Publié sur Opinions

Les femmes, les jeunes et les impôts au centre du débat sur les inégalités à Lima

Paraisopolis, São Paulo, Brésil. © Tuca Vieira


​Peut-on mettre fin à l’extrême pauvreté dans un monde aux inégalités extrêmes ? Cette question a suscité un débat animé le 7 octobre, à l’approche des Assemblées annuelles du Groupe de la Banque mondiale et du FMI qui se déroulent cette année à Lima (Pérou). Au menu : la corruption, la fiscalité, les discriminations contre les femmes et la nécessité d’harmoniser les règles du jeu pour les plus jeunes.

L’expérience de l’Amérique latine a occupé une place de choix dans cet événement retransmis en direct sur le web en anglais et en espagnol. Intitulé « Inégalités, opportunités et prospérité » (a) et animé par la journaliste de CNN Español Patricia Janiot (a), le débat a réuni le président du Groupe de la Banque mondiale Jim Yong Kim, la Secrétaire générale ibéro-américaine Rebeca Grynspan (a) et le président d’Oxfam International Juan Alberto Fuentes Knight
 

Pour ce dernier, « il est indispensable de réduire les inégalités pour pouvoir réduire la pauvreté ». Et de citer une étude d’Oxfam selon laquelle les 10 % les plus riches détiennent 71 % du patrimoine des ménages d’Amérique latine ; à ce rythme, a-t-il mis en garde, 51 % de la richesse sera entre les mains des 1 % les plus fortunés.

Selon Jim Yong Kim, on peut lutter contre les inégalités en agissant sur la fiscalité et en la rendant plus équitable et efficace. « J’ai travaillé dans des pays qui sont extrêmement pauvres et où le fardeau de l’impôt pèse essentiellement sur les pauvres », a-t-il souligné. Le Groupe de la Banque mondiale et le FMI se sont d’ailleurs engagés à œuvrer ensemble dans ce domaine, afin d’aider les pays à répartir l’impôt plus équitablement.

Jim Yong Kim a évoqué le fléau des retards de croissance, qui touchent 26 % des enfants dans les pays en développement, les empêchant d’atteindre tout leur potentiel physique et intellectuel. « Ces inégalités doivent être combattues sans délai », a-t-il insisté.

Pour autant, la meilleure voie pour mettre fin à la pauvreté n’est pas clairement balisée, a indiqué le président du Groupe de la Banque mondiale. La croissance économique a été le principal facteur de réduction de l’extrême pauvreté ces 15 dernières années, avec des avancées qui doivent beaucoup à la croissance de la Chine (a), a-t-il expliqué. Quiconque se penche sérieusement sur les faits ne peut que reconnaître que c’est en libérant les forces du marché, mais aussi en tolérant une aggravation des inégalités que la Chine a enregistré une telle croissance, a poursuivi Jim Yong Kim. 

La croissance économique n’est pas une condition suffisante, a-t-il expliqué en soulignant l’importance capitale des investissements dans la santé et l’éducation. « Nous pouvons condamner l’existence de fortes inégalités, mais que faut-il faire avant tout, dans n’importe quelle société ? », s’est interrogé Jim Yong Kim en expliquant qu’il est crucial de trouver des modèles de croissance plus inclusive et, pour cela, de privilégier les 40 % les plus pauvres de la population. « Il faut dépasser les idéologies et s’en remettre aux faits. »

Selon Rebeca Grynspan, les programmes sociaux mis en place en Amérique latine ont aidé les familles pauvres à envoyer leurs enfants à l’école et chez le médecin, et ils ont réduit les inégalités alors qu’ils ne représentent que 1 % des budgets nationaux. Les pays ont connu une très forte mobilité sociale car un nombre plus important d’étudiants ont pu réussir leurs études supérieures. « Ce que nous avons accompli au cours de la dernière décennie est très important », a-t-elle déclaré, mais « nous avons besoin d’une nouvelle trajectoire sociale, d’un dialogue sur l’avenir ».

« Il serait extrêmement risqué de diminuer les investissements dans l’éducation et la santé », a ajouté Rebeca Grynspan. « Si nous n’investissons pas aujourd’hui, ça sera trop tard et nous sacrifierons une génération. Nous devons en appeler aux populations pour préserver des programmes qui les concernent. C’est le message qu’il faut faire passer à tout prix. »

La journaliste Patricia Janiot a soulevé la question des femmes et des populations autochtones, victimes de discriminations, en demandant aux participants comment il serait possible d’améliorer leurs opportunités d’emploi.
Après avoir rappelé que les femmes gagnent 20 % de moins que les hommes en Amérique latine, le président d’Oxfam International a indiqué que 200 millions d’habitants dans la région étaient vulnérables et sous la menace de rebasculer dans la pauvreté. Et de conclure : « Nous devons investir davantage dans la population. »


Auteurs

Donna Barne

Rédactrice pour les sites institutionnels

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