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Il y a deux ans, l’organisation Room to Read nous interpellait dans une vidéo (a) percutante destinée à montrer combien il est difficile de s’en sortir dans la vie si l’on ne sait pas lire. La démonstration était irréfutable. Il faut savoir lire pour travailler, mais aussi communiquer, suivre des indications, prendre des médicaments...
Or, comme nous le rappelait aussi la vidéo, un adulte sur sept dans le monde ne sait pas lire, plus de 250 millions d’enfants en âge d’aller à l’école ne savent pas lire et près de 57 millions d’enfants ne sont pas scolarisés.
L’alphabétisation permet à un individu d’accéder à l’information, d’être plus productif et de s’épanouir. Au niveau national, elle est indispensable à la prospérité du pays. Des recherches (a) montrent en effet que l’alphabétisation précoce est un cap que les pays doivent franchir pour progresser économiquement.
Selon Kaushik Basu (a), économiste en chef de la Banque mondiale, la présence au sein d’un ménage d’une personne sachant lire et écrire crée une externalité positive — une sorte de bien collectif — pour les autres membres de ce ménage. L’alphabétisation est importante pour la diffusion des nouvelles technologies, comme dans l’agriculture, où les retombées (a) économiques peuvent être substantielles.
Mais comment vaincre l’analphabétisme, alors que les campagnes d’alphabétisation menées par le passé ont produit des résultats mitigés ? Nous cernons mieux aujourd’hui les actions à mener pour favoriser une maîtrise précoce de la lecture. La première d’entre elles consiste tout simplement à évaluer tôt ces compétences. Or, la plupart des évaluations revêtent la forme de tests classiques sur papier, qui supposent que l’élève sait lire et écrire, et les évaluations à grande échelle ( PISA, PIRLS, TIMSS) (a) ne s’intéressent pas aux élèves avant la quatrième année d’école. Pour ceux qui ont du mal à lire, les cours de rattrapage arrivent souvent trop tard car, pour qu’ils soient efficaces, ces cours doivent être dispensés le plus tôt possible.
On a recours désormais à de nouveaux tests, qui évaluent les principales compétences nécessaires à l’apprentissage de la lecture durant les premières années de l’école primaire (de la première à la troisième année). Leurs résultats nous permettent d’en savoir un peu plus sur les niveaux d’aisance en lecture dans de nombreux pays.
L’exemple de la Papouasie-Nouvelle Guinée
En Papouasie-Nouvelle Guinée, des programmes pilotes axés sur l’apprentissage précoce de la lecture montrent que les capacités en lecture des élèves s’améliorent, et mettent en évidence l’efficacité d’une approche mieux intégrée de la formation continue. Dans deux provinces, le projet READ PNG (a), dont le coût s’élève à 19,2 millions de dollars, a significativement relevé le niveau en lecture des élèves du primaire.
On constate d’ores et déjà que la distribution de livres et la formation des enseignants améliorent les compétences des élèves en lecture et en écriture : dans les Hautes-Terres occidentales, en huit mois à peine, la proportion d’enfants sachant lire est passée de 4 % seulement à plus de 25 %. Plus d’un quart des élèves des écoles pilotes savent désormais lire, ce qui atteste d’une nette amélioration de la qualité de l’enseignement depuis le début du projet.
Cette expérience a mis en lumière les forces et les faiblesses existantes, dans le but de promouvoir l’apprentissage de la lecture dans les petites classes au niveau des établissements scolaires et du système. Les interventions s’appuyaient sur un programme intégré qui a porté ses fruits.
Ce projet est une première réussite, et nous savons désormais ce qui fonctionne dans ce pays. Il reste maintenant à généraliser ces bons résultats à l’ensemble des élèves du primaire. L’amélioration de leurs compétences en lecture leur permettra d’apprendre d’autres matières et de poursuivre leurs études plus tard.
Au-delà des petites classes
Qu’en est-il des scores à l’école primaire et dans les niveaux de scolarité supérieurs ? Il faudrait certainement beaucoup plus de temps pour les mesurer et l’intervention risque fort d’être plus complexe et plus coûteuse.
Pas forcément. On constate qu’il est possible de faire progresser rapidement les scores pour la lecture, même à des niveaux de scolarité plus élevés. De la troisième à la sixième année d’école, une intervention simple et peu coûteuse, mise en œuvre dans l’État de Colima, au Mexique, a permis d’améliorer rapidement l’apprentissage. Elle consistait à communiquer des informations sur les performances aux écoles enregistrant des scores inférieurs à la moyenne. Cette intervention (a) a amélioré de 0,12 écart-type les scores obtenus aux tests, en un temps record. Lorsque les élèves, les enseignants et les parents savent que les scores obtenus dans leur école sont faibles, ils sont incités à « s’auto-évaluer », ce qui contribuera à améliorer les résultats scolaires.
Au Pakistan, la distribution de bulletins mentionnant les résultats de l’école et des élèves aux tests a amélioré les scores de 0,11 écart-type sur un an. Cette tendance s’est poursuivie pendant deux ans après l’ intervention (a). La diffusion de ce type d’information facilite la comparaison des établissements, augmente l'efficacité du marché et accroît le bien-être des enfants grâce à l’amélioration des résultats et de la scolarisation.
Au-delà du primaire
Il doit cependant être encore plus difficile d’améliorer les compétences en lecture à des niveaux de scolarité plus élevés, comme dans le secondaire par exemple.
La Pologne a restructuré son système éducatif afin de repousser d’un an l’orientation vers l’enseignement professionnel. Cette année correspond à l’âge des enfants qui ont passé le test PISA sur la période 2000–2006. C’est grâce à cette réforme que la Pologne a vu ses résultats aux tests internationaux s’améliorer fortement. Pour la lecture, les scores ont enregistré une progression constante, passant de 479 à 508.
D’après son impact à long terme sur les scores aux tests, nous estimons (a) que la réforme a amélioré d’environ 100 points (soit un écart-type entier) les scores des étudiants susceptibles de suivre un enseignement professionnel (les principaux bénéficiaires) .
Faire ce qu’il est possible
Il est possible d’améliorer les capacités en lecture, même en très peu de temps, mais nous savons qu’il faut agir dès les toutes premières années d’école. Des données montrent également que des changements rapides peuvent se produire dans le primaire et dans le premier cycle du secondaire.
Il faut aller au-delà de la phase pilote et lancer une réforme nationale de grande envergure. Seule une réforme nationale permettra aux pays de dépasser la simple amélioration, aussi significative soit-elle, au niveau local (comme en Papouasie-Nouvelle-Guinée) pour bénéficier d’une transformation systémique nationale (comme en Pologne).
Si les interventions seront forcément différentes d’un pays à l’autre, le plus important est de ne pas oublier que, si le changement est possible, il faut le mesurer, l’évaluer et en tirer des enseignements.
Suivez Harry Anthony Patrinos (a) sur Twitter à @hpatrinos (a).
Pour en savoir davantage sur les activités du Groupe de la Banque mondiale dans le secteur de l’éducation, rendez-vous sur Twitter (a) et Flipboard (a) .
Lisez les billets consacrés aux tests PISA (a) .
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