Ils voulaient juste profiter de leur enfance et ne demandaient qu’un peu d’aide pour exprimer tout leur potentiel. Quand ils seraient grands, ils seraient médecins, enseignants… Mais leur vie a pris un cours radicalement différent. Mariés et à la tête d’une famille avant leurs 18 ans, ils n’ont pas eu leur mot à dire dans ces décisions qui détermineront toute leur vie ainsi que le développement socio-économique de leur pays. Ils ont été privés de leurs droits. Leurs rêves ont été brisés…
À Madagascar, tel est le sort de pratiquement 42 % des filles et 13 % des garçons âgés de 20 à 24 ans (chiffres publiés en 2018 dans le rapport du Fonds des Nations Unies pour l’enfance). Malgré le nouvel âge légal du mariage, repoussé par le gouvernement à 18 ans en 2017, les mariages précoces se perpétuent sous différentes formes selon les communautés : la coutume du moletry, qui consiste à donner en mariage une fillette à un homme plus âgé en échange d’argent ou d’un cadeau à la famille de la promise, a toujours cours. Tout comme le Tsenan’Ampela, ce marché aux filles pour attirer un époux et arranger un mariage. Mais tout espoir n’est pas perdu…
La fin des mariages précoces est possible, à condition que les familles, les écoles, la société et les pouvoirs publics collaborent. Car tout commence au niveau de la famille et de la société. Si, au lieu de les considérer comme un fardeau, les familles et la société pensaient aux filles comme à une bénédiction et un puissant vecteur de changement ; si elles prenaient conscience qu’un mariage précoce n’est pas une solution pour garantir leur avenir ni l’alternative obligée au contrôle de leur sexualité et de leur fécondité, alors cette pratique délétère n’aurait plus sa place chez nous.
Il suffit de voir les étoiles briller dans les yeux des enfants quand ils parlent de leurs rêves pour avoir envie de les encourager et les pousser à étudier, au lieu de les marier. Si les familles et la société comprenaient qu’un enfant qui exprime une opinion et fait ses propres choix ne leur manque pas de respect, alors elles pourraient les inciter à prendre des initiatives.
Pour que les choses changent, il faut dialoguer avec les chefs religieux et traditionnels afin de les sensibiliser aux conséquences néfastes des mariages d’enfants et faire évoluer les normes régissant le statut des filles, car ces figures jouent un rôle clé dans le comportement de leurs communautés. Mais il faut aussi convaincre les parents d’envoyer leurs enfants à l’école. Le gouvernement devrait avoir pour priorité de rendre les écoles plus accessibles et inciter les enfants à y rester plus longtemps en leur offrant un environnement adapté capable d’améliorer leurs apprentissages sans rien sacrifier rien à l’indispensable plaisir du jeu.
Les écoles, qui se trouvent au cœur de l’espace éducatif et jouent un rôle décisif pour aider les enfants à réfléchir, ne doivent pas uniquement les préparer à la vie active mais bien au « monde réel », en leur donnant des informations sur la santé sexuelle et de la reproduction, la citoyenneté et les droits humains et des clés pour maîtriser les enjeux financiers. La société civile doit aussi se mobiliser, à travers des actions capables d’agir directement ou indirectement sur la disparition des mariages d’enfants.
Pour notre association Liberty 32, les enfants sont des agents de changement. À travers notre programme i-beazana de mentorat en leadership, citoyenneté et paix destiné aux enfants vulnérables, nous leur faisons acquérir tous les outils nécessaires pour participer pleinement à la vie publique et défendre leurs droits. Ensemble, nous pouvons changer les choses.
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