Intégration régionale : une passerelle vers la prospérité économique pour la jeunesse africaine

Cette page en:
Students on the campus of Gaston Berger University (UGB) in Saint Louis, Senegal. Students on the campus of Gaston Berger University (UGB) in Saint Louis, Senegal.

Depuis mon retour au Cameroun il y a bientôt un an, les jeunes que je rencontre expriment tous la même préoccupation : auront-ils accès à des emplois de qualité et des opportunités économiques qui leur permettront de réaliser pleinement leur potentiel et surtout, de réaliser des investissements pour eux-mêmes, leurs familles ainsi que leurs communautés ?

Ces inquiétudes ne sont pas spécifiques à la jeunesse camerounaise ; elles sont partagées par la majorité des jeunes en Afrique. Elles sous-tendent aussi les principales conclusions de la dernière édition du rapport Africa's Pulse de la Banque mondiale qui analyse l'avenir du travail en Afrique, en particulier au regard de la reprise économique post-COVID-19.

La pandémie de coronavirus ainsi que ses impacts sociaux et économiques pour de nombreux pays africains ont à nouveau rappelé que le chômage des jeunes est l'un des défis les plus urgents à relever pour les gouvernements africains. Le fait est qu’en l’absence de solutions viables pour les millions de jeunes sans emploi, les plus qualifiés et privilégiés viendront grossir les rangs des candidats au départ , tandis que les plus vulnérables et marginalisés seront tentés de rejoindre des groupes extrémistes radicaux. C'est pourquoi il est plus que jamais impératif que les collectifs de jeunes Africains, les gouvernements, le secteur privé et les organisations de la société civile unissent leurs efforts pour assurer des perspectives d'emploi de qualité aux jeunes de tout le continent.

L’intégration régionale en Afrique : quelles opportunités pour les jeunes ?

C'est animé de ce sentiment d'urgence que près de 200 jeunes d'horizons divers, des chercheurs africains, des représentants des secteurs public et privé, ainsi que des experts de la Banque mondiale ont récemment organisé une table ronde virtuelle pour réfléchir aux opportunités que présentent l’intégration régionale pour la jeunesse africaine. Cet événement organisé conjointement par deux réseaux de jeunes Africains — Youth Transforming Africa et Youth Alliance for Leadership and Development in Africa (YALDA) — a permis aux participants d’aborder la question de l’intégration régionale afin de favoriser la transformation socio-économique de l'Afrique en s'attaquant au problème du chômage des jeunes.

Les débats ont abouti à deux grandes conclusions :

