J’ai lu un jour un rapport du McKinsey Global Institute qui prédisait que les robots pourraient remplacer 800 millions d’emplois d’ici 2030 ; l’idée me donna des sueurs froides. Mais plutôt que d’y voir une menace, cela m’a poussée à redoubler d’efforts dans mon éducation et ma formation numérique afin de rester adaptée à l’économie de l’avenir.
Mais je n’ai pas réussi cela toute seule. C’est une solide communauté d’entrepreneuriat technologique, formée de jeunes innovateurs et dirigée par eux, qui a constitué le carburant de mon voyage dans le monde numérique. Son modèle de fonctionnement illustre ce dont tous les jeunes Africains ont besoin pour affûter leurs compétences informatiques.
Jusqu’à aujourd’hui, le Cameroun ne connaît qu’une timide utilisation des systèmes numériques, en raison de l’ignorance généralisée et du manque de ressources et d’infrastructures de base : manque d’accès abordable à Internet, d’ordinateurs et d’alimentation électrique régulière. Aussi, pour la jeunesse, les opportunités d’accéder au numérique et d’acquérir les compétences qui vont avec sont‑elles limitées.
La communauté Silicon Mountain, ainsi nommée car elle se situe au pied du mont Fako, à Buéa, au Cameroun, cherche à s’attaquer à cette ignorance tout en poussant les décideurs à créer et maintenir un environnement favorable. À travers un système de parrainage, elle met en lumière et crée des opportunités dans le monde numérique, entraîne les jeunes à développer des innovations digitales abordables et recherche des partenariats pour démontrer les compétences informatiques acquises.
À condition d’apporter les ressources exigées, ce modèle peut être répliqué et adapté, ce qui suppose :
- Un parrainage vertical : des groupes de développeurs dirigés par des jeunes, comme des clubs universitaires, pourraient être constitués dans les instituts d’enseignement supérieur, leurs membres étant en contact avec des parrains dans leur filière spécifique. Les parrains pourraient être des jeunes plus expérimentés ou des enseignants ayant des connaissances en technologies numériques. Les étudiants parrainés seraient en contact avec les opportunités qu’apporte la technologie dans ce domaine. Guidés par des ressources d’apprentissage, ils mettraient en place des innovations abordables adaptées à des environnements spécifiques. Les parrains susciteront passion, confiance, esprit d’équipe et créativité en confiant à leurs pupilles des tâches à réaliser en un temps donné.
- Une formation : chaque groupe désignerait les horaires et le lieu de travail qui lui conviennent, concevrait des objectifs assortis d’un délai, serait encadré par un superviseur, et se verrait attribuer le nombre minimum correspondant d’heures de codage, qu’il lui faudra atteindre pour être autorisé à participer à des compétitions. Des événements mensuels ou annuels, comme un camp d’entraînement ou une semaine consacrée au codage, pourront être dédiés à des compétitions entre clubs. Les gagnants recevront des prix sous forme de postes de stagiaires, de bourses ou de formations. Des débats bimensuels destinés à faire part de ses difficultés, se motiver réciproquement et discuter de méthodes d’amélioration seraient la garantie d’un engagement durable.
- Des stages : Afin de pratiquer ce qui a été appris, un partenariat avec des institutions serait profitable aussi bien aux étudiants qu’à ces dernières, à travers des stages ou le développement de leurs services numériques. Par exemple, établir un partenariat avec des écoles permettra de numériser le paiement des frais de scolarité. Les participants pourront également être chargés de transmettre aux élèves du secondaire des compétences informatiques de base. Un bon exemple est le programme ICT4Kids qui, pendant les vacances scolaires, enseigne aux enfants comment développer des jeux simples et faire des dessins animés.
En tant que membre des « Women Techmakers », la branche féminine de Silicon Mountain, le fait d’intégrer les technologies numériques à un service de soins de santé primaires a apporté une dimension passionnante à ma carrière. Voilà pourquoi je pense que préparer les jeunes Africains à la quatrième révolution industrielle passera par la mise en place d’un environnement favorable ainsi que d’un modèle de formation semblable à celui que j’ai proposé.
Prenez part au débat