Les déplacements causés par les conflits sont en hausse à travers le monde. En République centrafricaine (RCA) et ailleurs, la violence – aggravée par les impacts dévastateurs du changement climatique – amène les populations à quitter leur foyer. En 2013, avec l'augmentation des combats entre différents groupes armés, quelque 60 000 personnes ont quitté les villages entourant la ville de Paoua au nord-ouest du pays. « Les meurtres nous ont poussé à fuir, » se souvient Erica Lemdja, « sans vêtements, ni chaussures, rien. »
À l'échelle globale, la Banque mondiale estime que 60 % des personnes les plus pauvres vivront dans un contexte de fragilité, conflit et violence (FCV) d'ici 2030. La RCA est l'un des pays les plus pauvres et fragiles au monde, malgré des ressources naturelles abondantes. Selon le récent rapport d'évaluation de la pauvreté en RCA, près de 70 % de la population vit en dessous du seuil de 1,90 dollars par jour, et 90 % de la population vit au sein d'un foyer ayant connu un choc. Les conflits armés représentent le facteur prédominant (54 %), suivi par la santé (48 %), les revenus du ménage (38 %), les prix alimentaires (27%), et le climat (27%).
Depuis 2017, grâce à l'amélioration de la situation sécuritaire, le projet de la Banque mondiale de fourniture de services et d'appui aux communautés affectées par le déplacement (PACAD) a réuni le gouvernement et l'UNOPS afin de fournir des infrastructures et transformer les communautés locales à travers la RCA. L'UNOPS, l'agence des Nations Unies chargée de l'infrastructure et de la passation de marchés, est un partenaire de la banque mondiale, en particulier dans les contextes FCV. Le ministère de l'Action humanitaire et de la Réconciliation nationale de RCA a conduit la mise en œuvre du projet, afin d'atteindre les citoyens les plus vulnérables à Bangui, la capitale, et bien au-delà.
Les réalisations du PACAD ont non seulement permis de répondre aux besoins en matière d'infrastructure mais aussi en matière de création d'emplois. En plus des infrastructures communautaires, le projet utilise des transferts en espèces pour aider directement les populations déplacées et les communautés hôtes à reconstruire leurs vies et leurs moyens de subsistance. Les programmes de travaux publics à haute intensité de main d'œuvre ont créé 119 575 jours-personne de travail, dont 27 % accomplis par des femmes, principalement dans la réhabilitation des réseaux routiers.
Le projet vise en priorité l'amélioration de l'accès aux services de base pour les personnes qui en ont le plus besoin, particulièrement celles affectées par le déplacement. En consultation avec les communautés ciblées et à travers une approche participative, quatre plans de développement local ont été établis, permettant l'identification, la sélection et la validation des investissements en infrastructure pour les villes de Bambari, Kaga-Bandoro, Paoua, Bangassou et la capitale, Bangui. Les résultats obtenus ont été transformateurs. Un nouveau pont à Kaga-Bandoro relie deux quartiers de la ville et permet un accès sécurisé à un marché de bétail, et ainsi, à des opportunités économiques. À Paoua, une nouvelle école accueille les enfants déplacés par les conflits en leur permettant de rejoindre l'établissement en toute sécurité, sans avoir à traverser l'aérodrome local. Dans toutes ces villes, des panneaux solaires et des batteries donnent accès à une électricité propre, pour contribuer aux résultats scolaires des jeunes et à leur sécurité.
Au total, le PACAD a touché sept villes, dont certaines éloignées de la capitale. Ainsi à Bambari, une ville commerçante située à plus de six heures de route de Bangui, la clinique a ainsi été agrandie et une station de bus ainsi qu'un parc municipal ont été créés dans le cadre du projet. Ces infrastructures locales sont essentielles au soutien de la prospérité à venir de la communauté. L'agrandissement de la clinique réalisé par le projet a permis aux professionnels de santé d'améliorer la qualité de leurs soins, d'accueillir davantage de patients et d'offrir un appui post-natal plus long. Une infirmière souligne ainsi : « Aujourd'hui, je peux recevoir jusqu'à 45 femmes enceintes par jour en consultation, en plus des suivis quotidiens. » L'accès à l'eau et à l'électricité ayant été assuré par l'installation d'un générateur, le centre de santé opère maintenant avec une efficacité et une fiabilité renforcées. Les témoignages des bénéficiaires confirment collectivement ce sentiment de changement positif. Ils insistent notamment sur le fait que les bénéfices dépassent les améliorations apportées à la clinique et rejaillissent sur les personnes qu'elle accueille, créant ainsi une communauté en meilleure santé et plus résiliente.
En parallèle, le parc municipal a été transformé pour offrir un lieu de rencontre quotidien aux associations et aux groupes locaux, il constitue un nouveau lieu d'échange pour les résidents. Le parc est devenu un espace de réconciliation pour la communauté.
En plus des équipements publics, le projet a aussi permis d'installer 165 réverbères solaires et de réparer les routes pour les rendre plus sûres et aider à relier les communautés. De meilleures routes ne représentent pas seulement un chemin pour aller d'un lieu à un autre ; elles créent aussi les conditions pour améliorer les moyens de subsistance. L'éclairage public solaire peut également jouer un rôle important. Ces réverbères sont bénéfiques pour l'environnement et favorisent aussi la sûreté et la sécurité. Dans un pays où l'accès à l'électricité figure parmi les plus faibles au monde, il n'est pas rare de voir des étudiants réunis sous un réverbère pour étudier à la nuit tombée.
Offrir les infrastructures et les services de base aux communautés dans des zones isolées est au cœur du partenariat entre le gouvernement, la Banque mondiale, l'UNOPS et les autres agences des Nations Unies. Les infrastructures communautaires ne se limitent pas aux moyens de subsistance ; elles représentent également une source de fierté locale. Victor Bissekoin, chef communautaire à Bambari, dans la préfecture de la Ouaka, le résume ainsi : « Grâce à ce projet, le gouvernement est parvenu à faire revenir de nombreux habitants, en leur redonnant leur place au sein de la communauté. »
Alors que la mise en œuvre du projet arrive à son terme, ses résultats apparaissent clairement. Parmi les populations ciblées, le PACAD a contribué à la réduction de la pauvreté, au développement économique local à travers les communautés bénéficiaires et, par conséquent, à un sentiment plus fort de réconciliation nationale.
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