Publié sur Opinions

Premier jour officiel de travail

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Après plusieurs mois de trajets entre New Haven et Washington, ponctués de moments d’égarement récurrents sur les quais de la gare new-yorkaise de Penn Station, ne sachant plus si je devais prendre le train vers le nord ou vers le sud, me voilà ravie de prendre officiellement mes fonctions d’économiste en chef de la Banque mondiale. Face à des défis nombreux et exaltants, je suis sincèrement déterminée à mettre mon expérience et tous mes efforts au service de la mission de la Banque.

Même si le terme d’accélération exponentielle peut paraître galvaudé, il n’en demeure pas moins que nous sommes entrés dans un processus de changement toujours plus rapide qui remet continuellement en cause nos certitudes dans bien des domaines. Les pays n’ont jamais été aussi tributaires les uns des autres. Comme le Rapport sur le développement dans le monde 2019 - Le travail en mutation (a) l’a mis en évidence, les innovations technologiques sont l’un des facteurs à l’origine de cette nouvelle donne.
 
Dans l’édition 2020 du même rapport, nous analyserons les conséquences des évolutions de la mondialisation pour le développement. Je souhaite que cette réflexion, qui a déjà débuté, soit ancrée dans la réalité d’aujourd’hui. Notre point de départ réside précisément dans le niveau d’interdépendance inédit des pays. Cette relation a toujours existé, mais le commerce international est aujourd’hui fondamentalement différent, sur le plan de la qualité comme de la quantité, de ce qu’il était au moment du dernier Rapport sur le développement dans le monde consacré à cette question, L’industrialisation et le commerce extérieur, il y a trente ans. 

Entre le début des années 90 et la moitié des années 2000, la croissance des échanges internationaux a été deux fois supérieure à celle du revenu. La baisse des tarifs douaniers et les progrès considérables des technologies de production, de communication et de transport ont conduit à l’émergence et au développement des chaînes de valeur mondiales. Résultat : la production est aujourd’hui géographiquement fragmentée. Les pièces produites quelque part sont expédiées dans le monde entier et franchissent souvent plusieurs frontières.

Le Rapport sur le développement dans le monde 2020 s’attachera à comprendre pourquoi les chaînes de valeur mondiale se sont développées dans certains secteurs et certaines régions du monde, tandis que d’autres en ont été exclus. Nous analyserons l’impact de ces filières sur la croissance, les inégalités et la pauvreté, et nous nous pencherons sur la manière dont les nouvelles technologies et les politiques commerciales incitent à produire plus près. Enfin, nous nous demanderons comment les politiques nationales peuvent favoriser un développement durable et si la coopération commerciale internationale peut venir appuyer une croissance inclusive.

Aujourd’hui, les usines des pays à revenu faible ou intermédiaire participent pleinement aux réseaux de production internationaux. Cette intégration peut être largement bénéfique sur le plan du développement, mais elle est également source de difficultés. Car la concurrence est rude. Si l’Asie de l’Est, l’Europe centrale et orientale, le Mexique et certaines régions d’Amérique centrale sont de plus en plus intégrés dans les chaînes de valeur mondiales, nombre de pays en Afrique, en Amérique du Sud, au Moyen-Orient et en Asie du Sud n’y contribuent que faiblement.

Parce que le bon fonctionnement des chaînes de valeur mondiales repose sur une main-d’œuvre qualifiée, la technologie et la logistique, on assiste à une intensification de la « prime à la compétence » dans les économies en développement comme dans les pays développés. Les entreprises s’emploient avec de plus en plus de sophistication à exploiter les technologies numériques, délaissant les équipements gros consommateurs de main-d’œuvre au profit de processus automatisés. Certaines activités exportatrices dans les pays en développement concernent des secteurs qui connaissent une automatisation rapide chez leurs partenaires commerciaux, ce qui fait peser un risque accru de disruption sur le marché du travail.

Avec ce billet, j’espère vous avoir donné un avant-gout des thématiques que nous aborderons dans le prochain Rapport sur le développement dans le monde, et avoir montré la manière dont celui-ci s’inscrit dans la continuité du rapport 2019, mais aussi de l’édition 2018, Apprendre pour réaliser la promesse de l’éducation. La profondeur d’analyse dont fait preuve la Banque mondiale est le socle sur lequel repose son action dans le monde, et j’assume avec honneur la charge de poursuivre cette réussiteJe me réjouis à la perspective de discuter et travailler dans ce sens avec vous tous.


Auteurs

Pinelopi Goldberg

Economiste en chef, Groupe de la Banque mondiale

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