Lorsque j’ai commencé à travailler dans la Région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) il y a deux ans, j’ai découvert avec surprise que la région, pourtant dotée de larges ressources énergétiques (production de 30 % du pétrole mondial ; 41 % des gisements de gaz naturels connus ; principaux produits d’exportation : les hydrocarbures), satisfait tout juste la demande intérieure en électricité, en raison de pénuries chroniques en gaz.
La recomposition du paysage politique au sein de la région a de lourdes répercussions sur le secteur de l’énergie, du fait, notamment, de la généralisation des coupures d’électricité dans de nombreux pays, qui nourrit l’insatisfaction des populations à l’égard de ses représentants. C’est le cas en Égypte, en Iraq, en Tunisie et au Liban. Dans les pays touchés par la guerre civile (Yémen, Syrie et Libye), ce phénomène est exacerbé. Selon une enquête de la Banque mondiale menée auprès des entreprises, 49 % des entrepreneurs de la région MENA considèrent l’accès à l’électricité comme un frein majeur à leur activité, soit un pourcentage plus élevé que dans toute autre région. Pour moi qui ai travaillé en Asie du Sud, où les coupures d’électricité sont courantes, ces résultats m’ont d’abord paru surprenants, jusqu’au jour où je me suis rendu compte que ce fléau était relativement nouveau dans la région MENA.
Les pays sont de plus en plus enclins à reconnaître que les subventions à l’énergie exacerbent les dysfonctionnements et qu’elles devront être progressivement abolies. En 2011, la région versait à elle seule près de la moitié des subventions à l’énergie dans le monde, soit 8,6 % du PIB régional et 22 % des dépenses publiques. Ces dispositifs sont pour la plupart mal ciblés (ils bénéficient plus aux riches qu’aux pauvres), favorisent la surconsommation et grèvent lourdement les finances publiques. Pour répondre aux attentes des populations qui demandent de plus grands investissements en matière d’emploi, d’éducation, de services de la santé et de protection sociale, les gouvernements de la région devront considérablement diminuer les coûts de fourniture de services énergétiques.
Il leur faudra également investir davantage dans le secteur de l’énergie, dans le but d’améliorer ces mêmes services. La quasi-totalité des ministres de l’Énergie que j’ai rencontrés se heurtent au défi de doubler la capacité du réseau électrique en l’espace de quelques années. Le taux de croissance annuel pour la demande en électricité se situe entre 4 % et 8 % pour la région et atteint jusqu’à 25 % pour le Gouvernement régional du Kurdistan (Iraq). L’abolition des subventions à l’énergie devrait réduire quelque peu la consommation d’énergie ; par ailleurs, les États devraient déployer plus d’efforts pour mettre en œuvre des mesures d’efficacité énergétique, même si cela demande du temps. Cependant, dans des pays comme la Jordanie, par exemple, où les subventions aux carburants n’existent plus, et où l’introduction de nouveaux tarifs permet au secteur de l’électricité de recouvrer plus de la moitié du coût de la fourniture d’énergie, la demande en électricité augmente encore à un rythme annuel de 5 %. La demande continuera de progresser, en raison de la croissance économique, d’un essor de la population jeune et d’autres facteurs, comme le coût plus abordable de la climatisation, paramètre important les pays du Golfe et au Maghreb.
Pour répondre au défi de l’augmentation de la demande en énergie, les pays envisagent plusieurs stratégies, sans se focaliser uniquement une hausse des prix. Les responsables jordaniens, égyptiens et marocains ont également formulé des promesses crédibles en faveur d’un approvisionnement et d’une qualité de service meilleurs. Leur démarche s’inspire des exemples turc et indien, qui nous montrent que le passage d’une électricité à bas prix à une tarification au prix du marché est tributaire d’une amélioration de la qualité de service. Pour que le lancement de cette nouvelle politique soit couronné de succès, il faut l’assortir de mesures de soutien en faveur des populations que cette nouvelle tarification exclut. Il s’agira par ailleurs de convaincre la classe moyenne et les industriels des bénéfices à terme et d’emporter leur adhésion, jugée essentielle.
