Le secteur agricole continue d’offrir de nombreuses opportunités d’emploi intéressantes, sur les exploitations et en dehors. Y compris pour les jeunes ?
Quels sont les secteurs qui pourraient employer (a) les jeunes demain ? On pense tout de suite à la technologie et à l’internet, mais pas à l’agriculture. En effet, le développement économique s’est toujours accompagné d’un recul de l’emploi agricole. En outre, les méthodes de production alimentaire traditionnelles ne sont pas particulièrement attrayantes… Mais les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont en train de révolutionner ce secteur, tandis que l’urbanisation et l’évolution des habitudes alimentaires amènent à repenser la façon dont les aliments sont transformés, commercialisés et consommés. Dans ce contexte, l’agriculture est-elle une voie d’avenir pour les jeunes ?
Des emplois moins nombreux mais de meilleure qualité dans l’agriculture
Premièrement, il ne fait aucun doute que l’emploi agricole est en perte de vitesse, et c’est logique : l’urbanisation et l’amélioration des revenus s’accompagnent d’une diminution de la part des dépenses alimentaires dans le total des dépenses, au profit d’autres biens et services. Aujourd’hui, beaucoup d’agriculteurs se tournent vers des activités non strictement agricoles qui répondent à cette nouvelle demande. Mais ce n’est tenable que si la productivité du travail dans l’agriculture augmente sous l’effet de l’innovation, et si l’accès aux marchés s’améliore pour permettre d’écouler la production. Les TIC peuvent jouer un rôle important sur ces deux plans (a).
Comment ? Par le biais de l’automatisation notamment. Nombre d’observateurs s’étonnent depuis longtemps du retard de mécanisation de l’Afrique : compte tenu de sa densité de population et de son accès aux marchés, ce continent devrait afficher un taux de mécanisation bien plus élevé (a). Mais cela pourrait changer, grâce aux services reposant sur les TIC.
La start-up nigériane Hello Tractor (a) est l’un des exemples les plus intéressants de cette évolution. Cette plateforme innovante propose un service de location de tracteurs dotés d’une antenne GPS et de capteurs sophistiqués. Un simple SMS suffit pour réserver et prépayer ce service. Le « Uber des tracteurs » (a) permet aux petits agriculteurs d’accroître nettement leur productivité. Mais, dans toute la région, la mécanisation reste freinée par un certain nombre de facteurs, notamment par le manque d’accès à des financements, par la lenteur de la mise à disposition des services d’appui et par les difficultés à atteindre une masse critique. Il faut résister à la tentation de subventionner la mécanisation, et veiller à ce que les forces du marché puissent continuer de s’exercer sur la base des ratios de prix des facteurs de production (travail/capital et travail/foncier).
Outre leur contribution potentielle à la hausse de la productivité de la main-d’œuvre agricole via la mécanisation, les TIC (a) améliorent également les pratiques agronomiques en facilitant la vulgarisation agricole et, surtout, elles améliorent l’accès des agriculteurs aux marchés (existants et nouveaux) et renforcent leur pouvoir de négociation, ce qui leur permet d’obtenir de meilleurs prix de vente. Farmbook, en Afrique, et MFarming, en Tanzanie (a) sont deux exemples d’initiatives récentes qui utilisent les TIC pour atteindre ces objectifs. À leur tour, un meilleur accès aux marchés et des prix de vente plus élevés encouragent l’adoption de technologies qui débouchent sur des gains de productivité, ce qui accroît l’offre et ouvre des perspectives pour les jeunes vivant en zone rurale, qui pourront tirer de l’agriculture un revenu plus élevé.
Il existe aussi des opportunités dans les zones urbaines. Par exemple, 1 000 à 15 000 emplois agricoles (a) ont été créés dans les grandes villes comme Bamako, Accra ou Kumasi. On observe la même tendance dans certaines mégapoles, telles que Shanghai, où l’agriculture urbaine reste une importante composante du tissu économique (a).
Les technologies employées peuvent être très sophistiquées. C’est notamment le cas chez Fresh Direct (a), au Nigéria, récemment récompensé au Forum économique mondial sur l’Afrique. Installée en zone périurbaine, cette entreprise pionnière cultive en hydroponie des produits frais, sur des conteneurs empilables. Ses fermes urbaines consomment moins d’eau et utilisent moins de terres que l’agriculture conventionnelle, pour des rendements 15 fois supérieurs, et permettent à la population urbaine de s’approvisionner en produits de qualité.
Emplois liés à l’agriculture
C’est cependant en amont et en aval de l’agriculture que la plupart des nouveaux emplois attractifs seront créés. En effet, avec l’accroissement des besoins dans divers domaines (regroupement, stockage et transformation des produits, logistique, préparation des aliments, restauration et autres services connexes), les secteurs non agricoles offriront nombre d’opportunités d’emploi, principalement dans l’agroalimentaire. Ces activités en aval génèreront des emplois de qualité, comme le fait déjà Hello Tractor, qui offre de bonnes opportunités d’emploi aux propriétaires de tracteurs, aux conducteurs de véhicules et aux prestataires de services financiers. En Afrique australe et en Afrique de l’Est, ces secteurs devraient, selon les prévisions, absorber environ un quart de la main-d’œuvre qui quittera l’agriculture au cours de la prochaine décennie.
Afin de préparer à ces emplois, en particulier les jeunes et les femmes, l’Africa Agribusiness Incubators Network (AAIN) (a), le réseau africain des incubateurs d’entreprises agroalimentaires, va mettre en place au moins 108 incubateurs, dans 54 pays d’Afrique, sur les cinq prochaines années. L’AAIN prévoit de former 60 000 personnes dans le cadre d’un contrat d’apprentissage et de les faire bénéficier d’un mentorat pour les aider à créer leur entreprise. Au moins 600 000 emplois et 100 000 start-up et PME pourraient ainsi voir le jour (a).
L’avenir des emplois dans l’agriculture
Même si une majorité de jeunes rêvent d’un emploi non agricole, l’agriculture continue d’offrir nombre d’opportunités intéressantes, sur les exploitations et en dehors. Mais il est impératif d’améliorer la compétitivité de ce secteur agricole, et des activités en amont et en aval, en encourageant l’innovation, les investissements publics dans des produits et des services en zone rurale, et le développement des villes secondaires, afin d’attirer à la fois les agriculteurs jeunes et les agriculteurs plus âgés. Il reste toutefois beaucoup à faire pour atteindre ces objectifs et, ainsi, mettre fin à l’extrême pauvreté et promouvoir une prospérité partagée. On trouvera ici (a) quelques pistes supplémentaires.
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