Publié sur Opinions

Investir dans la santé des femmes, des enfants et des adolescents pour lutter contre les inégalités entre les sexes

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© Dominic Chavez/Mécanisme de financement mondial (GFF)

Aujourd’hui encore, dans presque tous les pays du monde, les femmes sont moins bien traitées que les hommes  : leurs salaires sont plus faibles, elles sont moins présentes dans les entreprises, la politique et les cercles de décision, et leurs perspectives de vie sont nettement moins favorables que celles des hommes. 

Cette inégalité est préjudiciable à tous. Le monde serait 20 % plus prospère si les femmes étaient aussi bien payées que les hommes . Et en reculant ne serait-ce que de quelques années les mariages précoces dans les pays en développement, la production économique mondiale augmenterait de plus de 500 milliards de dollars par an d’ici à 2030. 

Cependant, ces pertes économiques ne sont pas le volet le plus grave du problème, car dans les pays pauvres, c’est la vie même des femmes et des jeunes filles qui est menacée.

Environ 830 femmes meurent chaque jour de complications pendant la grossesse ou l’accouchement . Ce mois-ci, 450 000 enfants de moins de cinq ans vont mourir. Cette année, 151 millions d’enfants verront leurs chances d’étudier limitées par un retard de croissance dont les conséquences perdureront à l’âge adulte. Et si rien ne change, 150 millions de filles seront mariées à un âge précoce d’ici à 2030.

C’est donc une évidence : nous devons accélérer les progrès pour qu’aucune femme ni aucun enfant ne soit laissé de côté.

Nous devons permettre aux femmes d’espacer et de planifier leurs grossesses comme elles l’entendent, promouvoir l’accouchement sans risque et l’allaitement, et soutenir d’autres services essentiels en matière de santé et de nutrition . La santé est l’une des clés de la réussite scolaire et d’une participation pleine et entière au marché du travail.

Mais il faut faire preuve d’audace, penser autrement et innover pour parvenir à transformer la vie des femmes, des enfants et des adolescent(e)s. Et, pour commencer, leur vie doit être la première priorité du développement. Ce qui signifie concrètement que les bailleurs de fonds internationaux et les autorités des pays doivent travailler de concert pour accroître les financements et que la communauté mondiale doit s’engager en faveur de la vie de chaque femme, enfant et adolescent(e).

La bonne nouvelle, c’est l’existence du Mécanisme de financement mondial (GFF), dont le but est d’améliorer la santé et les chances des femmes et des enfants dans les pays les plus pauvres.  Dans 27 pays déjà, le GFF renforce la prestation de services de qualité pendant la grossesse, l’accouchement, la petite enfance et l’adolescence en incitant les gouvernements à accorder la priorité aux dépenses de santé et de nutrition. Cette semaine, des chefs d’État et des ministres du monde entier se sont réunis à Oslo pour tracer l’avenir du GFF afin d’intensifier son action pour combattre les effets dévastateurs des inégalités entre hommes et femmes sur la santé.

Dans ce cadre, dix nouveaux investisseurs (Allemagne, Burkina Faso, Commission européenne, Côte d’Ivoire, Danemark, Japon, Laerdal Global Health, Pays-Bas, Qatar et un donateur anonyme) ont annoncé à Oslo une contribution de plus d’un milliard de dollars au GFF, qui sera réunie aux 7,5 milliards de dollars supplémentaires alloués par la Banque mondiale (IDA et BIRD) à la santé et la nutrition des femmes, des enfants et des adolescent(e)s.

Les premiers résultats de l’action du GFF sont encourageants. Une récente étude publiée dans la revue BMJ Global Health estime qu’avec seulement 2,6 milliards de dollars de financements du GFF, il serait possible de mobiliser 75 milliards supplémentaires d’ici 2030, dont 70 % seraient constitués par les ressources nationales des pays. Cette étude a aussi montré qu’au moins 35 millions de vies pourraient être sauvées d’ici 2030 si les investissements mondiaux en faveur de la santé maternelle et infantile continuent de croître au rythme actuel.

Il faut souligner les trois raisons qui sous-tendent le succès rapide du GFF. D’abord, ce mécanisme laisse les gouvernements nationaux aux commandes, tout en leur apportant un soutien financier et technique pour les aider à concrétiser leurs priorités, en fonction de ce qu’ils savent être efficace sur le terrain. Ensuite, le GFF aide les gouvernements à orienter des financements provenant de diverses sources vers un unique ensemble d’objectifs. Et comme ces financements incluent des ressources propres des pays, ceux-ci sont directement parties prenantes.

Enfin, le GFF met fortement l’accent sur les résultats. Ainsi, les ministres de la Santé ont davantage d’arguments pour plaider en faveur de l’attribution d’une plus grande part du budget national. Le cas du Cameroun est un exemple parfait : depuis qu’il travaille avec le GFF, le gouvernement s’est engagé à augmenter considérablement le budget consacré aux soins de santé primaires et secondaires, pour le porter de 8 % en 2017 à 20 % en 2020. Cette augmentation de 150 % du financement public de la santé permettra d’améliorer l’accès des mères et des enfants à des services de santé sûrs et de qualité.

Autre exemple : dans le nord-est du Nigéria, une région en proie à des conflits prolongés, le soutien du GFF a contribué au rétablissement des services de santé et de nutrition maternelle, néonatale et infantile. Avec des financements conditionnés aux résultats de santé, les autorités locales accomplissent des progrès rapides : selon les estimations, le taux d’accouchements assistés par des sages-femmes qualifiées est passé de 5 % à 40 %.

À l’occasion de la reconstitution des ressources du GFF, aux côtés des représentants de la Fondation Bill et Melinda Gates, des gouvernements de Norvège et du Burkina Faso, de ministres de la Santé et de nombreux autres partenaires, j’ai appelé à mettre fin aux inégalités dont souffrent les femmes, les enfants et les adolescent(e)s en matière de santé. Le milliard de dollars que nous avons levé et les nouveaux partenaires que nous avons accueillis cette semaine sont deux grands pas en avant dans ce sens. Je ne peux qu’inciter encore d’autres partenaires à se joindre à nos efforts pour que chaque femme, enfant et adolescent(e) puisse s’épanouir pleinement. 

Ensemble, nous pouvons investir dans les femmes et les enfants des pays pauvres et renforcer la capacité de ces États à financer suffisamment et durablement la santé de leur population.  Ensemble, nous pouvons réaliser des avancées sans précédent vers un monde plus juste et plus prospère. 

En savoir plus :

Les dirigeants mondiaux engagent 1 milliard d’US$ pour transformer la santé et la nutrition des femmes, des enfants et des adolescents les plus pauvres du monde
 
The biggest feminist fund (that you’ve probably never heard of) raises $1 billion to boost health of women and children worldwide
 

Auteurs

Kristalina Georgieva

Ex-directrice générale de la Banque mondiale

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