Par ailleurs, un certain nombre de pays de la région se rend compte que le secteur privé a un rôle important à jouer dans l’approvisionnement fiable de l’électricité, afin d’assurer un service ininterrompu à tous les usagers de la région MENA. La Jordanie, l’Iraq et l’Égypte ont décidé d’abandonner l’ancien modèle de développement, qui laissait au secteur public l’entière responsabilité de satisfaire à la demande en électricité.
La question est de savoir si la région a la capacité de s’inspirer des réformes réussies ailleurs et de réduire la phase de transition vers un modèle plus viable et fiable (au Vietnam et en Turquie, il a fallu entre 10 et 20 ans). Il existe par ailleurs un certain nombre de mesures prises parallèlement qui ont fait leurs preuves, comme la création d’opportunités pour favoriser la participation du secteur privé au secteur de l’énergie, le développement d’instances de régulation rigoureuses et indépendantes qui dynamisent la concurrence (pour des services plus efficaces), la simplification des démarches administratives pour encourager une prise de décision plus efficace et un processus de changement qui vise une efficacité et une productivité accrues, dans le souci d’améliorer les performances des opérateurs publics.
Au regard des expériences menées ailleurs, la réalisation de ces objectifs devra s’accompagner de la création d’institutions efficaces, dotées d’une bonne connaissance des aspects sociaux et politiques propres aux réformes. Autres composantes clés, un travail de sensibilisation approfondi en direction des populations et la création de dispositifs permettant aux administrés de juger de l’action des pouvoirs publics dans l’amélioration des prestations de services. Compte tenu de la charge fiscale représentée par le secteur de l’énergie dans la région, il est par ailleurs essentiel de s’appuyer sur les meilleures pratiques internationales dans le but de réduire les coûts de la production d’électricité et d’optimiser les investissements dans le secteur en facilitant le commerce de l’énergie régional, facteur potentiel de réduction des coûts d’investissement, afin d’anticiper les prévisions d’accroissement de 25 % de la demande d’ici à 2020.
La recomposition du paysage politique au sein de la région a de lourdes répercussions sur le secteur de l’énergie, du fait, notamment, de la généralisation des coupures d’électricité dans de nombreux pays, qui nourrit l’insatisfaction des populations à l’égard de ses représentants. C’est le cas en Égypte, en Iraq, en Tunisie et au Liban. Dans les pays touchés par la guerre civile (Yémen, Syrie et Libye), ce phénomène est exacerbé. Selon une enquête de la Banque mondiale menée auprès des entreprises, 49 % des entrepreneurs de la région MENA considèrent l’accès à l’électricité comme un frein majeur à leur activité, soit un pourcentage plus élevé que dans toute autre région. Pour moi qui ai travaillé en Asie du Sud, où les coupures d’électricité sont courantes, ces résultats m’ont d’abord paru surprenants, jusqu’au jour où je me suis rendu compte que ce fléau était relativement nouveau dans la région MENA.
Les pays sont de plus en plus enclins à reconnaître que les subventions à l’énergie exacerbent les dysfonctionnements et qu’elles devront être progressivement abolies. En 2011, la région versait à elle seule près de la moitié des subventions à l’énergie dans le monde, soit 8,6 % du PIB régional et 22 % des dépenses publiques. Ces dispositifs sont pour la plupart mal ciblés (ils bénéficient plus aux riches qu’aux pauvres), favorisent la surconsommation et grèvent lourdement les finances publiques. Pour répondre aux attentes des populations qui demandent de plus grands investissements en matière d’emploi, d’éducation, de services de la santé et de protection sociale, les gouvernements de la région devront considérablement diminuer les coûts de fourniture de services énergétiques.