  1. La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) changera la donne en offrant aux jeunes de vastes possibilités pour stimuler le commerce, développer des réseaux et créer des emplois d’avenir, à condition qu’elle soit correctement mise à profit. Initiée par l'Union africaine la ZLECAf est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2021. Elle a pour but de « créer un marché régional unique des biens et des services ainsi qu'une union douanière facilitant la libre circulation des capitaux et des personnes ». Cet accord important est porteur d'espoirs pour la jeunesse africaine, à plus d’un titre.
    Comme l'a souligné Francis Mangeni, responsable de la promotion du commerce et des programmes au secrétariat de la ZLECAf, l'accord préconise la mise en place de plateformes numériques permettant aux jeunes Africains de commercialiser leurs idées. Par exemple, grâce à des outils de marketing et de vente tels que l'Observatoire africain du commerceet le mécanisme Trade Barriers, les jeunes peuvent facilement recenser toutes les possibilités de commerce et d'investissement en Afrique et dans le monde, partout où ils se trouvent. Pour les jeunes entrepreneurs africains, l'accès à une diversité de marchés est synonyme de nouveaux horizons en matière de développement technologique, de diversification économique, de réseau de relations et de collaboration entre pairs de différents pays, mais c’est aussi la clé pour bénéficier d’un plus grand vivier de possibilités d’investissement. Soit autant de facteurs déterminants pour favoriser l'accès à des emplois de qualité et aux financements, tout en créant un environnement propice au développement d'entreprises qui transformeront le continent.
  2. Les jeunes doivent développer leurs compétences dans les domaines scientifiques et techniques les plus porteurs pour l'intégration régionale de l'Afrique.
     L'accès aux savoir-faire, à l'information et à l'éducation est primordial pour la jeunesse du continent. C'est ce qui lui permettra d'acquérir les compétences d’avenir, nécessaires pour exercer des métiers en pleine évolution et travailler dans des secteurs importants tels que le tourisme, l'hôtellerie, l'agriculture, l'agro-alimentaire et bien d'autres encore.
    Lors de la table ronde, ces messages ont été réaffirmés à plusieurs reprises par Claire Kfouri, chef du département Intégration régionale en Afrique de la Banque mondiale, et Nicolatte Mutuku, fondatrice de l'organisation de développement de la jeunesse Walking the African Journey. Les jeunes Africains doivent bénéficier d’une formation théorique et professionnelle structurée, centrée sur la gestion d'entreprise et l'entrepreneuriat pour leur permettre de concrétiser leurs idées en produits et services utiles, susceptibles de contribuer au développement économique et social de la région. Cela est d’autant plus pertinent que les jeunes d'Afrique ont une fois de plus fait preuve de leur créativité pour proposer solutions et innovations afin de relever les défis posés par la pandémie de COVID-19.
    L'Afrique a un besoin urgent de compétences de haut niveau fondamentales, en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques (STIM), comme l’a souligné Dassidi Nideou, post-doctorant au Centre d'excellence régional sur les sciences aviaires (CERSA), hébergé par l'université de Lomé au Togo. Ce jeune chercheur a témoigné de l'importance pour les établissements d'enseignement supérieur en Afrique de se concentrer sur des spécialisations régionales dans les STIM afin de contribuer au renforcement des compétences indispensables à la transformation économique du continent.
    L'exemple de Dassidi, qui illustre l'apport des quelques 70 Centres d'excellence africains (CEA) actuellement mis en place à l'échelle de la région, a suscité un grand intérêt parmi les participants. Les CEA sont en effet des atouts majeurs au service du processus d'intégration régionale, car ils facilitent les rapprochements entre jeunes de différentes nationalités qui partagent des problématiques communes, tout en soutenant la création de réseaux de compétences susceptibles d'être déployés sur tout le continent pour répondre à la demande du marché. Plus important encore, ils incitent davantage de femmes à poursuivre des études supérieures dans le domaine des STIM. Ce sont là des initiatives nécessaires pour ouvrir à la jeunesse africaine les horizons économiques qu'elle mérite et dont elle a grandement besoin.

Il faut encore intensifier les efforts d'intégration régionale afin de trouver des solutions viables à la crise du chômage des jeunes en Afrique et tirer ainsi parti d'un potentiel considérable, encore inexploité . Le renforcement de la collaboration entre les pays permettra aux jeunes de jouer un rôle prépondérant dans le processus de développement socio-économique du continent.

Une Afrique plus intégrée offrira à sa jeunesse davantage de perspectives économiques, un accès plus large aux capitaux et aux investisseurs, ainsi que des réseaux plus vastes. Il y a donc des raisons d'espérer. Bon nombre des jeunes qui ont participé à la table ronde virtuelle, étaient curieux de découvrir comment l'intégration régionale pourrait résoudre les problèmes pressants auxquels ils se heurtent collectivement. Indépendamment de leurs domaines d'intérêt respectifs, ils en ont assurément tous tiré une meilleure compréhension des leviers qui leur permettront d’exploiter pleinement ces nouvelles opportunités. Ils pourront ainsi les exploiter en investissant dans leur propre capital humain pour accumuler des compétences et une expérience professionnelle supplémentaires ou en se familiarisant avec des secteurs porteurs pour la croissance de l'Afrique. À l'évidence, des tables rondes comme celle-ci sont bienvenues, pertinentes et motivantes pour les jeunes Africains.


Auteurs

Ruti Ejangue

Consultante en Communications à la Banque Mondiale pour la région Afrique

Prenez part au débat

Le contenu de ce champ est confidentiel et ne sera pas visible sur le site
Nombre de caractères restants: 1000