Cette tribune a été initialement publiée sur le site de Barron's le 2 décembre 2022
À l'heure où le monde est confronté à des perspectives particulièrement difficiles, les envois de fonds constituent une bouée de sauvetage cruciale pour les ménages des pays en développement, en particulier les plus pauvres . Les envois de fonds sont essentiellement de l'argent que les migrants envoient chez eux pour soutenir leur famille. Ils réduisent la pauvreté, améliorent les résultats nutritionnels et sont associés à un poids plus élevé à la naissance et à des taux de scolarisation plus importants pour les enfants des ménages défavorisés. Des études montrent que les envois de fonds aident les ménages bénéficiaires à renforcer leur résilience, par exemple en finançant de meilleurs logements et en se remettant des pertes subies à la suite de catastrophes.
Au niveau macroéconomique, les envois de fonds ont un effet anticyclique, réduisant l’instabilité de la croissance et aidant les pays à s'adapter aux chocs des politiques. Au niveau microéconomique, les envois de fonds permettent aux ménages pauvres d'améliorer les résultats de leurs enfants en matière de santé et d'éducation, d'augmenter leur épargne et de dépenser davantage en biens de consommation durables et en capital humain. Les envois de fonds devraient donc être bien accueillis, encouragés et facilités.
Le flux des envois de fonds en dollars continue de croître face aux conditions économiques défavorables, bien qu'il soit inférieur à l'inflation dans les dernières données. En 2022, les envois de fonds vers les pays à revenu faible et intermédiaire devraient atteindre 626 milliards de dollars, contre 597 milliards de dollars en 2021, dépassant ainsi le flux des investissements directs étrangers et étant trois fois supérieurs au montant de l'aide publique au développement. La taille réelle des envois de fonds, y compris les flux non enregistrés à travers les canaux informels, est encore plus importante. En Afrique subsaharienne, les envois de fonds auraient augmenté de 5,3 % en 2022, après une croissance de 16,4 % en 2021.
Les principaux pays bénéficiaires des envois de fonds sont, comme on pouvait s'y attendre, de grands pays comme la Chine, l'Égypte, l'Inde, le Mexique, le Nigeria et les Philippines . En pourcentage du produit intérieur brut, les principaux bénéficiaires sont des pays plus petits et plus pauvres, en proie à des difficultés économiques et à la fragilité : Liban (38 % du PIB), Samoa (34 %), Tadjikistan (32 %) et Tonga (50 %). Au plus fort de la pandémie de Covid-19, les envois de fonds ont été affectés par les confinements, fermetures et interdictions de voyager, mais seulement brièvement.
La résilience des envois de fonds pendant la pandémie, et lors des épisodes antérieurs de crises financières et de catastrophes naturelles, est attribuable avant tout à la détermination des migrants qui envoient de l'argent chez eux pour aider les familles dans le besoin. Les technologies numériques offrent des services d'envoi de fonds nettement plus rapides et moins coûteux, et l’apparition de la pandémie a entraîné une forte augmentation du recours aux canaux numériques pour les envois de fonds. Pourtant, les canaux numériques représentent moins de 1 % du volume total des transactions, qui reste dominé par les envois de fonds en espèces. Les nouveaux prestataires de services sont confrontés à un accès restreint aux banques correspondantes en raison du coût de mise en conformité des activités de lutte contre le blanchiment d'argent et le terrorisme. Dès le début de la crise de la Covid-19, la Banque mondiale a insisté pour que les services d’envoi de fonds soient reconnus comme essentiels et a préconisé de redoubler d’efforts pour accroître l'inclusion financière des pauvres et améliorer l'accès des nouvelles sociétés de transfert de fonds aux services des banques correspondantes.
La communauté mondiale et le G20 reconnaissent la nécessité d'augmenter le volume des envois de fonds et d’en réduire les coûts. Les objectifs mondiaux visent notamment de réduire les coûts des envois de fonds à 3 % à l’horizon 2030 . Actuellement, le coût moyen d'envoi d'argent vers la plupart des pays africains est plus de deux fois supérieur à ce niveau. En augmentant la concurrence sur les marchés des envois de fonds, en améliorant l'accès aux comptes bancaires et en évitant les partenariats exclusifs entre les sociétés de transfert de fonds et les bureaux de poste nationaux, nous pourrons atteindre cet objectif. Les politiques macroéconomiques prudentes qui évitent la pratique des taux de change multiples dans les pays bénéficiaires peuvent encourager les envois de fonds par les canaux officiels.
La pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ont encore révélé la nécessité de disposer de données fréquentes et actualisées. La Banque mondiale, sous les auspices du Partenariat mondial pour les connaissances sur les migrations et le développement (KNOMAD) et en collaboration avec 45 pays, a lancé le projet RemitStat, un groupe de travail international destiné à améliorer les données sur les flux de transferts de fonds.
Nous sommes déterminés à augmenter les envois de fonds pour les millions de personnes et de communautés pauvres du monde entier. Ils peuvent se révéler essentiels pour accompagner les économies au moment où elles en ont le plus besoin.
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