Il leur faudra également investir davantage dans le secteur de l’énergie, dans le but d’améliorer ces mêmes services. La quasi-totalité des ministres de l’Énergie que j’ai rencontrés se heurtent au défi de doubler la capacité du réseau électrique en l’espace de quelques années. Le taux de croissance annuel pour la demande en électricité se situe entre 4 % et 8 % pour la région et atteint jusqu’à 25 % pour le Gouvernement régional du Kurdistan (Iraq). L’abolition des subventions à l’énergie devrait réduire quelque peu la consommation d’énergie ; par ailleurs, les États devraient déployer plus d’efforts pour mettre en œuvre des mesures d’efficacité énergétique, même si cela demande du temps. Cependant, dans des pays comme la Jordanie, par exemple, où les subventions aux carburants n’existent plus, et où l’introduction de nouveaux tarifs permet au secteur de l’électricité de recouvrer plus de la moitié du coût de la fourniture d’énergie, la demande en électricité augmente encore à un rythme annuel de 5 %. La demande continuera de progresser, en raison de la croissance économique, d’un essor de la population jeune et d’autres facteurs, comme le coût plus abordable de la climatisation, paramètre important les pays du Golfe et au Maghreb.
Pour répondre au défi de l’augmentation de la demande en énergie, les pays envisagent plusieurs stratégies, sans se focaliser uniquement une hausse des prix. Les responsables jordaniens, égyptiens et marocains ont également formulé des promesses crédibles en faveur d’un approvisionnement et d’une qualité de service meilleurs. Leur démarche s’inspire des exemples turc et indien, qui nous montrent que le passage d’une électricité à bas prix à une tarification au prix du marché est tributaire d’une amélioration de la qualité de service. Pour que le lancement de cette nouvelle politique soit couronné de succès, il faut l’assortir de mesures de soutien en faveur des populations que cette nouvelle tarification exclut. Il s’agira par ailleurs de convaincre la classe moyenne et les industriels des bénéfices à terme et d’emporter leur adhésion, jugée essentielle.
Par ailleurs, un certain nombre de pays de la région se rend compte que le secteur privé a un rôle important à jouer dans l’approvisionnement fiable de l’électricité, afin d’assurer un service ininterrompu à tous les usagers de la région MENA. La Jordanie, l’Iraq et l’Égypte ont décidé d’abandonner l’ancien modèle de développement, qui laissait au secteur public l’entière responsabilité de satisfaire à la demande en électricité.
La question est de savoir si la région a la capacité de s’inspirer des réformes réussies ailleurs et de réduire la phase de transition vers un modèle plus viable et fiable (au Vietnam et en Turquie, il a fallu entre 10 et 20 ans). Il existe par ailleurs un certain nombre de mesures prises parallèlement qui ont fait leurs preuves, comme la création d’opportunités pour favoriser la participation du secteur privé au secteur de l’énergie, le développement d’instances de régulation rigoureuses et indépendantes qui dynamisent la concurrence (pour des services plus efficaces), la simplification des démarches administratives pour encourager une prise de décision plus efficace et un processus de changement qui vise une efficacité et une productivité accrues, dans le souci d’améliorer les performances des opérateurs publics.
Au regard des expériences menées ailleurs, la réalisation de ces objectifs devra s’accompagner de la création d’institutions efficaces, dotées d’une bonne connaissance des aspects sociaux et politiques propres aux réformes. Autres composantes clés, un travail de sensibilisation approfondi en direction des populations et la création de dispositifs permettant aux administrés de juger de l’action des pouvoirs publics dans l’amélioration des prestations de services. Compte tenu de la charge fiscale représentée par le secteur de l’énergie dans la région, il est par ailleurs essentiel de s’appuyer sur les meilleures pratiques internationales dans le but de réduire les coûts de la production d’électricité et d’optimiser les investissements dans le secteur en facilitant le commerce de l’énergie régional, facteur potentiel de réduction des coûts d’investissement, afin d’anticiper les prévisions d’accroissement de 25 % de la demande d’ici à 2020.
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