Lors de la Semaine de la vulgarisation agricole en Afrique qui s’est récemment tenue à Durban, on a beaucoup entendu que la demande de produits alimentaires sur ce continent allait doubler d’ici 2050. Les opportunités de croissance et d’emploi dans l’agriculture sont donc vouées à perdurer, et c’est pourquoi la vulgarisation agricole est plus importante que jamais.
Qu’est-ce que la vulgarisation agricole exactement ? Ce terme désigne l’ensemble des services qui fournissent des conseils techniques aux agriculteurs : cultivateurs, éleveurs, pisciculteurs, etc. La vulgarisation agricole fait notamment intervenir des formateurs, des conseillers, des gestionnaires de projet et des agents de développement communautaire. En outre, ces acteurs apportent un appui administratif aux autorités locales et aident les agriculteurs à prendre des décisions et à partager leur savoir. La vulgarisation agricole, qui s’adresse aux petits exploitants sur l’ensemble de la chaîne de valeur, est cruciale pour la sécurité alimentaire, nutritionnelle et des revenus.
Or, malgré sa contribution essentielle au renforcement des futurs systèmes d’alimentation, elle n’est pas toujours adaptée à son objectif. En Afrique, par exemple, nombre des dispositifs de vulgarisation publics sont administrativement lourds, manquent de transparence et ne disposent pas de moyens suffisants. Parallèlement, la demande de services de vulgarisation ne cesse de croître dans cette région du monde. Elle n’émane plus uniquement des petits exploitants et des jeunes agriculteurs, mais aussi des agro-entreprises.
Il est évident que la vulgarisation agricole doit évoluer avec son temps. Pour ce faire, les professionnels de ce domaine peuvent compter sur des organisations comme le Forum africain pour les services de conseil agricole (AFAAS), qui permet aux experts et vulgarisateurs d’échanger leurs idées et de mettre en commun leurs expériences et innovations.
Une grande partie de la population agricole se compose de jeunes, qui, pour s’informer, utilisent principalement les technologies de l’information et de la communication (TIC). D’où la nécessité de réinvestir dans le système de vulgarisation public, d’améliorer les partenariats et d’élargir les domaines de compétence des vulgarisateurs aux sciences sociales, aux TIC, aux aspects environnementaux et aux questions d’égalité entre les sexes. Par ailleurs, il faudrait veiller à prendre en compte les TIC dans les activités de vulgarisation, à mieux gérer les ressources humaines et renforcer les capacités, ainsi qu’à cibler les femmes, les jeunes et le secteur privé. Enfin, il est fondamental de constituer des réseaux et de s’organiser pour réunir les différentes parties prenantes.
Hier, la vulgarisation était avant tout destinée à aider les personnes en difficulté. Mais, en Afrique, beaucoup d’agriculteurs sont désormais mieux informés et intégrés à des réseaux. Il faut donc que la vulgarisation suive le mouvement et redéfinisse ce qu’est un agriculteur et quels services lui proposer. Cette transformation doit reposer sur le marché. Comme l’affirme Jeff Mutimba, coordinateur régional du Sasakawa Africa Fund for Extension Education (SAFE), « la vulgarisation ne doit plus se concentrer uniquement sur la production, mais innover et être axée sur le marché. Il est nécessaire d’inclure tout le monde, en particulier les jeunes, les femmes et les personnes handicapées, qui risquent d’être laissés-pour-compte sur les marchés en développement où les exigences sont fortes ». C’est la raison pour laquelle les systèmes de vulgarisation doivent évoluer pour former les agriculteurs, aujourd’hui et demain, aux tendances nouvelles .
Nul n’ignore que l’Afrique a besoin d’une révolution numérique de grande ampleur. Les agriculteurs se mettent à utiliser les TIC pour accéder à des services de conseil, via le téléphone portable, la radio, la vidéo ou Internet. Sur ce continent, la plupart des jeunes sont présents sur les réseaux sociaux. Il en résulte une opportunité considérable : sachant qu’ils peuvent apporter des idées novatrices, on pourrait les charger de la vulgarisation agricole auprès d’autres jeunes en exploitant les plateformes et réseaux sociaux sur lesquels ils sont les plus actifs (Twitter, Facebook, WhatsApp…).
Cette révolution s’amorcera lorsque les jeunes auront voix au chapitre. Il est donc urgent qu’ils soient représentés dans toutes les instances décisionnaires en matière de vulgarisation, notamment au sein de l’AFAAS et du Forum mondial pour le conseil rural (GFRAS), afin que les problématiques des jeunes soient prises en considération. Évitons de décider à la place des jeunes : ils peuvent s’exprimer, et nous devons par conséquent les associer aux processus de décision.
Et n’oublions pas les femmes, qui, en Afrique, contribuent considérablement à la sécurité alimentaire grâce à leur travail et aux produits qu’elles cultivent. Ainsi, dans le nord du Malawi, 80 % des femmes font pousser des légumes, des oignons, du maïs et du tabac . Dans cette région, 20 % des hommes interviennent en bout de chaîne, pour vendre ces produits et pratiquer d’autres activités générant un revenu. Par conséquent, il est fondamental d’associer les femmes à la vulgarisation agricole, et ce d’autant plus que leur inclusion pourrait accélérer la mutation de l’agriculture.
La vulgarisation agricole doit se transformer pour répondre aux besoins actuels, et à venir. Sa pérennisation repose, dans une large mesure, sur la participation des jeunes et des femmes.
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