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Savez-vous que la troisième Semaine mondiale des Nations Unies pour la sécurité routière a eu lieu début mai ? Souvent, comme pour tout ce qui est omniprésent dans notre vie, nous ne prêtons guère d’attention aux accidents de la circulation mortels ou graves qui font régulièrement l’actualité locale. Cependant, plusieurs actions récentes invitent les institutions internationales, les organisations non gouvernementales, le secteur privé et d’autres partenaires à lutter ensemble contre la première cause de mortalité des jeunes dans le monde : les accidents de la route (a).
À la fin du mois d’avril, le Secrétaire général des Nations Unies a annoncé la nomination d’un Envoyé spécial pour la sécurité routière (a), ce qui témoigne de l’attention croissante portée à ce sujet. Cette année, la Semaine des Nations Unies pour la sécurité routière a eu pour thème la protection des enfants, mais c’est la sécurité des personnes de tous âges qui est en jeu ; et tout particulièrement dans les pays en développement, où se produisent chaque année 90 % des accidents de la route.
Le Royaume-Uni, les Pays-Bas et la Suède sont les champions de la sécurité routière. Alors que s’achève cette année la première moitié de la Décennie d’action des Nations Unies pour la sécurité routière 2011-2020, les professionnels s’emploient à diffuser encore plus rapidement les enseignements tirés de l’expérience de ces trois pays (et d’autres) dans l’ensemble du monde en développement. Rien que dans les 80 pays qui affichent le revenu le plus faible, le coût total estimé des décès et des traumatismes graves imputables aux accidents de la route est vertigineux : 220 milliards de dollars par an (a). Il représente, en moyenne, entre 3 et 5 % du PIB mondial.
Il est urgent d’agir si l’on veut éviter que les accidents de la circulation ne deviennent, d’après les prévisions, la cinquième cause de mortalité dans le monde en 2030. Il ne faut probablement pas attendre LE moment propice pour inclure systématiquement la sécurité routière dans les politiques de développement, mais plutôt engager une série d’actions pérennes dans différents domaines, au niveau national, régional et mondial. C’est ainsi que trois grandes avancées qui répondent aux aspirations mondiales ont été enregistrées en mars dernier.
Une initiative pour inclure la sécurité routière dans les prochains Objectifs de développement durable des Nations Unies
Des avancées ont été réalisées lors d’une réunion technique et de sensibilisation organisée par les Nations Unies (a) dans le but de discuter de l’enjeu crucial que constitue le projet d’intégrer la sécurité routière dans les futurs Objectifs de développement durable (ODD) mondiaux (a). La sécurité routière est en effet actuellement traitée dans la cible 3.6 (d’ici 2020, réduire de moitié la mortalité et les traumatismes imputables aux accidents de la route) et dans la cible 11.2 (d’ici 2030, fournir des systèmes de transport sûrs).
L’adoption des cibles relatives à la sécurité routière constituerait une étape essentielle. La Banque mondiale et ses partenaires comptent parmi les plus fervents partisans de l’approche Safe Systems (a), c’est-à-dire de la conception de systèmes de transport sûrs pour les usagers de la route. Le déploiement de mesures destinées à atteindre ces cibles reposera très largement sur cette approche.
Une mobilisation croissante de la société civile pour renforcer les actions de sensibilisation à la sécurité routière
C’est également en mars 2015 que s’est tenue la quatrième réunion mondiale de l’Alliance mondiale des ONG pour la sécurité routière (a), première organisation de la société civile à mener des actions de sensibilisation à la sécurité routière. Avec plus de 140 ONG membres dans plus de 90 pays, l’Alliance s’attache à diffuser les meilleures pratiques et à défendre collectivement les droits des victimes d’accidents de la circulation. À l’issue de cette réunion, l’Inde, qui fait état chaque année de quelque 130 000 décès dus aux accidents de la route, a annoncé la création d’une Alliance nationale des ONG pour la sécurité routière.
