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Pour qui examine la situation des habitants du monde, le constat est clair : nos sociétés modernes manquent cruellement de résilience face aux chocs naturels. Les villes se sont étendues en toute anarchie dans des zones exposées aux inondations et aux tempêtes, détruisant des barrières naturelles et rejetant souvent les pauvres à la lisière, aux endroits les plus vulnérables. Les sécheresses, dont la récurrence s’accélère avec le changement climatique, prélèvent leur dîme sur l’agriculture et provoquent des pénuries alimentaires.
Au cours des trente dernières années, les catastrophes naturelles ont fait plus de 2,3 millions de victimes. C’est l’équivalent de la population de Houston ou de la Namibie.
Le tsunami qui a frappé Aceh en Indonésie en 2004 a emporté 165 000 personnes et provoqué 4,5 milliards de dollars de dégâts. Dans la Corne de l’Afrique, la sécheresse qui a sévi entre 2008 et 2010 a plongé 13,3 millions de personnes dans les affres de la faim. Le phénomène, qui persiste, menace des millions d’habitants de cette région et de tout le Sahel d’une pénurie alimentaire mortifère. Le séisme de Haïti en 2010 a provoqué la mort de plus de 220 000 personnes et détruit des dizaines de milliers d’édifices, entraînant le déplacement de 1,5 million d’habitants et un préjudice économique de 7,8 milliards de dollars (soit 120 % du PIB du pays). Les inondations au Pakistan cette même année ont tué 1 985 personnes et causé pour 10,1 milliards de dollars de dégâts. Sans oublier le séisme et le tsunami qui se sont abattus sur le Japon l’an dernier et leurs 20 000 victimes ; les dégâts matériels sont estimés à 210 milliards de dollars.
Nous n’avons encore rien vu : du fait du changement climatique et de l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes, ces aléas sont condamnés à se multiplier dans les années à venir et risquent de ruiner les efforts de la communauté internationale pour mettre fin à la pauvreté, replongeant les plus vulnérables à peine sortis d’affaire dans une misère noire.
Mais alors, que pouvons-nous faire ?
Nous devons investir dans la résilience et modifier la trajectoire des économies en faveur d’une croissance verte plus solidaire.
La première étape est celle de l’urbanisme (a). Partout, les villes croissent pour accueillir de nouveaux logements, de nouvelles écoles, de nouveaux hôpitaux et quantité d’autres infrastructures. Les autorités doivent s’assurer que ces structures résistent mieux aux séismes, sont construites dans des zones non inondables et ne détruisent des remparts naturels aux tempêtes (forêts à flanc de coteau ou mangrove, par exemple). En suivant les principes d’une croissance verte sans exclus, on peut aussi favoriser l’apparition de communautés plus résilientes qui réduisent dans le même temps leurs émissions de gaz à effets de serre lesquelles entretiennent le changement climatique.
Les normes de construction et l’éducation sont deux aspects véritablement essentiels. Le séisme et le tsunami au Japon en 2011 ont prouvé l’utilité d’une gestion du risque de catastrophes pour limiter les conséquences dramatiques d’un phénomène naturel dévastateur. Les normes antisismiques ont permis à de nombreux édifices, publics et privés, de supporter la violence des secousses et la formation aux catastrophes dispensée dans les écoles et à la télévision a contribué à sauver un nombre incalculable de vies. Chaque pays, chaque gouvernement peut — où qu’il en soit dans sa trajectoire de développement — prendre des mesures dans cette direction.
La communauté internationale doit quant à elle redoubler d’efforts.
Actuellement, les activités de prévention et de préparation ne représentent que 3,6 % de l’aide consacrée aux catastrophes (soit 3,3 milliards de dollars), tandis qu’environ 70 % est alloué à l’aide d’urgence post-catastrophe et 25 % aux travaux de reconstruction et de remise en état. Nous devons inverser ces proportions.
L’anticipation paie, en termes de vies et de biens sauvés. La Banque mondiale soutient depuis 2004 des recherches sur la réduction des risques de glissements de terrain à Sainte-Lucie. Cinq communes menacées ont pu depuis se protéger grâce à des travaux de drainage sur les coteaux. Lorsque l’ouragan Tomas s’est abattu sur l’île en 2010, aucune d’elles ne figurait dans les longues listes de destructions liées aux glissements de terrain.
Cette semaine, des ministres du monde entier vont se retrouver à Sendai, au Japon, non loin de l’épicentre du séisme de 2011, pour entendre les analyses d’experts de la gestion des risques de catastrophes. L’un des objectifs de ce Dialogue de deux jours vise à obtenir un consensus global sur la nécessité de renforcer la résilience. Les sessions seront retransmises en ligne. Catastrophes, résilience, espérance et relèvement seront également au cœur de la conférence TEDxSendai, le 10 octobre. J’y participerai, aux côtés d’autres personnalités du monde entier — politiques, scientifiques, artistes —, et vous pourrez aussi suivre l’événement en direct sur le web.
Nous devons installer une culture de la prévention et de la résilience, et cela passe par des investissements.Rachel Kyte
Vice-présidente pour le développement durable
www.worldbank.org/sustainabledevelopment (a)
Twitter : @rkyte365
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