En conséquence, les plus démunis sont nettement désavantagés et n’ont guère la possibilité de lisser leurs dépenses ou de participer à l’activité économique productive, et encore moins à un niveau et avec des capacités suffisantes pour sortir de la pauvreté. Cette exclusion financière pourrait donc en partie expliquer le manque d’efficacité des programmes de lutte contre la pauvreté au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA).
Même si les taux de bancarisation, mesurés par la proportion des 15 ans et plus qui possèdent un compte auprès d’un établissement financier, sont élevés dans plusieurs États du golfe (87 % au Koweït, 74 % en Iran et à Oman, 66 % au Qatar), la région MENA dans son ensemble affichait une moyenne de 18 % en 2011, soit le niveau le plus bas au monde (graphique 1).
Graphique 1 : Panorama des taux de bancarisation dans le monde et dans les pays de la région MENA
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Source : Global Findex.
Sans compte bancaire ou tout autre type de relation établie avec un établissement financier, les pauvres n’ont pas ou peu accès aux services d’épargne, de crédit et d’assurance formels. Cette situation les empêche de saisir diverses possibilités génératrices de revenus, par exemple en créant une petite société ou en se lançant dans un projet entrepreneurial de plus grande ampleur. Pour améliorer l’efficacité des programmes de lutte contre la pauvreté dans la région MENA, il faut centrer les efforts sur l’accès aux services financiers. La formulation d’une nouvelle politique publique dans ce domaine pourrait cibler, en premier lieu, l’éducation.
À l’échelle mondiale, on constate que les femmes, les jeunes, les personnes peu instruites, les populations rurales et les pauvres sont défavorisés par rapport aux autres catégories (tableau 1) en ce qui concerne l’accès aux services financiers. Cependant, parmi ces différents facteurs, c’est l’éducation qui semble influer le plus : 43 % des individus ayant fait des études supérieures possèdent un compte auprès d’une institution financière formelle, contre seulement 14 % de ceux dont la scolarité n’a pas dépassé le primaire.
Tableau 1. Variation des taux de bancarisation en fonction de différents critères
Source : Demirguc-Kunt et Klapper (2012).
En améliorant l’accessibilité et la qualité de l’éducation, les pays de la région MENA pourraient combattre la pauvreté sur deux fronts. Premièrement, le relèvement du niveau d’études et de la qualité de l’enseignement permettrait une hausse du revenu tout au long de la vie, ce qui réduirait à terme le nombre de pauvres et la profondeur de la pauvreté. Deuxièmement, un niveau d’études plus élevé peut significativement accroître la probabilité d’accès aux services financiers formels. On sait, là encore, que cela influence nettement le revenu sur l’ensemble d’une vie en favorisant les activités entrepreneuriales et en lissant les dépenses consacrées à l’éducation, à l’alimentation et à la santé, autant d’ingrédients essentiels au capital humain à long terme. Il ne fait aucun doute que l’élargissement de l’accès à l’enseignement supérieur aurait un effet plus marqué dans des pays comme le Yémen, l’Iraq et l’Égypte, qui affichent un faible taux brut d’inscription à ce niveau-là : respectivement 10, 16 et 30 %. Si les programmes régionaux prenaient clairement en compte le rôle de l’éducation comme voie d’accès aux services financiers, ils poseraient les jalons nécessaires pour mettre fin à la pauvreté.
[1]http://go.worldbank.org/1F2V9ZK8C0
[2]http://wwwwds.worldbank.org/servlet/WDSContentServer/WDSP/IB/2012/04/19/000158349_20120419083611/Rendered/PDF/WPS6025.pdf
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