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Doubler la mise pour le développement de la petite enfance en Amérique latine et aux Caraïbes

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ImageL’Initiative en faveur de la petite enfance, née de l’union des forces de la Banque mondiale, de la fondation ALAS et de l’artiste Shakira, fête cette année ses deux ans. Grâce à ce programme, des millions enfants de la région connaissent eux aussi des anniversaires plus joyeux.

Environ 5 millions d’enfants et leurs mères bénéficient déjà de cette initiative, pour laquelle les investissements se montent à 400 millions de dollars, soit plus du double du montant escompté à ce stade, et 100 millions de plus que le total prévu pour l’ensemble du programme.

Ces investissements soutiennent des programmes de développement de la petite enfance dans quasiment tous les pays de la région, couvrant une vaste palette d’activités, notamment l’amélioration de l’accès aux services de santé, de nutrition et d’éducation pour les enfants de 0 à 6 ans.

« Doubler la mise » pour le développement de la petite enfance, cela signifie que nos pays clients en Amérique latine et aux Caraïbes ont compris qu’un investissement précoce est un investissement intelligent. L’investissement en faveur du jeune enfant est l’investissement dans le développement qui procure les bienfaits les plus importants tant au niveau des populations qu’au niveau des pays. Les cinq premières années de la vie d’un enfant façonnent non seulement son corps et son esprit, mais elles déterminent aussi sa capacité, tout au long de son existence, à grandir, à apprendre, à rester en bonne santé et à interagir avec les autres.

C’est la raison pour laquelle le développement de la petite enfance est un investissement qu’il faut réaliser « maintenant ou jamais ». Une fois que l’enfant est sur le chemin du développement, ce chemin est irréversible. C’est un processus implacable qui peut, quasiment dès le départ, compromettre les chances d’un enfant dans la vie.

Mais c’est aussi un processus qui peut agir puissamment en sa faveur. Si l’enfant reçoit les soins de santé, l’alimentation, l’affection, la stimulation et l’éducation dont il a besoin, et auxquels tous les enfants ont droit, ce qu’il acquerra au cours de ces premières années sera aussi irréversible.

Quoi qu’il puisse lui arriver plus tard dans sa vie, l’enfant ne perdra pas les centimètres de croissance supplémentaires qu’il aura gagnés, son aptitude à apprendre, et il n’oubliera pas les capacités sociales qu’il a acquises.

La recherche économique a montré, au cours de la dernière génération, certains des avantages considérables à long terme que représente l’investissement dans les enfants. (Il est toujours amusant de voir les économistes découvrir ce que la plupart des gens savent depuis des siècles.) Le développement de la petite enfance offre en outre l’avantage d’être durable.

Dans de nombreux cas, les investissements dans le développement nécessitent une maintenance constante, ils sont exposés aux revirements rapides des politiques publiques ou risquent de devenir obsolètes lorsque les temps ou les conditions changent. Ce n’est pas le cas de ceux consacrés au développement de la petite enfance.

Aussi les pays de la région ont-ils dépassé le « pourquoi » du développement de la petite enfance pour explorer désormais le « comment » et le « avec qui ». Chaque programme dispose de sa propre formule pour définir la meilleure façon d’investir dans les enfants.

Des approches diverses, un objectif unique

Certains programmes sont déployés par un seul organisme public et ciblent un aspect spécifique, par exemple la santé des enfants ou l’éducation préscolaire. Ils peuvent se révéler très efficaces, comme le Plan Nacer en Argentine. Grâce à ses outils de performance et de responsabilisation pour les prestataires de services de santé et les autorités provinciales, ce programme a incontestablement amélioré les résultats sur le plan de la santé. Le Mexique a enregistré des réussites analogues dans le secteur de l’éducation avec la mise en place de la préscolarisation universelle et ses effets positifs sur l’amélioration progressive des résultats scolaires.

Il existe aussi des approches transversales. Certaines s’inscrivent dans des partenariats avec divers niveaux de gouvernement et avec la société civile, notamment dans le secteur social. Ainsi, en Bolivie, dans les quartiers les plus pauvres, les municipalités renforcent les services de garde d’enfants, en coordination avec le ministère du Travail, de manière à ce que davantage de jeunes mères puissent trouver un emploi. Au Belize, les collectivités locales proposent toute une palette de services sociaux intégrés qui vont de l’accès à la santé maternelle à l’éducation sanitaire dans les écoles.

L’un des exemples d’approche transversale les plus connus dans le monde est le programme chilien Chile Crece Contigo (« Le Chili grandit avec toi »). Afin de limiter les lacunes et les chevauchements, ce programme a mis en place un système complet qui suit les enfants du stade prénatal jusque ce qu’ils aient l’âge d’aller à l’école, c’est-à-dire 5 ans. Il permet une coordination ininterrompue entre les ministères de la Santé, de l’Éducation et de la Protection sociale, et veille à ce que tous les enfants bénéficient de l’ensemble des services dont ils ont besoin.

De même, dans le cadre de notre coopération Sud-Sud, El Salvador, le Honduras et le Nicaragua sont en train d’élaborer des politiques globales pour le développement de la petite enfance. La Banque a réuni des représentants des ministères sociaux (comme la Santé et l’Éducation) et des ministères centraux (comme la Planification et les Finances) dans l’objectif de définir, avec la société civile, des stratégies unifiées pour les priorités nationales et locales.

Souvent, la première étape vers cette transversalité consiste simplement à localiser les institutions qui opèrent ici et là, à dresser un tableau complet des centres de garde d’enfants, des jardins d’enfants, des centres de santé et des autres prestataires de services, et à définir des possibilités de collaboration. Ce travail de localisation a été le point de départ de notre collaboration avec 28 municipalités au Brésil. L’Amérique centrale et le Brésil ont également bénéficié d’un voyage d’études au Chili, destiné à y observer le fonctionnement du système Crece Contigo.

Au cours de la dernière décennie, l’Amérique latine a affiché une croissance plus forte et un recul de la pauvreté. Mais il lui reste beaucoup à faire. Tant que tous ses habitants ne seront pas en mesure de bénéficier de ces opportunités, la région ne pourra pas exploiter l’intégralité de son potentiel. Or, le renforcement de cette capacité commence dès avant la naissance des enfants.

Avec le soutien de l’Initiative en faveur de la petite enfance, les pays étoffent considérablement les investissements qu’ils consacrent aux enfants. La Banque double la mise avec eux, car elle sait qu’il s’agit d’un pari sans risque.


Auteurs

Keith Hansen

World Bank Country Director for Kenya, Somalia, Rwanda and Uganda

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