment un gouvernement à dépenser moins que ce qui était prévu au budget, au détriment des résultats attendus : programmes annulés, services publics de moindre qualité, etc. Il est donc essentiel d’avoir des prévisions de recettes réalistes et une administration fiscale efficace pour éviter les risques de sous-exécution des dépenses.
Prenez part au débat