C'est arrivé dans mon village, et c'est pourquoi il faut mettre fin au mariage des enfants en Éthiopie

Handare est une fille de mon quartier avec qui j'avais l'habitude de jouer et d'étudier. Elle voulait devenir médecin, une ambition répandue chez les meilleurs élèves comme elle.  

En janvier 2008, Handare et moi avions 14 ans à l'époque et nous sommes rentrés chez nous après une longue journée à l'école. Il y avait une réunion de famille chez Handare, ce qui était inhabituel en dehors de la période des fêtes. Toute la famille et les proches préparaient à manger et à boire. Handare a pleuré quand sa mère lui a annoncé qu'elle allait se marier le dimanche suivant avec un homme qu'elle n'avait jamais rencontré auparavant. Elle n’a pas eu le choix, sa famille lui a imposé ce mariage.  

Aujourd'hui, Handare est une femme au foyer qui s'efforce de nourrir ses cinq enfants malgré des problèmes de santé. Cette histoire n'est pas seulement celle d'Handare. Malheureusement, c'est aussi celle de beaucoup de jeunes Éthiopiennes. Selon un rapport de l'UNICEF (a), l'Éthiopie était en 2018 l'un des pays d'Afrique où la prévalence du mariage des enfants était la plus forte. 

Le rêve d'Handare de devenir médecin a tourné court. Elle en a été très affectée, car elle aspirait à une vie meilleure. Mais c'est aussi une occasion perdue pour l'Éthiopie, étant donné le nombre très réduit de médecins dans le pays. Si aucune décision énergique n'est prise pour mettre fin aux mariages précoces, de nombreuses jeunes filles vivront une histoire similaire à celle d'Handare et le mariage des enfants restera l'un des principaux obstacles au développement social et économique de l'Éthiopie. Voici quelques exemples de mesures qui pourraient aider le pays à mettre fin à ce fléau : 

• Comprendre le problème et le prendre au sérieux. La première chose à faire, c'est de comprendre le problème et ses conséquences socio-économiques. Si les mariages précoces sont toujours aussi fréquents en Éthiopie, c'est parce qu'ils ne sont pas perçus comme un problème et les parties prenantes ne se sentent pas concernées. De ce fait, elles ne sont pas en mesure de considérer le mariage des enfants comme un danger imminent qui prive les jeunes filles d'un avenir prometteur et qui pèse lourdement sur l'économie en général. Par conséquent, mieux comprendre en quoi le mariage des enfants est un problème et mieux sensibiliser la population à ses conséquences pourrait constituer un grand pas en avant pour s'attaquer aux causes des mariages précoces. 

• Relever l'âge légal du mariage. La plupart des pays ont fixé l'âge minimum du mariage à 18 ans. Si la loi exige un âge supérieur à 18 ans, la société s'efforcera de respecter cette règle, ce qui fera reculer la culture du mariage à un âge précoce.   

• Travailler ensemble. Toutes les parties prenantes — pouvoirs publics et acteurs privés — doivent coopérer, définir un plan stratégique commun et se répartir la responsabilité de sa mise en œuvre.  

• Changer les valeurs et les normes. Il faut faire évoluer les valeurs et les règles d'une société qui encourage le mariage des enfants. Travailler avec les chefs religieux, les anciens des villages, les parents, les hommes, les garçons et les filles pour les sensibiliser aux effets néfastes du mariage des enfants est un moyen de faire évoluer ces valeurs et ces normes sociales.