La liste des éléments qui tirent les prix alimentaires à la hausse ne fait que s’allonger. Les aléas météorologiques survenus dans certains grands pays exportateurs de céréales, l’utilisation accrue de produits agricoles dans la fabrication de biocarburants, les restrictions sur les exportations et le faible niveau des stocks mondiaux sont autant de facteurs qui ont contribué à faire monter les prix.
C’est à présent au tour de la hausse des prix des combustibles, conséquence des événements survenus au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, d’alimenter la flambée des prix. L’augmentation de 21 % enregistrée sur les cours du pétrole brut au premier trimestre 2011, par exemple, contribue à la hausse des prix des aliments dans la mesure où elle augmente, entre autres conséquences, le coût des intrants dans l’agriculture.
Selon la dernière édition du Food Price Watch de la Banque mondiale, une publication périodique que nous consacrons au suivi des prix alimentaires et des tendances de la pauvreté, les prix mondiaux des produits alimentaires ont augmenté de 36 % par rapport à leurs niveaux d’il y a un an et, proches de leur pic de 2008, ils demeurent instables. Avec, au premier rang des aliments de base qui crèvent les plafonds : le maïs (hausse des prix : 74 %), le blé (69 %), le soja (36 %) et le sucre (21 %).
Pour certains d’entre nous, la cherté des prix se résumera au fait que nous dépenserons plus au supermarché mais, pour des millions de personnes dans le monde, le danger est autrement plus grand. Les pauvres consacrent la majeure partie de leurs dépenses à la nourriture. Songez à ce que la hausse du prix du maïs représente pour les Mexicains, dont l’alimentation quotidienne repose en grande partie sur les tortillas. Ou bien pensez à une famille mauritanienne qui doit acheter du pain pour pouvoir se nourrir alors que le prix du blé a augmenté de 40 % l’année dernière.
Or, non seulement il est plus difficile pour les populations pauvres de se nourrir mais, de surcroît, il y a plus de pauvres aujourd’hui à cause de la montée des prix alimentaires. Depuis juin dernier, 44 millions de personnes sont tombées sous le seuil de l’extrême pauvreté, soit au-dessous de 1,25 dollar par jour. Nous avons calculé qu’une hausse de 10 % des prix mondiaux risquerait de précipiter dans la pauvreté 10 millions de personnes supplémentaires ; avec une poussée des prix de 30 %, ce serait 34 millions d’êtres humains supplémentaires qui basculeraient dans la pauvreté.
En raison de la volatilité des prix, nous ne pouvons pas savoir avec certitude ce qui va se passer. En revanche, ce que nous pouvons et devons faire, c’est aider et protéger les populations vulnérables.
Nous devons cibler les programmes de nutrition et d’aide sociale sur les plus défavorisés, investir plus et mieux dans l’agriculture, nous attaquer au problème du changement climatique et éliminer les restrictions sur les exportations de céréales en raison de leurs effets sur la hausse des prix dans les pays importateurs. Et il faudrait également mettre à l’ordre du jour l’assouplissement des cibles fixées en matière de biocarburants lorsque les prix alimentaires dépassent certains seuils – dans la mesure où cela pourrait réduire la demande de produits agricoles.
C’est tout cela que signifie l’impératif de faire de l’alimentation la « priorité numéro un ».
Prenez part au débat