Mauvaise nouvelle pour les millions d’Américains adeptes du Super Bowl : le prix des incontournables chicken wings a flambé ! En cause (entre autres), la hausse des cours du maïs, attisés par la sécheresse de l’été dernier, la pire que les États-Unis aient connu depuis 50 ans. D’ailleurs, 2012 aura été l’année la plus chaude jamais enregistrée dans les archives américaines.
Mauvaise nouvelle pour les 850 millions de personnes sous-alimentées dans le monde : les caprices de la météo perturbent la production de produits vivriers à l’échelle planétaire. Des prix alimentaires élevés et instables sont devenus la nouvelle norme. En cause (entre autres), des événements climatiques toujours plus extrêmes.
L’évolution du climat fragilise partout la production vivrière, renchérissant le prix de pratiquement tout ce que nous consommons, du pain aux tortillas… en passant par les ailes de poulet.
Les rendements agricoles ont déjà reculé globalement, de 2 à 3 %, et les experts du climat estiment que pour chaque degré Celsius de hausse de la température moyenne mondiale, la production diminuera d’en moyenne 5 %.
Cela signifie, qu’à terme, il sera de plus en plus dur de nourrir l’humanité chaque année. Sachant que, d’ici 2050, nous devrons produire 70 % d’aliments en plus pour les 9 milliards d’habitants que nous serons alors, le changement climatique vient encore compliquer la donne.
L’agriculture est à l’origine de 32 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Si donc il est établi qu’elle contribue considérablement au dérèglement climatique, on sait aussi qu’elle peut faire partie de la solution. Mais il faut pour cela que nous modifions nos pratiques culturales.
En s’y prenant bien, il est possible d’accroître la productivité agricole et d’aider les agriculteurs à mieux surmonter les sécheresses et les inondations, tout en extrayant le CO2 de l’atmosphère pour le fixer dans le sol. On aurait donc un triple dividende, fruit d’une agriculture qui s’adapte intelligemment au changement climatique.
Concrètement, quelles sont les solutions ? On peut explorer plusieurs pistes concomitamment : remettre au goût du jour des méthodes ancestrales comme le paillage et l’assolement, mieux gérer l’eau et l’élevage, affiner les prévisions météorologiques, mettre en place des assurances récolte et utiliser de nouvelles semences qui, comme le riz « amphibie », survivent plus longtemps sous l’eau ou, comme le maïs tolérant à la sécheresse, parviennent à maturité malgré des précipitations erratiques.
Pour cela, il faut donner aux organismes comme le CGIAR — un partenariat mondial pour la recherche agronomique — les moyens d’intensifier leurs travaux sur les cultures résistantes aux aléas climatiques et sur le rôle de l’agriculture comme puits de carbone.
Pour cela, chacun de nous doit réfléchir davantage aux modes de production alimentaire.
Enfin, pour cela, il faut exploiter nos acquis : cette agriculture « climato-intelligente » est déjà une réalité dans l’ouest du Kenya et sur des millions d’hectares au Brésil, où les cultures sans labour obtiennent des résultats encourageants ; aux États-Unis, de plus en plus de fermiers s’y convertissent aussi progressivement.
Alors oui, l’envolée du prix des ailes de poulet n’est pas une bonne nouvelle pour beaucoup d’Américains. Mais voyons le bon côté des choses : cela devrait inciter de plus en plus de monde à se demander comment l’on peut agir sur l’agriculture pour parvenir à endiguer le changement climatique tout en nourrissant la population mondiale.
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