Autonomisation des jeunes : repenser et transformer le développement des compétences en Afrique de l'ouest et centrale

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Seynabou Ndiaye works in the control tower. She is an air traffic controller at Blaise Diagne international airport, Diamniadio, Senegal. ©Vincent Tremeau, World Bank Seynabou Ndiaye works in the control tower. She is an air traffic controller at Blaise Diagne international airport, Diamniadio, Senegal. ©Vincent Tremeau, World Bank

La région d'Afrique de l'Ouest et centrale compte environ un demi-milliard d'habitants dont plus de 40 % ont moins de 15 ans, comme l'indiquent les données du rapport des Nations Unies sur la population en 2030 (a). La jeunesse est donc l'un des plus grands atouts de cette région, et la proportion de jeunes devrait encore augmenter.Par exemple, la population jeune du Mali devrait connaître une progression fulgurante de 71 %, tandis que celle du Nigéria devrait s'accroître d'environ 60 % entre 2015 et 2030. À elles seules, ces projections démontrent qu'il est essentiel que tous les pays d’Afrique de l’ouest et centrale exploitent pleinement ce dividende démographique pour soutenir la réalisation de leurs objectifs de développement économique. Par ailleurs, la quatrième révolution industrielle et l'essor de l'économie numérique (a) ouvrent des voies de développement sans précédent. Cependant, même si ces évolutions semblent prometteuses, elles peuvent aussi être synonymes de défis importants si les gouvernements ne renforcent pas leur soutien à la jeunesse, en lui assurant de meilleures possibilités d'éducation, de formation et d'emploi. 

Les défis

Aujourd'hui, la plupart des décideurs politiques et des experts en éducation se posent la question suivante : comment la région pourrait-elle repenser et réajuster le développement des compétences de la jeunesse africaine, et renouveler son engagement en faveur de cet enjeu ? Une première réponse est évidente : le statu quo n'est pas la solution !

L'Afrique de l'Ouest et centrale est une vaste région aux paysages, cultures et langues très divers. Elle est aussi en butte à des problèmes importants : le niveau élevé du chômage des jeunes, des écarts chroniques entre les sexes en matière d'éducation post-élémentaire et de participation au marché du travail, la menace du changement climatique, des niveaux alarmants de pauvreté, de vulnérabilité et d'inégalités, le tout étant exacerbé par la pandémie actuelle. En outre, plus de 70 % de la population vit dans des pays fragiles, en proie à des conflits et à la violence.

En dépit de progrès significatifs pour l'accès à l'éducation de base (avec des taux bruts de scolarisation élevés), plusieurs difficultés subsistent, dont notamment le fait que trop peu de jeunes peuvent suivre des programmes de développement des compétences de qualité et axés sur le marché du travail. D'autres écueils résultent de l'insuffisance de données sur le marché du travail et l'employabilité, de l'inadéquation des financements et de la faiblesse des systèmes de gouvernance et d'assurance qualité. Bien que la transformation numérique progresse rapidement dans les pays d’Afrique de l'ouest et centrale, de larges lacunes persistent, en particulier pour les qualifications numériques avancées, en comparaison avec les compétences numériques de base et intermédiaires. Or la quatrième révolution industrielle bouleverse la demande de compétences. Il faut des ingénieurs, des techniciens, des spécialistes des technologies de l'information et de la communication (TIC) très qualifiés, dotés de capacités d'adaptation et de solides aptitudes cognitives et socio-affectives, en plus de leurs savoir-faire techniques.  

Une main-d'œuvre hautement qualifiée dans un écosystème numérique florissant va accroître la compétitivité mondiale des pays d'Afrique de l'ouest et centrale. Elle permettra d'attirer des investissements, de favoriser l'innovation dans la prestation des services et la valorisation des ressources naturelles, et de créer des activités à forte intensité de connaissances.

Agro-solar Academy students in Sierra Leone installing a solar water pump and learning how to use measuring instruments. © SL Skills Development Project
Des étudiants de l'Agro-solar Academy en Sierra Leone installent une pompe à eau solaire et apprennent à utiliser des instruments de mesure. © Projet de développement des compétences au Sierra Leone, 2021

Les solutions

Pour relever ces défis, la Banque mondiale met au point une stratégie régionale pour l'éducation (2022-2025) qui met l'accent sur le développement des compétences et l'autonomisation des jeunes femmes. Cette démarche découle de la stratégie de la Banque mondiale pour la région de l’Afrique de l’Ouest et centrale (2021-2025), à visée multisectorielle. Elle s'appuie en outre sur une approche consultative rigoureuse qui assure une collaboration étroite avec les parties prenantes régionales concernées (gouvernements, partenaires du développement, société civile, organisations de jeunesse, secteur privé et influenceurs).

S'appuyant sur des expériences régionales et mondiales, la stratégie pour l'éducation en Afrique de l’Ouest et centrale recense des interventions et des modèles efficaces, évolutifs et axés sur les résultats pour améliorer le développement des compétences des jeunes de la région. Elle porte notamment sur les aspects critiques suivants :

  1. l'utilisation des technologies de l'éducation (EdTech) et de méthodes pédagogiques innovantes, par exemple EdoBest (a) au Nigéria ;
  2. la formation pratique et les programmes d'entrepreneuriat et d'incubation, par exemple Sèmè City au Bénin ;
  3. la mise en place d’incitations et de financements durables pour améliorer l'inclusion des jeunes vulnérables, par exemple, le Fonds de développement des compétences en Sierra Leone (a) ;
  4. la modernisation de la gouvernance des institutions et systèmes sectoriels, par exemple Workforce Singapore (a) à Singapour ;
  5. les partenariats public-privé pour le développement des compétences et l'enseignement supérieur, par exemple l'université Ashesi au Ghana (a) ;
  6. la collaboration régionale, par exemple les Centres d’excellence africains (a).

Parmi les enseignements clés de la crise de la COVID-19, il apparaît que la technologie numérique jouera un rôle fondamental pour soutenir des programmes innovants ainsi que de nouvelles pratiques pédagogiques dans le secteur de l'éducation et de la formation. Toutefois, il est évident que les solutions technologiques ne sont utiles que si elles sont accessibles de manière équitable et inclusive. Il est donc essentiel que les investissements dans les infrastructures (y compris l'énergie et la connectivité) favorisent l'inclusion afin d'éliminer les disparités dans la région et au sein même des pays. Tous les enfants et tous les jeunes méritent de bénéficier pleinement de ces solutions technologiques.

Un appel à l’action

Aujourd'hui plus que jamais, les gouvernements africains ont le pouvoir d'adopter et de mettre en œuvre des solutions adaptées pour libérer le potentiel de la jeunesse du continent. À cet égard, l'ensemble des dirigeants régionaux, des secteurs privé et public, doivent travailler ensemble, car c'est grâce à un engagement fort, à une adhésion à ce projet et à un partenariat stratégique que des progrès se concrétiseront. Nous devons tous faire en sorte de mettre en place des systèmes de développement des compétences adaptés et résilients, tant dans la formation technique et professionnelle que dans l'enseignement supérieur. Et il est tout aussi indispensable de doter les jeunes, en particulier les jeunes femmes, des compétences et des outils nécessaires dans un monde où la nature de l'emploi évolue rapidement et en permanence. Les coûts d'opportunité en cas d'absence de telles réformes pourraient être colossaux, et nous ne pouvons plus nous permettre d'échouer.


Auteurs

Ekua Nuama Bentil

Spécialiste senior en éducation, Banque mondiale

Yoko Nagashima

Senior Education Specialist

Jamil Salmi

Tertiary Education Coordinator

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