Une avancée vers l’adoption de normes de sécurité pour les voitures dans les pays en développement
En mars dernier, une autre avancée a concerné le secteur automobile. Global NCAP (Programme mondial d’évaluation des nouveaux modèles de voitures) a publié un document de référence intitulé Democratizing Car Safety: Road Map for Safer Cars 2020 (a). En 2013, la production mondiale de véhicules s’est répartie quasiment à parts égales entre les pays à revenu élevé (51 %) et le reste du monde (49 %). Ces dernières années, Global NCAP s’est fait connaître en réalisant des crash tests (et des évaluations de la sécurité) sur des véhicules importés dans les pays en développement et sur des véhicules produits dans ces pays. Dans certains cas, ces tests révèlent que des modèles très appréciés et sûrs qui sont commercialisés dans les pays à revenu élevé perdent ces caractéristiques dès lors qu’ils sont vendus dans d’autres parties du monde.
Global NCAP attire l’attention des consommateurs sur de nombreuses marques de premier plan, telles que Volkswagen, Nissan et Tata. Il propose une stratégie en plusieurs étapes qui vise à permettre aux États membres des Nations Unies de se conformer aux normes minimum de sécurité des véhicules et de renforcer les moyens dont disposent les laboratoires nationaux pour contrôler la sécurité des véhicules et pour en rendre compte.
Agir pour la sécurité routière en 2015 et au-delà
Nous n’en sommes pas encore, avec ces mesures, prises individuellement voire même collectivement, au « point de bascule » qui changera irréversiblement la donne. Mais ces avancées annoncent les actions et les priorités nouvelles sur lesquelles portera la deuxième plus importante conférence ministérielle mondiale (a) sur la sécurité routière, qui aura lieu en novembre prochain au Brésil. Si les pays veulent atteindre les cibles des ODD relatives à la sécurité routière, ils devront étoffer leurs capacités de gestion, ce qui nécessitera, au niveau national, davantage de contrôles et une volonté politique plus forte pour faire de la sécurité routière une priorité.
La situation semble d’ailleurs évoluer dans le bon sens : l’idée selon laquelle l’« éducation » des usagers de la route serait la panacée, au détriment des efforts visant à améliorer la sécurité de l’infrastructure et des véhicules et renforcer les contrôles de police sur les routes, ne semble plus désormais privilégiée. Il faudra ainsi mettre en place des mesures complémentaires pour la collecte de données, les soins aux accidentés de la route et la réalisation de campagnes ciblées, mais également déployer d’importants efforts de suivi et d’évaluation. Ensemble, ces actions permettront de changer les comportements et de sauver des vies. Les pays doivent pouvoir intervenir sur tous ces fronts. Certains relèvent déjà ce défi institutionnel crucial en finançant des organismes qui sont à même de coordonner les résultats (a).
En outre, les pays à revenu faible ou intermédiaire ont besoin de l’aide étrangère pour passer à une politique de sécurité routière durable. Créé il y a dix ans par la Banque, le Fonds mondial pour la sécurité routière (a) est l’un des premiers du genre à élaborer de nouveaux outils et à proposer de nouveaux projets de renforcement des capacités afin d’encourager les pays en développement à investir dans la sécurité routière.
La Semaine des Nations Unies pour la sécurité routière a montré l’importance d’assurer la sécurité des générations actuelles et des jeunes dans un monde en constante mutation. Pour que les personnes puissent se déplacer en toute sécurité et contribuer à un avenir plus prospère, les organisations qui s’efforcent de mettre en avant cette composante du développement qui est encore relativement négligée s’attachent, en procédant par étapes, à accélérer la mise en œuvre de solutions.
Mars 2015 a été un bon mois. Mais combien de morts et de blessés pourront être évités à ce rythme ? Ne pourrait-on pas redoubler d’efforts dès aujourd’hui pour éviter l’inévitable ?
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